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Des recommandations pour une meilleure prise en charge des mineurs exposés à des violences conjugales

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Le plan 2008-2010 visant à lutter contre les violences faites aux femmes (1) a prévu de protéger les enfants qui sont aussi les victimes de ces situations. A la demande de la secrétaire d'Etat à la solidarité, l'Observatoire national de l'enfance en danger (ONED) et le Service du droit des femmes et de l'égalité (SDFE) ont rédigé des recommandations en ce sens pour les professionnels concernés et les pouvoirs publics qui, jusqu'à présent, n'avaient pas traité spécifiquement cette problématique « du fait notamment d'un cloisonnement des approches (les temporalités et les modalités de prévention et de prise en charge sont par exemple distinctes s'agissant des politiques menées en matière de protection de l'enfance et de lutte contre les violences au sein du couple) et d'une méconnaissance du phénomène ». Ce « premier travail [...] sera poursuivi et approfondi », indiquent les deux partenaires, qui le diffusent aujourd'hui à l'ensemble des acteurs concernés (2).

« Sensibiliser, former et mettre en réseau l'ensemble des intervenants »

L'ONED et le SDFE soulignent en premier lieu la nécessité de travailler en réseau « pour que les systèmes d'aides destinés aux enfants et aux femmes soient plus cohérents et convergents, l'objectif étant la construction de réponses globales et adaptées ». « Il est néanmoins nécessaire, précisent-ils, d'encourager, par des actions de sensibilisation et de formation, l'émergence de références professionnelles partagées, dans le respect de la différence de chacun. » Dans ce cadre, il convient de « sensibiliser les acteurs sociaux en contact avec l'enfant au fait que l'exposition aux violences dans le couple peut constituer un facteur de danger pour l'enfant ». Mais aussi d'« organiser des actions de formation multi-partenariales consacrées, d'une part, à la connaissance des effets sur les enfants de l'exposition aux violences dans le couple et, d'autre part, aux caractéristiques distinguant les situations de violences conjugales de celles de conflits conjugaux ». Par ailleurs, les partenaires préconisent la réalisation de protocoles pour une mise en réseau de l'ensemble des professionnels concernés, en particulier ceux des champs de la lutte contre les violences conjugales, de la protection de l'enfance et de la périnatalité. Les professionnels intervenant dans ce dernier domaine doivent d'autant plus être sollicités qu'ils ont un rôle à jouer dans le dépistage des situations de violences conjugales. Par exemple, suggèrent l'ONED et le SDFE, « il serait souhaitable que l'entretien prévu au quatrième mois de grossesse puisse être un moment clé pour repérer les situations à risque et informer la future mère de ses droits et des possibilités d'accompagnement dont elle peut bénéficier ».

« Repérer et alerter »

Le document aborde aussi la question du repérage des situations de violences conjugales le plus en amont possible et de l'alerte à effectuer. Il recommande ainsi la présence de psychologues et/ou de travailleurs sociaux dans les services de police et de gendarmerie : il s'agit pour eux non seulement d'offrir à la victime un accompagnement adéquat dans ses démarches juridiques mais aussi de s'informer sur la présence éventuelle de mineurs au domicile. Si tel est le cas, ils doivent informer la victime du fait qu'elle peut bénéficier d'un soutien dans la prise en charge de ses enfants, « l'enjeu [étant] en effet d'éviter une nouvelle réticence à déposer plainte par crainte d'une mesure de protection de l'enfance envers les enfants ». Lorsque aucun de ces professionnels n'est présent dans les commissariats et les unités de gendarmerie, ces derniers doivent se rapprocher des services sociaux et leur adresser la victime.

Par ailleurs, les connaissances acquises sur les situations de violences conjugales, tant scientifiques qu'issues de la pratique, permettent d'identifier le moment de la rupture avec le conjoint violent comme une phase spécialement à risque pour les femmes, explique le document. Certaines d'entre elles peuvent préférer, plutôt que de voir engager une procédure d'éviction du conjoint violent du domicile conjugal, se mettre à l'abri avec leurs enfants. Dans ce cas, souligne l'ONED et le SDFE, « il serait judicieux que, lorsque les femmes ont pu nouer des contacts avec les acteurs de terrain (qu'il soient spécialisés dans la lutte contre les violences faites aux femmes ou en protection de l'enfance), ceux-ci puissent accompagner la victime et anticiper suffisamment le départ pour y préparer les enfants et ainsi éviter un traumatisme supplémentaire ».

En outre, il convient d'informer l'ensemble des acteurs des réseaux de lutte contre les violences faites aux femmes et de protection de l'enfance des droits et devoirs des parents dans le cadre de l'autorité parentale. Ainsi, les deux partenaires leur rappellent que, s'agissant des poursuites au titre du délit de non-représentation d'enfants - lequel s'applique même si aucune décision de justice n'a encore statué sur l'autorité parentale -, la démonstration des éléments matériels et surtout intentionnels est nécessaire pour constituer l'infraction. Qu'ainsi, « la fuite liée à des conditions de survie physique ne saurait suffire à la caractériser, caractérisation qui suppose de faire la démonstration de l'existence d'un véritable refus faisant suite à une demande de visite ». Il en est de même pour le délit de défaut de notification de changement d'adresse après un transfert de domicile avec les enfants : si l'intention de faire échec aux droits de l'autre parent n'est pas démontrée, le simple fait matériel ne suffit pas. Toutefois, suggèrent les deux instances, « par principe de précaution », il faudra « recommander l'assistance systématique d'un avocat en cas de présence d'enfants dans une séparation problématique, ce qui permet de pouvoir domicilier l'adresse de la mère au cabinet de l'avocat dès l'introduction de la procédure devant le juge aux affaires familiales [JAF] et pendant toute sa durée ».

Quoi qu'il en soit, la prise en charge éventuelle de l'enfant doit « être adaptée à la gravité de la situation et [à] son impact sur l'enfant », mais aussi prendre en compte son environnement familial. C'est pourquoi, « les parents devraient faire l'objet d'une évaluation de leurs capacités à répondre aux besoins de l'enfant et à le protéger », estiment l'ONED et le SDFE.

Des recommandations pour les services judiciaires

Enfin, les deux partenaires adressent des recommandations spécifiques aux services judiciaires « afin d'éviter que l'exercice conjoint de l'autorité parentale soit un facteur supplémentaire de mise en danger des femmes victimes de violences ou de l'enfant », pointant plus particulièrement le cloisonnement entre les poursuites engagées devant le juge pénal et le juge aux affaires familiales. Pour pallier cette situation, ils préconisent notamment la « présence systématique du parquet aux audiences d'affaires familiales » ou encore de « sensibiliser les magistrats (notamment les JAF) comme les avocats aux symptômes signalant des situations de violences conjugales et de les alerter sur les risques de recours à la médiation familiale, ainsi qu'aux droits de visite non sécurisés ou à la résidence alternée ». Ils demandent aussi que ces décisions fassent l'objet d'une évaluation préalable (enquête sociale, expertises...) et que toute mise en relation de l'enfant avec ses parents se fasse « dans des lieux de visites médiatisés, au travers du développement de «points-rencontres parents-enfants» ». Des lieux qui devraient en outre, selon eux, faire l'objet d'une labellisation pour garantir des conditions de sécurité suffisantes.

Notes

(1) Voir ASH n° 2532 du 23-11-07, p. 5.

(2) Document disponible sur www.oned.gouv.fr.

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