Rattaché à la direction des affaires sociales de la Commission européenne, le réseau comprend de un à quatre experts non gouvernementaux pour chacun des 27 Etats membres, plus l'ex-République yougoslave de Macédoine, la Croatie et la Turquie. En accord avec la Commission européenne, il étudie chaque année trois grands thèmes, qui correspondent à l'agenda social européen. Les rapports nationaux - dont certains restent confidentiels par souci de préserver le travail indépendant des experts et d'autres sont rendus publics - sont mis en perspective dans un rapport de synthèse formulant des suggestions. Le réseau des experts indépendants est l'un des outils de la méthode ouverte de coordination (MOC) instituée lors du Conseil européen de Lisbonne de mars 2000, selon laquelle les Etats membres s'accordent à améliorer leurs politiques dans les domaines de la protection sociale et de l'inclusion sociale, sur la base de rapports, de « benchmarking » (études comparatives) et d'apprentissages mutuels. Cette méthode n'impose pas de contrainte juridique - on la qualifie de « soft law » -, mais si l'ensemble des pays accepte de s'évaluer et de se comparer sur la base d'indicateurs sociaux communs, il est difficile de s'y soustraire !
Dans un premier rapport à paraître courant juillet, nous nous penchons sur la façon dont l'Union européenne peut renforcer la coopération dans les domaines de la protection sociale et de l'inclusion sociale, et plus particulièrement de la lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale. Le rapport propose 12 domaines d'action, répartis en cinq grands thèmes. Il s'agit d'accroître le statut et l'importance politique de la MOC, d'augmenter la notoriété du processus au niveau de l'Union et dans les Etats membres. Nous préconisons également de faire en sorte que la MOC soit plus rigoureuse, plus comparative et relève davantage de défis. Tout l'enjeu est en effet de mesurer, à l'aune d'indicateurs communs, des politiques menées dans des contextes économiques, politiques et sociaux différents. Nous suggérons par ailleurs de renforcer la gouvernance dans le domaine social et d'intensifier les échanges d'apprentissages et de bonnes pratiques. L'objectif est, à 27, d'aller plus loin que la somme des 27 ! Les trois ou quatre pays les plus concernés par la question des Roms, par exemple, pourraient réunir pendant un ou deux jours experts, acteurs gouvernementaux et non gouvernementaux pour faire avancer leurs réflexions. En matière de réduction de la pauvreté, les travaux peuvent porter sur la façon de définir une cible, d'identifier les politiques publiques pouvant permettre d'atteindre les objectifs fixés, d'évaluer leur coût et leur impact avant de les mettre en oeuvre.
La Commission européenne a choisi de faire de 2007 - année sans PNAI (plan national d'action pour l'inclusion) - une année de réflexion thématique. Dans ce cadre, le thème de la pauvreté et du bien-être des enfants a été identifié comme une priorité. Une « task force » a été créée pour explorer la question, à laquelle la France a largement contribué. Grâce à un « benchmarking » encore jamais réalisé, nous avons pu établir des constats sur les pays qui s'en sortent le mieux en la matière. C'est l'un des grands enjeux de la MOC : aider les Etats à mener une approche générale de la pauvreté tout en réalisant un saut qualitatif sur des objectifs particuliers.
Chaque Etat devrait remettre son prochain PNAI dans la seconde quinzaine de septembre. Le deuxième rapport 2008 du réseau, qui sera rendu en octobre, analysera ces programmes. Le 15 octobre, les Etats membres devront par ailleurs remettre leurs plans de réformes nationales sur l'emploi et la croissance, encore appelés « plans Lisbonne ». Notre troisième rapport 2008, prévu pour novembre, analysera ces plans sous l'angle de l'inclusion : en quoi cette dernière a-t-elle été prise en compte dans les politiques de croissance et de l'emploi ?
L'un des enjeux de la présidence française est de progresser sur l'inclusion active en adoptant une approche « holistique » de la question (revenus, accès aux services...). Un autre sera de faire progresser la question des objectifs quantitatifs. Si, à partir de ses objectifs fixés sur la base d'une analyse approfondie de leur bien-fondé, chaque Etat s'engageait publiquement, via son PNAI, et acceptait un suivi régulier de la Commission sur la manière dont il progresse, un grand pas serait franchi.
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