La validation des acquis de l'expérience (VAE) « pourrait répondre utilement aux besoins de certification de six millions d'actifs, dont nombre de bénéficiaires potentiels peu diplômés »... Mais, six ans après son instauration par le législateur, force est de constater que, en termes quantitatifs, le dispositif « n'a pas encore tenu ses promesses » et « peine à décoller ». Seuls 26 000 titres et diplômes ont en effet été certifiés par cette voie en 2006, loin de l'objectif de 60 000 par an affiché par le plan de développement gouvernemental. « Une façon euphémique de dire que c'est un demi-échec ou une déception », a ironisé le secrétaire d'Etat chargé de la prospective et de l'évaluation des politiques publiques en remettant, le 4 septembre, au ministre du Travail un rapport sur le dispositif (1). Un document où il passe en revue les « multiples problèmes » qui limitent son essor et occasionnent « des déperditions de candidats multiples tout au long du parcours », avant de formuler plusieurs recommandations pour l'améliorer.
Les difficultés de la VAE résultent d'obstacles propres à la procédure, jugée « trop longue, peu lisible et dissuasive ». Elles tiennent également à la certification des titres et diplômes, et aux relations difficiles entre la certification et le monde de l'entreprise
Selon Eric Besson, il importe tout d'abord d'améliorer l'information sur la VAE et de redonner un sens au dispositif. Précisément, la communication devrait être renforcée au niveau national et ciblée sur les publics prioritaires, notamment les moins diplômés. « Cette campagne de communication sera d'autant plus efficace qu'elle interviendra à la suite d'un renforcement et d'une réorganisation des réseaux d'accueil et d'orientation sur la VAE », précise le secrétaire d'Etat. Pour lui, il s'agit ensuite d'améliorer la lisibilité du dispositif en simplifiant la certification. Selon le rapport, il est nécessaire que la production de titres et diplômes des certificateurs soit mieux articulée, ce qui suppose un renforcement des pouvoirs de la Commission nationale de certification professionnelle qui gère le Répertoire national des certifications professionnelles. Au-delà, la conception modulaire des titres et diplômes devrait être développée, en accord avec les réflexions conduites au niveau européen. Il serait également souhaitable de parvenir à une réduction du nombre de certifications disponibles sur le marché du travail.
Le rapport propose également de réduire le temps d'élaboration du livret de recevabilité (livret 1) dans lequel le candidat doit apporter la preuve qu'il a exercé pendant au moins trois ans des activités professionnelles ou bénévoles en rapport avec la certification visée. Il faut aussi, selon le document, raccourcir la durée de constitution du livret de présentation des acquis de l'expérience (livret 2) et sa présentation devant le jury. Cela nécessite de rendre plus facile l'organisation des jurys, notamment en renforçant les incitations financières à la participation aux jurys pour les professionnels, explique Eric Besson.
Le développement de la VAE requiert par ailleurs de mieux accompagner les candidats, en particulier les moins diplômés. D'une part, les candidats devraient pouvoir être soutenus tout au long de la procédure, de la constitution du dossier de recevabilité (livret 1, identification du titre susceptible d'être acquis en fonction de l'expérience accumulée), en passant par la constitution du dossier pour le jury (livret 2), jusqu'aux suites du passage devant le jury (notamment en cas de validation partielle ou d'échec), estime Eric Besson. D'autre part, selon lui, cet accompagnement gagnerait à être renforcé pour les candidats les moins diplômés et les publics prioritaires (jeunes en début de vie active, métiers en déclin et actifs en reconversion, etc.). « Ces actions, pour être efficaces, supposent que la qualité des prestations soit améliorée et que l'offre d'accompagnement soit mieux contrôlée », ajoute-t-il.
Mais le développement de la VAE ne consiste pas seulement en l'amélioration du dispositif actuel. Il nécessite également d'élargir la perspective de la VAE. Pour mieux l'inscrire dans la sécurisation des parcours professionnels, il s'agit ainsi de mieux articuler VAE et droit individuel à la formation, d'une part, et VAE et compte épargne-temps, d'autre part. Par ailleurs, à côté de la logique individuelle initiale, il s'agit de promouvoir une approche collective de la VAE, afin d'accroître l'investissement des entreprises dans ce domaine. « De nombreux exemples de bonnes pratiques font apparaître le gain de cette démarche pour l'entreprise comme pour le salarié, notamment dans une perspective d'adaptation au changement », souligne Eric Besson.
En renforçant la VAE, il s'agit aussi de contribuer à la sécurisation des parcours professionnels pour favoriser la mobilité sur le marché du travail et faciliter ainsi sa modernisation et sa fluidité, « gages d'une économie plus réactive et plus compétitive dans un contexte de vieillissement de la population », poursuit le secrétaire d'Etat. Dans ce cadre, selon lui, la VAE est « un outil utile mais elle ne peut à elle seule répondre aux enjeux du signalement des compétences ». Les partenaires sociaux doivent être encouragés à renforcer leur action dans ce domaine et à développer les instruments déjà existants (recrutement par simulation, certificat de qualification professionnelle interprofessionnel...), dans la continuité de l'accord national interprofessionnel du 11 janvier 2008 sur la modernisation du marché du travail.
A noter : commentant les conclusions du rapport d'Eric Besson, Xavier Bertrand a indiqué que « chaque diplôme professionnel devrait être accessible par la VAE, y compris dans certains métiers de la santé qui sont essentiels à la prise en charge des personnes dépendantes ou handicapées et de la petite enfance, ceci étant à mettre en relation avec le défi du cinquième risque pour la dépendance et le défi du droit à la garde d'enfant ».
(1) Valoriser l'acquis de l'expérience : une évaluation du dispositif de VAE - Septembre 2008 - Disp. sur