Le 24 avril, le cabinet du Haut Commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté a présenté au Conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale (CNLE) un tableau de bord composé d'indicateurs (1) devant permettre de mesurer l'atteinte de l'objectif de baisse d'un tiers de la pauvreté en cinq ans assigné en juillet dernier par le président de la République à Martin Hirsch (2).
Cet objectif doit ainsi être suivi au travers d'un indicateur central - le taux de pauvreté ancré dans le temps - dit « indicateur de pauvreté semi-absolu ». En début de période, le seuil de pauvreté est fixé à 60 % du revenu médian (soit pour 2005, la dernière année connue, 817 € mensuels) et, au cours des cinq années qui suivent, il doit être réévalué chaque année pour tenir compte de l'inflation. En 2005, on dénombrait plus de 7 millions de personnes vivant en dessous du seuil de pauvreté, un nombre qui, conformément à l'objectif gouvernemental, doit être inférieur à 5 millions en 2012.
Cet indicateur central est complété par une trentaine d'indicateurs complémentaires illustrant dix sous-objectifs (intensité de la pauvreté, taux de difficultés de conditions de vie, taux de pauvreté ancré dans le temps des moins de 18 ans, taux de travailleurs pauvres...). Ces indicateurs sont soit issus de la statistique publique (3) - et, pour la plupart, suivis par l'Observatoire national de la pauvreté et de l'exclusion sociale (ONPES) -, soit des indicateurs transversaux d'inclusion sociale (indicateurs européens).
Ainsi, par exemple, l'indicateur « intensité de la pauvreté » - dont l'objectif est de traduire l'évolution de la lutte contre la pauvreté monétaire et les inégalités - permet d'appréhender la répartition des revenus des personnes pauvres. Il mesure l'écart entre le seuil de pauvreté et le revenu médian des personnes vivant sous le seuil de pauvreté monétaire, rapporté au seuil de pauvreté. Plus ce chiffre est important, plus le revenu médian de la population pauvre est éloigné du seuil de pauvreté, explique le tableau de bord. En 2005, l'intensité de la pauvreté s'établissait à 18,2, contre 16,3 en 2002 (+ 10 %). Autre indicateur : le taux de travailleurs pauvres, mesure de l'amélioration de la qualité de l'emploi. Il est défini comme la proportion de travailleurs pauvres parmi l'ensemble de la population active occupée et fait intervenir deux critères : le niveau de vie des personnes et leur activité. Ainsi est identifiée comme tel toute personne ayant été en emploi pendant au moins sept mois sur les 12 mois de la période de référence et ayant un niveau de vie inférieur à 60 % du revenu médian. En 2005, la France comptait 1,5 million de travailleurs pauvres (soit 6,4 % de la population active occupée) (4), un chiffre qui a augmenté de 21 % entre 2003 et cette même date.
Lors d'une réunion de consultation sur le tableau de bord, le 27 mars dernier, le Haut Commissaire a indiqué que l'ONPES réfléchissait également à des « indicateurs d'alerte, issus d'enquêtes auprès des acteurs de l'insertion ou des données associatives, qui pourront compléter ce nouvel outil ». « Dans les domaines de la santé et du logement, ce tableau de bord général devra être complété par des tableaux thématiques, intégrant une liste plus détaillée d'indicateurs, permettant d'appréhender toutes les facettes du phénomène », a-t-il ajouté, tout en rappelant qu'il devra prendre en compte systématiquement l'impact des réformes en cours. Martin Hirsch a également regretté que ce tableau de bord ne prenne pas assez en compte la pauvreté des personnes âgées et a suggéré qu'elle fasse l'objet d'un « objectif spécifique, accompagné d'un indicateur à définir ».
(1) Document disponible sur
(3) Le Haut Commissariat admet cependant que ce choix a une « limite forte, surtout dans une logique d'évaluation de l'action publique : le décalage temporel est parfois important avant de disposer des informations. D'autre part, les enquêtes qui alimentent une partie de ces indicateurs prennent mal en compte certaines catégories de ménages, comme les sans-domicile. »
(4) Chiffre obtenu en prenant en compte la définition européenne de la notion de travailleur pauvre.