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Modernisation du marché du travail : la première étape vers la « flexi-sécurité » à la française est validée par le Parlement

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Abrogation du contrat « nouvelles embauches », rupture conventionnelle du contrat de travail, information des institutions représentatives du personnel sur le recours aux contrats précaires... Le Parlement a définitivement adopté, le 12 juin, le projet de loi « portant modernisation du marché du travail », qui marque une étape vers la « flexi-sécurité » et transcrit partiellement dans le code du travail un accord signé début 2008 par quatre des cinq confédérations syndicales « représentatives » (1). Peu de modifications ont été apportées par les élus au texte originel, qui lui-même transposait fidèlement les termes de cet accord, en procédant toutefois à quelques ajustements.

Sécuriser la situation des salariés

Plusieurs dispositions de la loi visent à sécuriser la situation des salariés. Par exemple, il est précisé que le contrat de travail à durée indéterminée (CDI) est la forme « normale et générale » de la relation de travail. Parallèlement, il est prévu que l'employeur doit informer le comité d'entreprise (CE), annuellement dans les entreprises de moins de 300 salariés et trimestriellement dans celles en comptant au moins 300, des éléments qui l'ont conduit à faire appel, au titre de l'année ou de la période écoulée, et qui pourraient le conduire à faire appel pour l'année ou la période à venir, à des contrats de travail à durée déterminée (CDD) et à des contrats de mission conclus avec une entreprise de travail temporaire. En l'absence de CE, les délégués du personnel sont destinataires de ces informations, une fois par an.

La loi transpose par ailleurs, à quelques variantes près, les dispositions de l'accord des partenaires sociaux sur la période d'essai, dont l'objet est à présent clairement précisé dans le code du travail : elle « permet à l'employeur d'évaluer les compétences du salarié dans son travail, notamment au regard de son expérience, et au salarié d'apprécier si les fonctions occupées lui conviennent ». Le code du travail dispose aussi dorénavant que sa durée maximale ne peut excéder : deux mois pour les ouvriers et employés ; trois mois pour les agents de maîtrise et les techniciens ; quatre mois pour les cadres. La période d'essai peut être renouvelée une seule fois à la condition qu'un accord de branche étendu le prévoie. Renouvellement compris, elle ne peut dépasser : quatre mois pour les ouvriers et employés ; six mois pour les agents de maîtrise et techniciens ; huit mois pour les cadres. Les durées légales des périodes d'essai ainsi définies ont « un caractère impératif », à l'exception : des durées plus longues fixées par les accords de branche conclus avant la date de publication de la loi ; des durées plus courtes fixées par des accords collectifs conclus après sa date de publication ; des durées plus courtes fixées dans la lettre d'engagement ou le contrat de travail. Une disposition transitoire est toutefois prévue : les stipulations des accords de branche conclus avant la publication de loi et fixant des durées d'essai plus courtes restent en vigueur jusqu'au 30 juin 2009. Autre nouveauté : la période d'essai et la possibilité de la renouveler « ne se présument pas » : elles doivent être expressément stipulées dans la lettre d'engagement ou le contrat de travail.

Dorénavant, par ailleurs, lorsque le salarié est embauché dans l'entreprise à l'issue d'un stage intégré à un cursus pédagogique réalisé lors de la dernière année d'études, la durée de ce stage est déduite de la période d'essai. Cette déduction ne peut toutefois avoir pour effet de réduire cette dernière de plus de la moitié, sauf accord collectif prévoyant des stipulations plus favorables.

En outre, la loi prévoit, en cas de rupture de l'essai par l'employeur, un délai de prévenance dont la durée varie en fonction de la durée de l'essai accomplie : 24 heures en deçà de huit jours de présence ; 48 heures entre huit jours et un mois ; deux semaines après un mois ; un mois après trois mois de présence. Ce délai de prévenance vaut également pour les CDD stipulant une période d'essai d'au moins une semaine. La période d'essai, renouvellement inclus, ne peut être prolongée du fait de la durée du délai de prévenance, est-il précisé. De son côté, le salarié qui rompt la période d'essai doit respecter un délai de prévenance de 48 heures (ramené à 24 heures si sa durée de présence dans l'entreprise est inférieure à huit jours).

A retenir également : la condition d'ancienneté de trois ans pour bénéficier de l'indemnisation conventionnelle de la maladie est ramenée à un an.

Encadrer les ruptures de contrat de travail

Plusieurs évolutions doivent contribuer à la réalisation de cet objectif. Par exemple, en même temps que la loi nettoie le code du travail de toute allusion au contrat « nouvelles embauches », elle requalifie en CDI de droit commun tous ceux en cours à la date de sa publication. Et dispose que tout licenciement, pour motif personnel comme pour motif économique, doit être « motivé ».

L'ancienneté requise pour ouvrir droit à l'indemnité légale de licenciement est par ailleurs ramenée de deux à un an. Et la disposition du code du travail stipulant que « le taux de cette indemnité est différent suivant que le motif du licenciement est économique ou personnel » est supprimée, un décret devant uniformiser l'indemnité légale de licenciement.

La loi prévoit aussi que le reçu pour solde de tout compte peut être dénoncé dans les six mois qui suivent sa signature, « délai au-delà duquel il devient libératoire pour l'employeur pour les sommes qui y sont mentionnées ».

A noter enfin : la mise en place d'un fonds de mutualisation géré par l'AGS (Association pour la gestion du régime d'assurance des créances des salariés), afin de permettre aux employeurs de supporter collectivement la charge financière des indemnités de licenciement pour cause d'inaptitude consécutive à une maladie ou à un accident non professionnel.

Privilégier les ruptures négociées du contrat de travail

Le texte consacre et encadre la « rupture conventionnelle » du contrat de travail plébiscitée par les partenaires sociaux. L'idée est ici de permettre à l'employeur et à son salarié de convenir en commun des conditions de la rupture du contrat qui les lie. Ils conviennent du principe lors d'un ou de plusieurs entretiens au cours desquels le salarié peut se faire assister.

Ce mode de rupture (2), exclusif du licenciement ou de la démission, ne peut être imposé par l'une ou l'autre des parties, et résulte d'une convention qu'elles signent, dont les modalités d'établissement et le contenu sont strictement encadrés par la loi, de manière à « garantir la liberté de consentement des parties ». La convention définit donc les conditions de la rupture, notamment le montant de l'indemnité spécifique de rupture conventionnelle qui ne peut pas être inférieur à celui de l'indemnité légale de licenciement. Cette indemnité spécifique n'est pas imposable au titre de l'impôt sur le revenu, dans la limite d'un plafond (3). Elle est aussi exonérée de cotisations sociales sur la part exonérée d'impôt.

La convention fixe également la date de rupture du contrat de travail, qui ne peut intervenir avant le lendemain du jour de son homologation (voir ci-après). A compter de la date de sa signature par les deux parties, chacune d'entre elles dispose d'un délai de 15 jours calendaires pour exercer son droit de rétractation, sous la forme d'une lettre adressée par tout moyen attestant de sa date de réception par l'autre partie. A l'issue du délai de rétractation, la partie la plus « diligente » adresse une demande d'homologation à l'autorité administrative, avec un exemplaire de la convention de rupture. L'autorité administrative dispose d'un délai d'instruction de 15 jours ouvrables pour s'assurer du respect des conditions légales et de la liberté de consentement des parties. A défaut de notification dans ce délai, l'homologation est réputée acquise et l'autorité administrative est dessaisie. En tout état de cause, la validité de la convention est subordonnée à son homologation. Une fois homologuée, la rupture conventionnelle ouvre droit pour le salarié au bénéfice des allocations d'assurance chômage dans les conditions de droit commun.

Tout litige, qu'il soit relatif à la convention, à son homologation ou au refus de celle-ci, relève de la compétence du conseil de prud'hommes, « à l'exclusion de tout autre recours contentieux ou administratif ». Le recours juridictionnel doit être formé, à peine d'irrecevabilité, avant l'expiration d'un délai de 12 mois à compter de la date d'homologation de la convention.

(Loi à paraître)
Notes

(1) Voir ASH n° 2541 du 18-01-08, p. 13.

(2) Pas applicable aux ruptures de contrats de travail résultant des accords collectifs de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences et des plans de sauvegarde de l'emploi.

(3) L'exonération s'applique à la fraction des indemnités qui n'excède pas le plus favorable des deux plafonds suivants : soit deux fois le montant de la rémunération annuelle brute perçue par le salarié au cours de l'année civile précédant la rupture de son contrat de travail, ou 50 % du montant de l'indemnité si ce seuil est supérieur, dans la limite de six fois le plafond annuel de la sécurité sociale (soit 199 656 € pour 2008) ; soit le montant de l'indemnité de licenciement prévue par la convention collective de branche, par l'accord professionnel ou interprofessionnel ou, à défaut, par la loi.

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