Pas de budget, pas de méthode. Pour beaucoup d'acteurs impliqués dans les quartiers, la présentation, le 8 février, du « plan banlieues » par Nicolas Sarkozy (voir ce numéro, page 7) se résume à des déclarations d'intention (voir également notre interview ci-contre). Et ne prend pas la mesure des enjeux : la réforme de la dotation de solidarité urbaine demandée par l'Association des maires ville et banlieue de France, mais aussi par le Conseil national des villes (1), a été renvoyée à des discussions ultérieures et on est encore loin d'une réforme structurelle mobilisant toutes les politiques publiques, telle que plébiscitée par l'Inter-réseaux des professionnels du développement social urbain (2).
« Alors que la réduction du nombre de fonctionnaires est planifiée, comment le chef de l'Etat compte-t-il permettre aux habitants des quartiers d'accéder à un «véritable» service public ? », s'interroge la Confédération nationale du logement (CNL). La politique de la ville doit, selon la CNL, correspondre « à une vision globale des quartiers qui inclut le respect de la mixité et de la diversité, l'accès à un service public de proximité de qualité et la participation active des associations et des habitants à toutes les dispositions qui les concernent ». S'agissant plus précisément des mesures pour favoriser la réussite scolaire, Michel Aschieri, secrétaire général de la FSU, dénonce « un renoncement, sans doute faute de moyens, à lutter véritablement contre les inégalités sociales, territoriales, au profit d'une égalité des chances à destination des individus qui le méritent ».
Annie Jeanne, présidente de l'Asso-ciation nationale des directeurs de missions locales, s'inquiète quant à elle du choix politique opéré sur le volet emploi. Le chef de l'Etat a prévu d'associer les « entreprises spécialisées dans l'insertion professionnelle » au futur « contrat d'autonomie » proposé aux jeunes sans emploi. « Soit on renforce les services publics existants, soit on s'adresse au privé, j'espère au moins qu'il y aura une bonne articulation », a-t-elle déclaré. La CPCA (Conférence permanente des coordinations associatives) s'interroge elle aussi sur la place des associations dans la mise en oeuvre de ce nouveau contrat, « sachant qu'elles représentent près de 80 % des entreprises d'insertion ». Prenant acte de la volonté du président de la République d'appliquer les engagements de l'Etat en matière de clarification des relations contractuelles entre associations et pouvoirs publics, elle s'inquiète néanmoins de ses déclarations selon lesquelles « les efforts de la collectivité doivent aller aux quartiers et non en priorité au fonctionnement des associations ». Cette dichotomie entre l'activité et la structure, souligne-t-elle, « ne va pas dans le sens de l'autonomie et de la pérennisation des projets associatifs, si souvent instrumentalisés dans la politique de la ville ». La CPCA demande la participation de toutes les parties prenantes - Etat, collectivités, associations - au « plan banlieues » et réclame la mise en place d'une véritable concertation territoriale et d'un comité de suivi national qui définiraient « collectivement les objectifs à atteindre et les moyens pour y parvenir ».
Pour gagner en efficacité, la politique de la ville doit « conserver son ancrage et son adaptation aux réalités locales, avec des objectifs déclinés sur chaque territoire dans le cadre d'un contrat entre l'Etat et les différentes collectivités », abondent de leur côté l'Inter-réseaux DSU et l'Association des missions d'aménagement de développement économique, urbain et social (Amadeus) (3), qui, dans une réaction commune, rappellent que la politique de la ville représente seulement « 0,037 % du budget national ». Elles soulignent en outre que « la prise en compte particulière de chaque territoire ne s'oppose pas à l'aide et au suivi individualisé des populations, mais qu'elle est complémentaire ». L'Association des maires ville et banlieue de France devait, pour sa part, se prononcer le 13 février sur le plan.
(2)
(3) Contact : Patrice Allais, président -