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Gratification des stages : le mécontentement gagne du terrain

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La mobilisation amorcée par les organisations représentatives des centres de formation en travail social, le Snasea (Syndicat national au service des associations du secteur social et médico-social) et le SOP (Syndicat général des organismes privés sanitaires et sociaux), au sujet de la gratification des stagiaires (1) n'est pas près de s'éteindre. Bien au contraire. L'impréparation de l'application de cette mesure aux étudiants en travail social, son caractère inéquitable et le peu d'assurance apportée par la direction générale de l'action sociale sur son financement ne font que nourrir un mécontentement qui s'étend comme une traînée de poudre.

« Une réponse mal adaptée »

Au niveau institutionnel d'abord, puisque après l'Assemblée des départements de France, c'est l'Association des régions de France (ARF) qui fait état de son indignation. Regrettant qu'« une fois de plus des mesures réglementaires affectant les missions des collectivités territoriales soient prises de façon unilatérale par l'Etat », elle s'inquiète des conséquences financières pour les régions de cette « réponse mal adaptée à un problème d'équité entre étudiants ». En effet, la circulaire de la direction générale de l'action sociale du 27 février dernier (2) ne vise que la prise en charge de l'Etat qui serait, rapporte l'ARF, estimée à hauteur de 10 millions d'euros par an ; celle-ci ne couvrirait donc que la moitié de la dépense évaluée à près de 20 millions d'euros par an. A défaut d'engagement des autres financeurs, les régions ne seront-elles pas alors sollicitées en raison de leurs compétences en matière de prise en charge de la formation, s'interroge l'ARF ? « Si tel était le cas, cela consisterait en la prise en charge d'une dépense à ce jour non intégrée dans le périmètre du transfert. Les régions seraient donc fondées à demander les droits de compensation inhérents à cette nouvelle charge. » Mais, si elle n'exclut pas l'idée d'un nouveau bras de fer avec l'Etat sur la partie financière, l'ARF s'inquiète également des nombreux effets pervers de la mesure, comme le désengagement potentiel des terrains de stages.

Pourtant, alors que bon nombre d'associations ont décidé de suspendre l'accueil de nouveaux stagiaires, la Fnades (Fédération nationale d'associations de directeurs d'établissements et services des secteurs sanitaire, social et médico-social sans but lucratif), qui se réjouit de cette mesure de gratification, a pris, pour sa part, une position volontariste. Elle enjoint aux établissements de ne pas être frileux, même s'ils n'ont pas d'assurance que la dépense sera prise en charge. « Leur contribution à la formation des professionnels constitue un impératif auquel ne peut se soustraire notre profession », défend-elle, estimant que l'obligation de gratification est opposable aux financeurs, quitte à aller devant le tribunal interrégional de la tarification sanitaire et sociale. Par ailleurs, la fédération regrette que le dispositif ne s'applique pas aux stagiaires moniteurs-éducateurs qui, souligne-t-elle, connaissent eux aussi la précarité financière.

Cette démarche volontaire d'appui aux stagiaires adoptée par une fédération ne saurait bien évidemment pas calmer l'ensemble des inquiétudes des professionnels. D'autant qu'existe une autre discrimination - de taille - introduite par le décret du 31 janvier, que rappelle l'ANAS (Association nationale des assistants de service social). En effet, sont exclus de la gratification les établissements publics administratifs et les fonctions publiques. Discrimination qui risque bien évidemment de peser sur le choix des étudiants : comment ne seraient-ils pas tentés de privilégier les stages indemnisés plutôt que d'autres, pourtant plus pertinents au regard de leurs parcours de formation ? Les stages organisés par les conseils généraux, les mairies, les caisses d'allocations familiales, là où la gratification n'est pas obligatoire, ne seront-ils alors choisis que par défaut ? Avec, comme le souligne l'ANAS, « une situation injuste à l'intérieur de chaque promotion : certains étudiants percevront les 398,13 mensuels et d'autres pas ! ».

Dénonçant ce traitement inéquitable, l'association demande aux établissements publics administratifs et aux fonctions publiques de gratifier leurs stagiaires et aux organismes financeurs d'intégrer, dès cette année, les coûts de l'accueil des stagiaires dans les subventions versées aux associations. Par ailleurs, elle réclame à la direction générale de l'action sociale un bilan de l'impact de ces nouvelles dispositions à la fin 2008, réalisé avec l'ensemble des acteurs concernés, afin d'actualiser si nécessaire le cadre réglementaire.

Les étudiants « pris en otage »

Décidée à faire pression, l'association indique se tenir « à la disposition des organismes de formation et des étudiants » pour toute action convergeant avec sa position. D'ores et déjà, les premiers intéressés, à savoir les professionnels en formation, commencent à se mobiliser sous l'effet d'une colère bien légitime. Dans plusieurs établissements, les étudiants, qui se sentent injustement « pris en otage », se réunissent et envisagent des actions. Par exemple, ceux de l'Association pour les formations aux professions éducatives et sociales (qui gère trois établissements à Bruz, Saint-Brieuc et Morlaix) réunis avec ceux de l'IRTS de Bretagne ont organisé plusieurs assemblées générales pour dénoncer l'inégalité d'application de la gratification et l'absence de garantie de son financement (3). Un appel à la grève était lancé pour le vendredi 14 mars par les éducateurs spécialisés de l'établissement de Bruz. De même, Sud santé-sociaux (4), après une assemblée générale réunissant, le 11 mars, les écoles du Nord-Pas-de-Calais et de la Picardie invitait les professionnels et les travailleurs sociaux en formation à faire grève le 14 mars et à venir manifester à Lille. Une audience devait être demandée à la DRASS et à la préfecture. Le syndicat appelait également à « construire un mouvement durable d'ampleur nationale ». L'Etat serait en tout cas bien avisé d'écouter la plainte de ceux confrontés directement à la difficulté de trouver des terrains de stage. Le risque serait de laisser se développer une pression qui, si elle s'organisait, pourrait être difficilement gérable...

Notes

(1) Voir ASH n° 2548 du 7-03-08, p. 45.

(2) Voir ASH n° 2548 du 7-03-08, p. 5.

(3) E-mail : gratificationpourtous@gmail.com.

(4) Sud santé-sociaux : 84, rue de Cambrai - 59 000 Lille - Tél. 03 20 74 17 69.

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