Le ministre de l'Immigration et de l'Intégration, Brice Hortefeux, a installé officiellement, le 7 février, la « commission sur le cadre constitutionnel de la nouvelle politique d'immigration », qui devra dire si une révision de la Constitution est nécessaire pour pouvoir lancer deux des réformes envisagées par le gouvernement en matière de droit des étrangers : la définition de quotas d'immigration, d'une part ; la « simplification de la répartition des compétences entre les deux ordres de juridiction » (administratif et judiciaire), d'autre part.
Présidée comme prévu par Pierre Mazeaud, l'instance compte, outre ce dernier, 12 membres parmi lesquels les présidents des commissions des lois de l'Assemblée nationale et du Sénat - le député (UMP) Jean-Luc Warsmann et le sénateur (UMP) Jean-Jacques Hyest - mais aussi l'ancien secrétaire d'Etat à l'intégration socialiste Kofi Yamgnane et le démographe Hervé Le Bras, directeur d'études à l'Ecole des hautes études en sciences sociales, qui ont tous deux publiquement déclaré leur opposition aux quotas d'immigrés.
Dans sa lettre de mission, Brice Hortefeux précise le cadre de réflexion de la commission. Celle-ci devra donc, en premier lieu, « envisager » à la lumière des expériences conduites à l'étranger le cadre juridique nécessaire à la définition de quotas d'immigration en France à caractère normatif. Des quotas qui, sans concerner ni les demandeurs d'asile, ni les réfugiés politiques, permettraient la fixation du nombre annuel des migrants admis à entrer et séjourner en France en fonction des « besoins » et des « capacités d'accueil de la Nation ». A l'intérieur de cette catégorie serait défini un quota par « différentes composantes de l'immigration » (professionnelle, familiale, étudiante), avec l'objectif que l'immigration économique - « elle-même analysée par grandes catégories professionnelles » - représente 50 % du flux global des entrées en vue d'une installation durable. Le ministre invite également les membres de la commission à étudier « la possibilité de décliner ce quota global et ces quotas catégoriels selon les grandes régions de provenance des flux migratoires ».
La commission aura aussi à étudier le moyen de simplifier le contentieux de l'entrée, du séjour et de l'éloignement des étrangers. « L'organisation actuelle - qui confie aux deux ordres de juridiction et parfois, en leur sein, à des juridictions spécialisées le soin de contrôler les décisions administratives prises en ces matières - entraîne par sa complexité des inconvénients tant pour les étrangers intéressés que pour la bonne exécution des mesures d'éloignement les concernant », écrit Brice Hortefeux, qui demande par conséquent aux membres de l'instance d'étudier, « dans le respect des droits de la défense » et « après un examen attentif des expériences étrangères pertinentes », l'hypothèse d'une simplification, voire d'une unification de ce contentieux à travers la création d'une juridiction spécialisée.
De son côté, Pierre Mazeaud a insisté sur « l'indépendance de la commission » et sur sa « liberté de proposer ou non une modification constitutionnelle ». Il a également annoncé que l'instance - dont les conclusions sont attendues pour la fin du mois de mai - se réunira « un jour par semaine au moins ».