Constatant l'inefficacité des procédures mises en place en cas de refus de soins aux bénéficiaires de la couverture maladie universelle complémentaire (CMU-C), la caisse nationale de l'assurance maladie (CNAM) présente dans une circulaire les nouvelles modalités de prise en charge des réclamations et plaintes formulées par les patients concernés ou les professionnels de santé. Ce texte annule et remplace immédiatement les dispositions de la circulaire n° 61/2005 du 13 juin 2005.
Le refus de soins est constitué dès lors qu'un professionnel de santé refuse d'accepter certaines personnes du seul fait qu'elles sont bénéficiaires de la CMU-C. Toutefois, indique la CNAM, d'autres situations de conflits peuvent aussi être portées à la connaissance des caisses primaires d'assurance maladie (CPAM), comme la fixation tardive, inhabituelle et abusive d'un rendez-vous, l'orientation répétée et abusive vers un autre confrère, un centre de santé ou une consultation externe d'un hôpital sans raison médicale énoncée... Chacune de ces situations nécessitera un examen au cas par cas au travers d'un faisceau d'indices concordants et le déclenchement d'investigations complémentaires. Toutes les réclamations, qu'elles soient écrites ou orales, doivent être prises en compte. Cependant, insiste la caisse, « pour permettre le dépôt d'une plainte, les faits reprochés devront, dans le courant de la procédure, être consignés par écrit par le plaignant ».
Il convient aussi, explique la CNAM, de tenir compte des réclamations portées par les professionnels ou les établissements de santé. Pour la caisse, sont des griefs admissibles le retard injustifié aux rendez-vous, les rendez-vous manqués et non annulés, les traitements non suivis ou interrompus... En revanche, sont exclus le train de vie jugé incompatible avec les conditions de ressources applicables pour bénéficier de la CMU-C et, plus généralement, tous les faits portant atteinte au principe du secret médical. La CNAM demande aussi à son réseau d'accorder une attention particulière aux réclamations concernant le remboursement au médecin des soins pratiqués avec dispense d'avance des frais.
Peuvent porter plainte ou signaler un refus de soins le bénéficiaire de la CMU-C, mais aussi les associations - notamment celles engagées dans l'accès aux soins -, qui ont une faculté d'alerte des CPAM. Dans ce dernier cas, « une confirmation écrite sera ensuite sollicitée auprès du bénéficiaire concerné », souligne la circulaire. Par ailleurs, toutes les catégories de professionnels de santé - dont les obligations sont rappelées dans la circulaire - peuvent être visées, que ceux-ci exercent en médecine de ville, en établissements de santé ou dans un centre de santé. Si le refus de soins est avéré, le professionnel de santé mis en cause peut faire l'objet d'une contravention de cinquième classe. En outre, le directeur de la CPAM, ainsi que le bénéficiaire de la CMU-C, peuvent déposer plainte auprès du conseil départemental de l'ordre compétent en vue de la saisine de la chambre disciplinaire du Conseil régional de l'Ordre.
Compte tenu des difficultés pour évaluer le bien-fondé des réclamations, leur traitement est confié aux conciliateurs des CPAM (1), destinataires de tous les signalements de refus de soins recueillis par écrit ou par téléphone.
A réception d'une plainte, le conciliateur doit, si nécessaire et en liaison avec le service médical de la caisse, fournir à l'assuré une aide dans l'accès à ses soins. Par la suite, il doit rechercher les éléments disponibles sur le suivi des professionnels de santé concernés et recueillir la version des faits des deux parties dans le respect des principes de la médiation institutionnelle : neutralité, impartialité et indépendance. Les deux parties doivent être informées des suites susceptibles d'être données à la procédure. Le conciliateur doit donc prendre contact « sans tarder », souligne la CNAM, par téléphone ou en direct avec la partie qui fait l'objet de la réclamation. Au final, il rédigera un rapport de conciliation prenant acte de la situation telle qu'énoncée par les parties et faisant état des suites qu'il entend y donner. Plusieurs situations peuvent en effet se présenter (1), la première étant celle où le bénéficiaire de la CMU-C reconnaît la situation décrite par le professionnel de santé. La réclamation s'avérant alors injustifiée, le conciliateur fait part à ce dernier de l'abandon de la plainte. Son rapport, diffusé aux deux parties, clôt l'affaire. Lorsque c'est le professionnel de santé qui reconnaît les faits tels que présentés par l'assuré, le conciliateur prend acte de l'infraction et des explications fournies par celui-ci et informe le directeur de la CPAM des suites qu'il souhaite réserver à l'affaire. Autre hypothèse : les parties persistent dans une version différente. Le conciliateur note cette divergence et leur fait part de son avis, ainsi que de celui du service médical de la CPAM s'il a été demandé. Enfin, le professionnel de santé peut nier les faits mais proposer malgré tout de recevoir l'assuré. Dans ces trois derniers cas, le conciliateur doit envisager - selon la procédure décrite dans la circulaire - la saisine soit du service médical de la CPAM dès lors que le praticien se justifie par des éléments d'ordre médical, soit du service en charge des relations avec les professionnels de santé au niveau local si les justifications apportées sont d'ordre organisationnel ou matériel.
Lorsque la plainte portée par un professionnel de santé est liée à des difficultés relationnelles avec un usager, le conciliateur doit effectuer par écrit un rappel à l'ordre en direction de l'assuré, s'assurer qu'il est en situation de retrouver un autre praticien et demander l'intervention du service social de la CPAM pour un suivi plus global. S'il s'agit d'un problème lié à la gestion du dossier du patient, le conciliateur doit saisir le service compétent au niveau local et assurer un suivi de la réponse « afin que la réclamation soit traitée le plus rapidement possible et ce, pour éviter que le professionnel ne soit dissuadé d'accueillir des populations en difficulté ».
Enfin, le conciliateur doit rappeler à l'assuré qu'il peut également saisir la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité, la direction départementale de la concurrence et des prix ou encore le conseil départemental de l'ordre professionnel.
(2) Un mémoire de ces situations est conservé en cas de nouvelle plainte.