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Les recommandations du CES pour améliorer la mise en oeuvre de l'obligation alimentaire et mieux l'articuler avec l'aide sociale

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Dans un avis et un rapport adoptés le 14 mai, le Conseil économique et social (CES) s'est penché sur la question de l'obligation alimentaire - une règle inchangée depuis la rédaction du code civil en 1804 - et de son articulation avec l'aide sociale (1). Pour mémoire, l'obligation alimentaire est une obligation légale en vertu de laquelle une personne est tenue de fournir les moyens de subsistance à un parent ou à un allié lorsque celui-ci se trouve dans une situation de besoin. Elle est aujourd'hui souvent invoquée du fait du vieillissement de la population, couplé à un « renchérissement des coûts de fonctionnement des établissements sanitaires et sociaux et à la relative modestie des revenus de certaines catégories de retraités », explique l'instance. Par ailleurs, ajoute la rapporteure de l'avis, Christiane Basset (UNAF), « le contexte actuel est également celui d'une plus grande fragilité des couples, mariés ou non, et de la nécessité d'assurer l'entretien en commun des enfants après une séparation ». Bien que « simples dans leur énoncé et faciles à concevoir au plan théorique, l'obligation alimentaire et le principe de subsidiarité [- qui fait prévaloir la solidarité familiale sur l'aide fournie par la collectivité -] posent en revanche de nombreuses difficultés pratiques », souligne le CES, qui propose plusieurs pistes pour une mise en oeuvre de l'obligation alimentaire « plus prévisible mais aussi plus équitable pour les familles ».

« Améliorer la mise en oeuvre de la subsidiarité »

A l'heure actuelle, l'articulation entre aide sociale et obligation alimentaire est organisée au cas par cas. Aussi le CES préconise-t-il de « définir une législation cohérente, si possible uniforme, en matière de subsidiarité de l'aide sociale ». En particulier, poursuit-il, « le périmètre des obligés alimentaires et le mécanisme de calcul de l'obligation alimentaire ne devraient pas varier en fonction de chaque type de prestation. De la même façon, les modalités de calcul et de versement de l'aide sociale devraient faire l'objet d'une réglementation de base commune à l'ensemble des prestations. » Plus particulièrement, la liste des personnes estimées dispensées de l'obligation alimentaire est aujourd'hui définie par une circulaire, pouvant laisser place à des traitements différents d'un département à un autre, constate l'instance. Elle propose que cette liste soit fixée par décret afin d'« uniformiser les conditions de dispense en définissant des critères pour statuer sur sa mise en oeuvre ». Autre suggestion : « clarifier [par décret] et uniformiser la liste des ressources à prendre en considération pour ouvrir droit aux prestations d'aide sociale », car une grande diversité existe dans les règles propres à chaque type de prestation et dans la pratique des organismes débiteurs de l'aide sociale. Dans ce cadre, il convient, selon le CES, d'encourager le versement spontané des pensions alimentaires et, pour cela, de « ne pas inclure ces versements dans la base pour le calcul des ressources pour l'accès à l'aide sociale ». L'instance estime aussi nécessaire de s'interroger, pour ces pensions, sur l'évolution des plafonds de déductibilité fiscale et de réduction d'impôt sur le revenu de la personne qui les verse « afin d'inciter à la solidarité familiale ».

Par ailleurs, le CES estime qu'inclure les frais d'hébergement des personnes âgées en établissement dans le périmètre de l'obligation alimentaire est susceptible de faire peser sur les familles des charges trop lourdes au détriment de certaines dépenses importantes, comme l'éducation des enfants. Aussi suggère-t-il de mandater un groupe d'experts afin de mener une réflexion pour déterminer ce qui correspond à la notion d'obligation alimentaire dans la totalité des frais d'hébergement.

« Réformer l'articulation entre aide sociale et obligation alimentaire »

Afin d'instaurer plus de cohérence entre l'aide sociale et l'obligation alimentaire, le CES recommande de « ne plus soumettre le versement de l'aide sociale à l'hébergement à une évaluation collective des ressources des débiteurs d'aliments ». Et propose de mettre en place une procédure de conciliation entre les obligés alimentaires et le département pour éviter le recours au juge aux affaires familiales en cas d'accord des parties sur le montant des obligations alimentaires dues par chacun d'eux. Si la conciliation échoue, le département saisira alors le juge pour le déterminer.

En outre, l'instance considère que l'obligation faite aux personnes isolées ayant la garde d'un ou de plusieurs enfants d'engager une procédure devant le juge aux affaires familiales à l'égard du parent débiteur pour obtenir le versement de l'allocation de parent isolé (API) (2) est un « facteur d'aggravation des conflits entre les parents et augmente le recours au juge ». Aussi propose-t-elle d'autoriser les caisses d'allocations familiales à verser l'API aux personnes concernées et à se retourner ensuite, devant le juge, contre le parent n'ayant pas la garde des enfants pour déterminer le montant de la pension alimentaire dans la limite des dépenses exposées au titre de l'API.

Propositions complémentaires

Afin d'améliorer la pratique des juges aux affaires familiales, le CES souhaite que le principe de la détermination de la pension alimentaire en fonction d'un barème indicatif soit consacré par une loi. Un outil qui pourrait prendre en compte les revenus moyens mensuels cumulés de chacun des parents (salaires, rentes, revenus de placements, prestations sociales à l'exception des allocations différentielles) et de leurs charges. Objectifs : harmoniser le montant des obligations alimentaires fixées et donc réduire les disparités territoriales ; aider les juges dans leur décision ; estimer le montant prévisible de l'obligation alimentaire et favoriser les accords amiables...

Autre suggestion : instaurer une procédure collective devant le juge aux affaires familiales dans le cadre de la prise en charge des frais d'hébergement des personnes âgées pour faire en sorte que le juge soit tenu de rechercher l'ensemble des débiteurs potentiels. Actuellement, explique le CES, « seule la personne à laquelle le demandeur d'aliments réclame en justice une pension se voit obligée de payer, à charge pour elle, si elle le souhaite, de se retourner contre les autres obligés alimentaires pour réclamer un remboursement d'une partie de la dette alimentaire ».

Enfin, au-delà d'une information plus large des justiciables en matière d'obligation alimentaire, le CES préconise l'instauration d'une médiation familiale judiciaire dans les cas de contentieux entre un enfant majeur et ses parents. Plus généralement, il convient aussi, selon lui, de renforcer les moyens dévolus à la médiation familiale judiciaire ou spontanée, ainsi que l'aide financière aux familles qui ne peuvent y avoir recours faute de moyens.

Notes

(1) L'obligation alimentaire : des formes de solidarité à réinventer ? - Disponible sur www.conseil-economique-et-social.fr.

(2) Sur le principe de subsidiarité de l'API, voir ASH n° 2553 du 11-04-08, p. 9.

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