Il faut être vigilant. La priorité donnée à l'inser-tion professionnelle ne doit pas aboutir à ce que l'insertion sociale soit uniquement conçue comme préparant celle-ci. Il est inacceptable que des publics ayant retrouvé une activité continuent à être mal logés ou aient toujours des difficultés d'accès aux soins. L'insertion professionnelle ne doit pas être déconnectée des réalités du quotidien de la personne et de sa famille. Par ailleurs, l'accent mis sur le retour à l'emploi peut accentuer la tendance au basculement du droit à l'insertion vers un « devoir d'insertion » : on risque de renvoyer les personnes à leur seule responsabilité et de stigmatiser leur « incapacité » alors qu'elles ne sont pas toujours en mesure de s'engager dans des processus pensés pour elles, mais sans elles. L'insertion ne peut se concevoir que dans des parcours et des partenariats individualisés avec la reconnaissance des préoccupations de chacun. Il est d'ailleurs absolument nécessaire de reconnaître le droit au tâtonnement et à la rechute dans les trajectoires de vie. Ce qui suppose qu'on n'évalue pas une politique d'insertion à la seule aune de quelques indicateurs chiffrés !
C'est un risque en effet. Cette volonté de favoriser le décloisonnement et la coordination des intervenants et de simplifier les dispositifs est une constante des politiques publiques récentes. On l'a bien vu avec les deux lois du 5 mars 2007 relatives à la protection de l'enfance et à la prévention de la délinquance avec, dans un cas, la création d'une cellule de recueil et de traitement des informations préoccupantes et, dans l'autre, la nomination par le maire d'un coordonnateur. S'il faut mettre fin aux effets désastreux de la juxtaposition de dispositifs d'insertion gérés par des professionnels qui s'ignorent et éviter que l'usager ne doive répéter sans arrêt son histoire personnelle, cette transversalité ne doit pas porter atteinte à sa vie privée et à son intimité. Il faut s'assurer que cette histoire ne soit pas exposée en étant propagée dans des circuits où elle n'a rien à faire. Or instaurer un référent unique ouvre la possibilité à une seule personne de recouper des informations détenues auparavant par différents interlocuteurs, qui ne les communiquaient pas forcément. Il faudra donc que celui-ci - en l'occurrence le service public de l'emploi - agisse dans le cadre de règles éthiques et déontologiques préalablement définies.
Il n'a pas été oublié dans son déroulement : beaucoup de travailleurs sociaux y ont participé à des titres divers. Mais il est exact que le rapport général du « Grenelle » en parle très peu. Les rares passages où il est question des formations sociales concernent des modules et des rencontres qui seraient utiles « pour former les travailleurs sociaux à une meilleure connaissance du monde de l'entreprise ». On est loin de l'idée que les employeurs auraient aussi besoin de mieux connaître le rôle des professionnels dans l'appui à l'insertion ! Or,s'il est tout à fait essentiel de ne pas dissocier insertion sociale et insertion professionnelle, cela implique une approche beaucoup plus large des formations sociales. L'accompagnement des personnes en difficulté d'insertion requiert des compétences spécifiques et des professionnels formés. A cet égard, il est préoccupant de constater que bon nombre d'associations confient ce suivi à des personnes elles-mêmes en difficulté, sans formation, ni qualification adaptée, et qui trouvent vite leurs limites.
Pour le moment, il n'y a pas eu de demande précise à ce sujet ni d'un côté, ni de l'autre. Mais il paraîtrait logique que le CSTS soit sollicité pour y participer après l'avoir été pour les travaux en amont.
(2) Le CSTS a adopté le 3 juin dernier en assemblée plénière sa contribution au « Grenelle de l'insertion », validée en bureau le 15 février.