Le Conseil de l'emploi, des revenus et de la cohésion sociale (CERC) a choisi de consacrer son huitième rapport aux services à la personne (1), en proposant une synthèse et une mise en perspective de toutes les informations disponibles sur le sujet. Deux raisons à cet intérêt, explique son président, Jacques Delors : cette activité est en fort développement et elle bénéficie d'un soutien public important. Certes, il est encore trop tôt pour évaluer les résultats du plan Borloo de développement des services à la personne adopté en 2005 - il faudra le faire dans deux ans -, mais il n'est pas prématuré de s'interroger sur les enjeux « multiples et parfois contradictoires ou en tension » de cette croissance, estime l'ancien président de la Commission européenne.
Le secteur comptait 1,2 million d'emplois en 2006, dont 58 % de femmes de ménage ou d'aides ménagères, 31 % d'assistantes maternelles et 11 % d'aides à domicile hors ménage. Il se caractérise par une très forte féminisation, énormément de temps partiels, beaucoup de salariés à employeurs multiples, des bas salaires et un âge moyen supérieur à celui de l'ensemble des actifs. « Le développement quantitatif est indéniable », résume le rapport, mais par la qualité et la considération, ces emplois restent encore souvent au bas de l'échelle sociale.
Autre caractéristique, le fort soutien public apporté par de nombreux canaux : la réduction et maintenant le crédit d'impôt, les exonérations de cotisations sociales, l'allocation personnalisée d'autonomie (APA) pour son volet aide à domicile, les prestations pour les personnes handicapées, les allocations pour la garde des jeunes enfants, la TVA à taux réduit, etc. Au total, le rapport cite le chiffre de 8 milliards d'euros par an, sans compter les aides ménagères facultatives apportées par les conseils généraux et les caisses de retraite. De nombreux pays européens soutiennent le maintien à domicile et certains services domestiques, mais la France semble être le pays qui accorde l'aide la plus généreuse et la plus extensive. Dans une période où l'état des finances publiques est préoccupant, il faudra sans doute faire des choix, indique Jacques Delors.
Le rapport s'interroge notamment sur le bien-fondé des subventions accordées aux cours particuliers et au soutien scolaire à domicile, pratique qui tend à favoriser « les enfants les mieux dotés sur le plan des revenus et du capital culturel ou social ». Il regrette aussi le soutien fiscal apporté indifféremment à tous les types d'emploi à domicile, que le salarié soit embauché directement par un particulier, par un mandataire ou par un service prestataire, ce dernier étant pourtant le plus susceptible d'assurer des formations, des évolutions de carrière, des emplois du temps plus complets, une démarche qualité...
L'augmentation des besoins aussi bien que la diminution du vivier actuel de recrutement (une majorité de femmes de 40 ans ayant élevé leurs enfants) obligera sans doute à modifier les profils et à améliorer les conditions d'emploi proposées, estime le rapport. Sauf à recourir à l'immigration, ce qui ne semble pas envisagé actuellement.
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