La loi du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable (DALO) pose, dans son article premier, le principe de la garantie par l'Etat du droit à un logement décent et indépendant (1). Autrement dit, elle consacre le droit pour les personnes mal logées de pouvoir se tourner vers l'Etat pour obtenir un logement. Elle en conditionne toutefois le bénéfice au fait, d'une part, de ne pas être en mesure d'accéder par ses propres moyens à un logement décent et indépendant ou de s'y maintenir et, d'autre part, de résider sur le territoire français non seulement de façon régulière mais aussi dans des conditions de permanence qu'il restait à définir par décret. Le texte vient d'être publié.
Ainsi, pour remplir les conditions de permanence de la résidence en France prévues par la loi, les citoyens de l'Union européenne, les ressortissants d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen (2) ou de la Confédération suisse doivent remplir les conditions exigées pour bénéficier d'un droit de séjour en France pour une durée supérieure à trois mois sur le fondement de l'article L. 121-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (Ceseda) (3).
Les ressortissants de pays tiers doivent, quant à eux, soit être titulaires d'une carte de résident ou de tout autre titre de séjour prévu par les traités ou accord internationaux et conférant des droits équivalents à ceux de la carte de résident, soit justifier d'au moins deux années de résidence ininterrompue en France sous couvert de l'un ou l'autre des titres de séjour suivants, renouvelé au moins deux fois :
une carte de séjour temporaire portant la mention « scientifique » ;
une carte de séjour temporaire portant la mention « profession artistique et culturelle » ;
une carte de séjour temporaire autorisant l'exercice d'une activité professionnelle délivrée en application de l'article L. 313-10 du Ceseda, à l'exception des cartes portant les mentions « travailleur saisonnier », « travailleur temporaire » ou « salarié en mission » ;
une carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale », à l'exception de celle délivrée à un étranger du fait que son conjoint ou l'un de ses parents est titulaire de la carte de séjour « compétences et talents » ou de la carte de séjour temporaire portant la mention « salarié en mission » ;
un titre de séjour prévu par les traités ou accords internationaux et conférant des droits équivalents à ceux des titres précités et notamment celui d'exercer de façon pérenne une activité professionnelle en France.
Rappelons que, ayant pris connaissance du projet de décret, France terre d'asile avait, en mars dernier, attiré l'attention du comité de suivi de la loi DALO sur plusieurs questionnements relatifs à l'application de ce texte pour les réfugiés statutaires et les bénéficiaires de la protection subsidiaire (4). L'association s'interrogeait notamment sur la situation particulière des étrangers reconnus comme réfugiés et mis en possession d'un récépissé de demande de titre de séjour valant autorisation de séjour d'une durée de validité de trois mois, récépissé dont disposent les réfugiés dans l'attente de leur carte de résident de dix ans. Les titulaires de ce document remplissent-ils les conditions de permanence de la résidence sans délai de séjour préalable ? Dans un courrier adressé au président du comité de suivi, Xavier Emmanuelli, le secrétaire général du ministère de l'Immigration, Patrick Stéfanini, avait indiqué que le décret répondrait par l'affirmative à cette interrogation. Mais cela ne ressort pas du texte paru au Journal officiel, qui ne prévoit pas expressément l'assimilation des titulaires de ce récepissé aux titulaires de la carte de résident délivrée au titre de réfugié. Signalons toutefois que, dans une réponse ministérielle datée du 29 juillet (5), Brice Hortefeux a promis que « toutes instructions utiles seront données pour que les titulaires de ce récépissé aient accès au droit au logement opposable dans les mêmes conditions que les titulaires de la carte de résident ».
A noter : s'agissant des bénéficiaires de la protection subsidiaire et munis, à ce titre et de plein droit, de la carte de séjour temporaire « vie privée et familiale », ils bénéficient, comme les autres titulaires de ce titre de séjour et comme l'indique le décret, du droit au logement opposable sous réserve de justifier d'au moins deux années de résidence ininterrompue en France sous couvert de la carte de séjour temporaire renouvelée au moins deux fois. Répondant au grief exposé par France terre d'asile contre cette disposition, le ministre de l'Immigration a indiqué dans sa réponse ministérielle que, à ses yeux, elle respecte la directive européenne du 29 avril 2004 aux termes de laquelle « les Etats membres veillent à ce que les bénéficiaires [...] du statut conféré par la protection subsidiaire aient accès à un logement dans des conditions équivalentes à celles dont bénéficient les ressortissants d'autres pays tiers résidant légalement sur leur territoire ».
(2) Font partie de l'Espace économique européen tous les pays de l'Union européenne, plus l'Islande, le Liechtenstein et la Norvège.
(3) Autrement dit, il ne peut s'agir que de ressortissants remplissant l'une des conditions suivantes : exercer une activité professionnelle en France ; disposer pour eux et les membres de leur famille de ressources suffisantes afin de ne pas devenir une charge pour le système d'assistance sociale, ainsi que d'une assurance maladie ; être inscrits dans un établissement pour y suivre à titre principal des études ou, dans ce cadre, une formation professionnelle, et garantir disposer d'une assurance maladie ainsi que de ressources suffisantes pour eux et les membres de leur famille afin de ne pas devenir une charge pour le système d'assistance sociale ; ou, enfin, être membres de la famille du bénéficiaire d'un droit au séjour.
(5) Rép. min. Le Bouillonnec n° 22372, J.O.A.N. (Q.) n° 31 du 29-07-08, page 6569.