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Une étude européenne propose des indicateurs sur la violence faite aux mineurs détenus

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Le document arrive à point nommé, au moment où le décès récent de deux jeunes détenus, à l'établissement pénitentiaire pour mineurs (EPM) de Meyzieu (Rhône) et à la maison d'arrêt de Valence (Drôme), a remis sur la place publique l'insécurité du milieu pénitentiaire. DEI-France vient de publier une étude réalisée en Belgique, aux Pays-Bas, en Angleterre et Pays-de-Galles et en France, avec deux autres sections de Défense des enfants International, la Howard League for Penal Reform et avec le soutien de la Commission européenne. Elle pointe du doigt la nécessité de mieux mesurer les différentes formes de violence existant dans les institutions de détention pour mineurs (1).

Si, dans la plupart des Etats européens, les taux de criminalité juvénile sont restés stables durant la dernière décennie, chacun des pays étudiés a pourtant pris prétexte d'une augmentation des crimes pour réformer sa justice pour mineurs et la rendre de moins en moins spécifique. Avec, en corollaire, une plus forte propension à sanctionner les mineurs comme des adultes, donc à recourir à l'incarcération. En dépit de la Convention des Nations unies relative aux droits de l'enfant, selon laquelle la privation de liberté doit être pour eux une mesure de dernier ressort.

Comment évaluer de manière fiable et globale la violence dans les institutions pour mineurs privatives de liberté ? C'est justement là où le bât blesse. Les incidents sont connus, filtrent dans la presse (après le suicide intervenu à Meyzieu, l'administration pénitentiaire a signalé 72 tentatives de suicide en 2007), sont dénoncés dans différents rapports, mais les statistiques diffusées par les ministères de la Justice ne contiennent quasiment aucune information sur le sujet. Impossible également, dans le cadre de la recherche, « de collecter les données concernant les incidents violents impliquant des mineurs dans les quartiers pour mineurs des prisons, les EPM ou les centres éducatifs fermés, alors que celles-ci sont en principe connues de l'administration », regrette DEI-France.

Les enfants privés de liberté sont pourtant particulièrement exposés au risque de subir des violences de la part du personnel, de leurs pairs, ou d'avoir recours à l'automutilation ou au suicide, comme l'a déjà démontré une étude du secrétariat général des Nations unies sur la violence contre les en-fants (2), alors même qu'ils bénéficient de soins ou d'un soutien psychologique insuffisants. Parmi eux, « les enfants en garde de la police sont ceux pour qui le risque est le plus élevé, au cours de l'arrestation, des interrogatoires ou en cellule de garde à vue ».

En France, selon le rapport, « les règles et normes concernant le traitement des enfants privés de liberté se focalisent sur la sécurité et le contrôle [...]. Au sein des centres, cela crée un environnement qui rend les détenus anxieux, vulnérables ou menacés, et qui aboutit aux agressions. » Le document témoigne également des préoccupations des professionnels sur le « manque de formation adéquate pour faire face aux incidents de violence ». Citant une recherche réalisée en 2006 par la mission de recherche Droit et justice (ministère de la Justice et CNRS), il confirme que « la mise en détention entraîne de graves incidences sur l'expression de l'équilibre psychique et social de l'adolescent ou du jeune adulte et constitue, à terme, une importante source de sérieux désordres dans la vie en société ».

Pour améliorer les politiques publiques de « traitement des enfants en conflit avec la loi », il est donc « crucial de disposer d'informations exhaustives et de qualité sur les systèmes et les institutions de justice pour mineurs » et de mieux collecter les données relatives à la violence. Dans cet objectif, l'étude suggère aux autorités nationales d'utiliser 12 indicateurs (huit quantitatifs et quatre de politique générale), qui reprennent six des 15 indicateurs relatifs à la justice des mineurs élaborés en 2007 par l'Unicef et l'Office des Nations unies contre la drogue et le crime. Parmi ces critères : le nombre d'enfants détenus, décédés en détention, le pourcentage de victimes de lésions auto-infligées, d'abus sexuels, d'enfants détenus non séparés des adultes, mis à l'isolement, l'existence de systèmes indépendants d'inspection des lieux de détention, d'un dispositif de plaintes ou encore de normes concernant les procédures disciplinaires vis-à-vis des enfants privés de liberté.

Sur les 732 enfants détenus au 1er janvier 2006 (dont 479 prévenus, selon l'administration pénitentiaire), 71 avaient moins de 16 ans. Contrairement à l'Angle-terre ou au Pays-de-Galles, le nombre de mineurs en détention ne varie pas depuis 2002, souligne DEI-France. Reste que 3 500 enfants environ sont incarcérés chaque année, « auxquels il y a lieu d'ajouter ceux qui sont placés dans un centre éducatif fermé ». Sans compter que l'ouverture récente des établissements pénitentiaires pour mineurs « peut faire craindre, qu'à court ou moyen terme, les juridictions ne recourent plus largement à la privation de liberté ». Aucun chiffre n'est en revanche disponible sur les mineurs gardés par la police, les statistiques de cette institution ne faisant pas la distinction entre les enfants et les adultes.

Notes

(1) La violence contre les enfants en conflit avec la loi : une étude sur les indicateurs et la collecte de données en Belgique, en Angleterre et Pays-de-Galles, en France et aux Pays-Bas - Disponible sur www.dei-france.org.

(2) Paulo Sérgio Pinheiro - Rapport mondial sur la violence contre les enfants - 2006 - www.violencestudy.org.

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