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SOCIÉTÉ

Les mariages forcés

En contradiction avec les principes de libre détermination individuelle et d'égalité entre les sexes, les mariages forcés, qui sont pratiqués dans certaines familles d'origine étrangère vivant en France, constituent une réalité relativement méconnue. Cet ouvrage, issu d'une recherche effectuée pour la direction de la population et des migrations, permet d'appréhender les différentes dimensions de cette violence spécifique - et ses intrications avec la question de l'immigration et les règles du droit international privé. La réflexion des auteurs - les sociologues Gérard Neyrand et Abdelhafid Hammouche, et Sahra Mekboul, juriste et psychologue - part d'une double enquête qu'ils ont réalisée en 2005-2006 à Paris, Lyon et Marseille : d'une part auprès d'une trentaine d'organismes associatifs ou publics concernés, à des degrés divers, par ce problème, d'autre part auprès de 16 jeunes femmes de différentes origines (Afrique subsaharienne, Afrique du Nord, Turquie, Comores), dont neuf ont subi un mariage forcé - elles avaient alors entre 16 et 24 ans -, et sept ont réussi à s'y soustraire.

Certaines jeunes femmes pensent, au départ, que les parents sont dans leur rôle lorsqu'ils se proposent de les marier. Ce qui ne les empêche pas toujours d'essayer de résister à leur projet. Ou d'y acquiescer, sans que leur docilité témoigne d'un consentement véritablement libre ni éclairé. « Le mariage n'est pas, alors, formellement forcé, mais peut l'être a posteriori, car des personnes vulnérables peuvent se voir infliger une telle contrainte sans pouvoir exprimer leur désaccord », commentent les chercheurs. De fait, si la violence physique n'est pas rare - surtout quand les jeunes filles manifestent leur désir d'indépendance -, les pressions constantes qui s'exercent sur elles sont d'ordre psychologique. Y échapper - la plupart du temps en prenant la fuite - n'est évidemment pas chose facile. Aussi est-ce souvent après leur mariage que les jeunes femmes réussissent à le remettre en cause. Dans un cas comme dans l'autre, la capacité des intéressées à s'opposer à leur famille (et belle-famille) est largement fonction de l'aide que peuvent leur procurer le réseau associatif et les services sociaux.

Nombreux à signaler l'augmentation considérable des mariages forcés dans tous les milieux où ils sont pratiqués, les intervenants rencontrés insistent sur l'importance de développer largement l'information des jeunes sur les droits et les rapports entre les sexes, et de sensibiliser les familles aux problèmes interculturels et intergénérationnels qui peuvent se rencontrer en situation migratoire. Il serait également souhaitable, soulignent les auteurs, de dispenser une formation spécifique aux travailleurs sociaux et aux magistrats - dont ceux qui ont le titre de premiers magistrats de leur commune : les maires qui célèbrent les mariages.

Les mariages forcés. Conflits culturels et réponses sociales - Gérard Neyrand, Abdelhafid Hammouche et Sahra Mekboul - Ed. La Découverte - 22 € .

POLITIQUE ÉCONOMIQUE ET SOCIALE

L'Etat social ne fonctionne plus

Sur le terrain depuis plus de 20 ans en tant qu'inspectrice générale des affaires sociales, Hélène Strohl a l'habitude de quitter Paris pour se rendre dans « des endroits qu'on ne visite guère en temps ordinaire » : hôpitaux, institutions pour enfants handicapés, guichets de caisses d'allocations familiales et d'agences pour l'emploi... De ces pérégrinations qui lui ont permis de « découvrir, regarder, comprendre ce que font les professionnels » et de toucher du doigt la réalité concrète vécue par les usagers, l'auteure a retiré quelques fortes convictions. Au rang de celles-ci, la nécessité de revoir des modes d'appréhension du réel qui sont trop catégoriels, rigides et « quantitativistes » pour rendre compte de situations complexes. Ainsi, « personne n'est plus ausculté, enquêté, questionné, que les exclus, les pauvres, les chômeurs », mais compter et décrire des états revient à égrener des chapelets de statistiques qui ne permettent pas de comprendre les processus d'exclusion, ni ceux d'insertion ou de réinsertion, explique l'experte. Elle dénonce avec la même alacrité - et un talent certain de caricaturiste - « la perte du sens de l'intervention sociale » : entre bureaucratisme et posture compassionnelle, les tenants de l'accompagnement social individualisé sont « dans une sorte d'être là avec » des usagers considérés comme des victimes, potentielles bénéficiaires de divers droits individuels, et non comme des partenaires actifs et responsables, affirme Hélène Strohl. Aussi exhorte-t-elle les professionnels à travailler dans et avec les différentes formes de communautés - d'affinités, de situation : agents de protection et d'entraide pour les individus qui les composent, ces « tribus » exercent aussi un contrôle social de leurs membres, utile à la collectivité dans son ensemble.

L'Etat social ne fonctionne plus - Hélène Strohl - Ed. Albin Michel (mise en vente le 6 mars) - 15 € .

TRAVAIL SOCIAL INTERVENTION SOCIALE

La grande vulnérabilité

Comment établir et maintenir un « lien d'humanité » avec des personnes qui, du fait de handicaps profonds, du très grand âge ou du stade terminal d'une maladie, vivent dans des mondes d'une étrangeté dérangeante ? Psychologue clinicienne, directrice d'une maison d'accueil spécialisée (MAS) et bénévole en unité de soins palliatifs, Sylvie Pandelé ne dissimule pas les aspects les plus éprouvants de l'intervention auprès de qui est dans une situation de complète dépendance - sans qu'un « merci », ou une lueur de reconnaissance, puisse venir gratifier l'aidant. Pour relever le défi permanent que constitue cette relation à hauts risques - de « mal-traitance » comme de fusion affective -, Sylvie Pandelé propose de réfléchir aux valeurs à ériger en principes d'action. Une réflexion nourrie par l'apport de philosophes, qui amène l'auteure à poser le concept de vigilance comme vertu cardinale d'une éthique de l'accompagnement : « vigilance à » l'environnement de la personne, afin de réduire sa vulnérabilité à l'égard de tout fait ou agent extérieur, et « vigilance pour » décoder l'expression des besoins et attentes de l'intéressé. Condition première d'une possibilité de rencontre, ce devoir de vigilance ne constitue pas la finalité de l'accompagnement, explique Sylvie Pandelé : celui-ci vise à (ré)introduire la personne dans la communauté des hommes, notamment en aidant les membres de son entourage à porter un autre regard sur elle.

La grande vulnérabilité. Fin de vie, personnes âgées, handicap - Sylvie Pandelé - Ed. Seli Arslan - 18 € .

INSERTION- EMPLOI

Les Cigales : notre épargne, levier pour entreprendre autrement

Nées en 1983, les Clubs d'investisseurs pour une gestion alternative et locale de l'épargne solidaire (Cigales) sont des groupes de cinq à vingt personnes, dont chaque membre s'engage, pour une durée de cinq ans, à épargner entre 7,50 € et 450 € par mois. Cette somme d'argent est mise dans le pot commun du club pour soutenir la réalisation de projets « à forte plus-value sociale » (entreprise d'insertion, magasin de produits biologiques, compagnie de théâtre...). Depuis 25 ans, 400 clubs ont vu le jour, qui ont collecté 3 millions d'euros et contribué à la création de 1 500 emplois dans 800 structures. Parmi celles-ci, les échecs n'ont pas manqué, et les retours financiers sont restés modestes. Cependant, la plupart des entreprises soutenues remboursent les sommes investies par les « cigaliers », souligne Pascale Dominique Russo, qui décrit l'histoire et le fonctionnement d'un mouvement comptant, aujourd'hui, une petite centaine de clubs.

Les Cigales : notre épargne, levier pour entreprendre autrement - Pascale Dominique Russo - Ed. Yves Michel - 13 € .

À LIRE AUSSI

Les écueils de la relation précoce mère-bébé

L'unité d'accueil mères-enfants (UAME) du centre hospitalier de Saint-Denis (Seine-Saint-Denis) fait partie de la vingtaine de dispositifs de psychiatrie périnatale organisés autour du soutien des mères qui, atteintes de troubles psychiatriques chroniques ou apparus au détour de leur maternité, sont en difficulté pour instaurer des liens d'attachement sécure avec leurs très jeunes enfants. Ce sont leurs modalités d'intervention auprès des dyades mères-bébés que présentent ici plusieurs professionnels de l'UAME.

Les écueils de la relation précoce mère-bébé - Sous la direction de Claude Boukobza - Ed. érès - 9 € .

Couple conjugal, couple parental : vers de nouveaux modèles

La diversification des modèles familiaux conduit-elle à une reformulation des rôles sexués au sein des couples, et à des formes nouvelles d'articulation entre conjugalité et parentalité ? Témoignant de la richesse de la recherche en psychologie, cet ouvrage collectif éclaire la dynamique des repositionnements identitaires à l'oeuvre dans les familles depuis une cinquantaine d'années.

Couple conjugal, couple parental : vers de nouveaux modèles - Sous la direction de Geneviève Bergonnier-Dupuy et Monique Robin - Ed. érès - 28 € .

- ACTES DE COLLOQUES -

La protection et le devenir social de l'adolescent

L'adolescence, une étape dans la maturation physique et psychologique qui n'est que depuis peu reconnue comme un âge de la vie à part entière, dérange. Plus encore les adolescents en difficulté. Quels interdits protecteurs, quel contrat social leur est proposé par une société à la fois très permissive et très exigeante en termes de réussite individuelle ? Quelles perches éducatives et thérapeutiques les professionnels de l'action sanitaire et sociale peuvent-ils leur tendre ? Des questions évoquées lors de journées nationales de formations pluridisciplinaires, organisées du 13 au 15 mars 2007.

Emergence n° 78 - Editions Anpase : BP 2009 - Bapeaume-les-Rouen - 76380 Canteleu - Tél. 02 32 83 27 00 - 12 € .

Familles et professionnels : quelle coopération ?

Dans le nouveau modèle familial, plus égalitaire et plus démocratique, les pratiques éducatives ont évolué. Mais les capacités parentales sont aussi plus facilement mises en cause, y compris par les pouvoirs publics et par les professionnels. Comment, dans ce contexte, apprendre à travailler ensemble ? et repenser l'accompagnement des familles ? En s'interrogeant aussi sur la pertinence des politiques publiques et sur l'efficacité des actions des professionnels, conclut un « cycle de qualification » de Profession Banlieue, tenu du 2 au 16 juin 2006.

Les cahiers de Profession Banlieue : 15, rue Catulienne - 93200 Saint-Denis - Tél. 01 48 09 26 36 - 13,50 € .

De la médiation familiale à la médiation

Vingt ans après la création du premier service de médiation familiale en France, cette activité s'est peu à peu structurée et développée, l'explosion du nombre de divorces et les difficultés qui en résultent pour les enfants, de même que la paupérisation de certaines familles rendant son intervention de plus en plus nécessaire. Quels publics ? Quelles pratiques ? Quels lieux ? s'est demandée la Fédération nationale de la médiation familiale lors d'un colloque les 11 et 12 octobre 2007. L'occasion, aussi, de s'interroger sur les nouveaux champs où la médiation est appelée à intervenir.

Fenamef : 11, rue Guyon-de-Guercheville - BP 10116 - 14204 Hérouville-Saint-Clair cedex - Tél. 02 31 46 87 87 - www.fenamef.asso.fr - 25 € .

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