La loi du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale a réformé le régime de la « domiciliation », qui permet à une personne sans domicile stable, en habitat mobile ou précaire, de justifier d'une adresse pour faire valoir ses droits civils, civiques et sociaux (1). Elle prévoit plus précisément que, pour prétendre au service des prestations sociales légales, réglementaires et conventionnelles - à l'exception de l'aide médicale de l'Etat - ainsi qu'à la délivrance d'un titre national d'identité, à l'inscription sur les listes électorales ou à l'aide juridique, les personnes sans domicile stable doivent élire domicile auprès d'un centre communal ou intercommunal d'action sociale (CCAS ou CIAS) ou d'un organisme agréé à cet effet. Deux décrets et un arrêté sont parus par la suite, apportant des précisions sur la nouvelle réglementation, entrée en vigueur depuis le 1er juillet 2007 (2). Dans une circulaire adressée aux préfets, la direction générale de l'action sociale (DGAS) fait le point sur le dispositif, afin de « faciliter la compréhension » des nouvelles règles et de « définir les orientations du pilotage territorial de la domiciliation ».
La DGAS apporte notamment des précisions sur la notion de « personne sans domicile stable ». Elle désigne « toute personne qui ne dispose pas d'une adresse lui permettant d'y recevoir ou d'y consulter son courrier de façon constante ». Ainsi, explique l'administration, les personnes qui vivent de façon itinérante, celles qui sont hébergées de façon très temporaire par des tiers, celles qui recourent aux centres d'hébergement d'urgence de façon inconstante sont sans domicile stable au sens de la loi du 5 mars 2007. En revanche, des personnes qui vivent chez des tiers de façon stable ou qui bénéficient d'un dispositif d'hébergement de plus longue durée (centres d'hébergement de stabilisation, centres d'hébergement et de réinsertion sociale, voire centres d'hébergement d'urgence assurant une prise en charge stable dans le cadre du principe de continuité) n'ont pas vocation à passer par une procédure d'élection de domicile dès lors que ces centres disposent d'un service de courrier. Les personnes qui stationnent pour une durée de plusieurs mois sur des aires d'accueil non plus, dès lors que, là encore, elles peuvent y recevoir leur courrier.
Les situations personnelles sont très variées et peuvent se trouver à la limite de cette notion. « C'est en fait à la personne de se demander si elle dispose d'une stabilité suffisante pour déclarer une adresse personnelle à une administration », souligne la DGAS. « Si la personne n'est pas certaine de résider toujours à cette adresse à un horizon de quelques semaines, elle doit passer par une procédure d'élection de domicile. »
A l'exception des CCAS et des CIAS - qui sont tenus de procéder à l'élection de domicile des personnes qui leur font une demande en ce sens, sauf lorsqu'elles ne présentent aucun lien avec la commune ou le groupement de communes -, seuls les organismes agréés par le préfet sont habilités à domicilier les personnes sans domicile stable. En vertu du décret du 20 juillet 2007, il ne peut s'agir que d'organismes à but non lucratif menant des actions contre l'exclusion ou pour l'accès aux soins, d'établissements et services sociaux et médico-sociaux assurant l'accueil, le soutien et l'accompagnement social, l'adaptation à la vie active ou l'insertion sociale et professionnelle des personnes en difficulté ou en situation de détresse, de certains organismes d'aide aux personnes âgées (3) ou encore de centres d'accueil pour demandeurs d'asile. Mais pour la DGAS, « il n'y a que des avantages, en particulier, à ce que les centres d'hébergement et de réinsertion sociale - voire les autres centres d'hébergement - soient agréés, même si les personnes qui y résident peuvent y recevoir leur courrier ». « Leur compétence dans les procédures d'accès aux droits peut être mise à profit au bénéfice de personnes non hébergées, soit qu'elles ne recourent pas au dispositif d'hébergement, soit qu'elles y recourent de façon erratique. » « Ils peuvent également, par exemple, domicilier des personnes dont l'admission est envisagée mais non effective ou des personnes qui auraient quitté le centre sans pour autant avoir une adresse stable », ajoute l'administration.
L'agrément est en principe valable pour l'ensemble des droits. Toutefois, précise encore la circulaire, « afin d'adapter au mieux le dispositif à l'offre locale de domiciliation », les préfets peuvent restreindre la mission de l'organisme. L'agrément peut ainsi borner l'activité de domiciliation à certaines catégories de personnes afin de respecter la raison sociale d'une association. Il peut également limiter la domiciliation à l'accès à certaines prestations, faculté qui doit toutefois « demeurer exceptionnelle afin de ne pas compromettre l'accès aux droits des intéressés ». Enfin, l'agrément peut déterminer un nombre d'élections de domicile au-delà duquel l'organisme n'est plus tenu d'accepter de nouvelles élections. « Dans cette hypothèse, explique la DGAS, les organismes doivent orienter les demandeurs vers un autre organisme agréé ou vers le CCAS ou le CIAS de la commune ou du groupement de communes. » L'organisme agréé n'étant cependant pas « obligé » par cette disposition.
Le décret du 20 juillet 2007 impose aux préfets de s'assurer de la couverture des besoins sur l'ensemble du territoire et du bon fonctionnement du service en matière de domiciliation. La direction générale de l'action sociale insiste : dans chaque commune où existe un service d'accueil de personnes sans domicile, en particulier un centre d'hébergement, un service de domiciliation doit pouvoir être implanté. A défaut, la condition légitime d'installation sur la commune posée par la loi pour les CCAS et CIAS risquerait d'aboutir à un déni du droit à la domiciliation. En outre, précise encore l'administration, « de nombreuses personnes sans domicile vivent en habitat de fortune, en caravane, voire sous tente dans des endroits retirés, éloignés des villes. Elles doivent pouvoir trouver, non loin de leur lieu de vie, un service de domiciliation. Dans les zones où cela paraîtra nécessaire, des antennes de services, fonctionnant à temps partiel, pourront utilement être installées dans des locaux mis à disposition par des mairies, par exemple, ou des associations. »
La DGAS demande par ailleurs aux préfets de veiller notamment à l'harmonisation des pratiques entre l'ensemble des organismes de domiciliation du département. « Il serait en effet dommageable que des comportements par trop différents, par exemple entre centres d'action sociale quant à l'appréciation du lien avec la commune, ou encore entre différents organismes en matière de suivi des intéressés ou d'accès à certaines aides, induisent des effets de concurrence négative qui seraient de nature à mettre en cause l'équilibre global du dispositif », explique la circulaire. Aussi l'administration appelle-t-elle les préfets à s'efforcer, « dans la concertation, de susciter la plus grande homogénéité possible dans les règlements intérieurs des organismes de domiciliation » et d'encourager la conclusion de protocoles entre eux. « Cette recommandation vaut notamment pour organiser les réorientations, lorsqu'un organisme n'est pas en mesure de domicilier une personne, quelle qu'en soit la raison, ou encore quand un organisme n'est agréé que pour une partie des droits ou prestations et qu'il y a donc lieu de mettre en oeuvre des partenariats. »
(2) La caisse nationale des allocations familiales a également précisé à son réseau, dans une circulaire, les modalités de mise en oeuvre de ce dispositif au regard de l'octroi des prestations familiales - Voir ASH n° 2546 du 22-02-08, p. 9.
(3) Centres locaux d'information et de coordination, services d'aide à domicile agréés au titre de l'article L. 129-1 du code du travail.