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Il faut aller « au bout des ambitions » de la loi du 11 février 2005, insistent les associations

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Trois ans après sa promulgation, la loi pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées « n'a pas encore significativement changé le quotidien des personnes concernées », estime l'AFM (Association française contre les myopathies). Sa « mise en oeuvre [est] décevante », juge l'APF (Association des paralysés de France). Le texte marquait de « réelles avancées », mais son application « n'a pas atteint l'âge de raison », pour la FNATH (l'association des accidentés de la vie). « Comment transformer l'essai ? », s'interroge l'APAJH (Association pour adultes et jeunes handicapés). Bref, les appréciations des associations sur la loi du 11 février 2005 convergent.

Gestion de masse

Deux des « dispositifs phares » peinent encore à se mettre en place et à « répondre à l'esprit de la loi », affirme l'APF. Les maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) d'abord, où l'asso-ciation constate souvent un manque de personnels, une logique trop administrative et médicale, une gestion de masse et non individualisée, un accueil et une information insuffisants, des délais de réponse très longs, une évaluation des besoins inégale et souvent a minima. Leur mise en place « constitue un véritable progrès dans les départements qui y consacrent des moyens financiers et hu-mains importants », nuance la FNATH, qui dénonce surtout « des disparités de traitement selon les départements », en fonction de la composition des équipes pluridisciplinaires, de la formation des personnels, de la qualité des évaluations... « Des situations d'urgence restent sans réponse alors que la loi prévoit des procédures spécifiques », ajoute l'AFM.

La prestation de compensation du handicap (PCH) pose aussi problème, souligne l'APF. Si le dispositif se révèle « souvent favorable » pour les personnes les plus dépendantes, il ne l'est pas pour celles qui préfèrent garder l'ancienne allocation compensatrice pour tierce personne. Forfaitaire et plus souple d'utilisation, celle-ci permet en effet aux bénéficiaires, malgré leur besoin d'aides, d'en distraire une partie « pour compenser leur manque de revenu ». Mais « c'est un piège », qui empêche les intéressés « d'accéder à leurs droits », pointe l'association.

De son côté, l'AFM estime qu'il n'y a « pas de véritable compensation du handicap » dans la mesure où la prestation laisse un « reste à charge » important, aussi bien en matière d'aides humaine, animalière ou technique, que d'aménagements du véhicule et du logement. L'association se prépare aussi à une extrême vigilance sur la prochaine mise en oeuvre de la PCH pour les enfants car elle craint qu'en la matière, « les pouvoirs publics ne s'éloignent de l'esprit de la loi ».

L'accès à l'école s'est amélioré, assurent l'AFM et l'APF. Mais, ajoute la seconde, les conditions d'accueil (parfois à temps partiel) et d'accompagnement laissent souvent à désirer, de même que la formation des enseignants et des auxiliaires de vie scolaire et que le partenariat avec le secteur médico-social.

En matière d'accès à l'emploi, « l'augmentation de la contribution à verser à l'Agefiph a incontestablement sensibilisé les entreprises », reconnaît la FNATH. Mais nombreuses sont celles qui choisissent de s'exonérer en signant des accords dont le « manque d'ambition » n'est pas de nature à améliorer sérieusement la situation. Cependant, dans ce domaine, les critiques se portent surtout sur le secteur public. L'exonération de l'Education nationale, premier employeur de France, de son obligation d'emploi ne passe décidément pas. L'APF juge aussi « scandaleuse » l'utilisation des crédits du FIPHFP (Fonds d'insertion des personnes handicapées pour la fonction publique), souvent détournés vers la mise en accessibilité des locaux. Elle estime également que le petit nombre de réunions prévu pour les comités locaux risque de les cantonner « à un rôle de chambre d'enregistrement » et de retirer « toute initiative à leurs membres élus ». Quant à l'APAJH, elle préconise de rapprocher l'Agefiph et le FIPHFP et d'élargir le champ d'intervention des Cap emploi au secteur public.

Sur l'accessibilité, « la tendance est plutôt à l'attentisme », déplore l'APAJH. « Du retard a été pris », note aussi l'APF, qui manifeste son « inquiétude » alors qu'il ne reste « plus que six exercices budgétaires avant 2015 ». Trop de villes n'ont pas encore installé leur commission pour l'accessibilité. « Les diagnostics réalisés sont souvent de mauvaise qualité », ajoute la FNATH. Toutes les formes de handicap n'y sont pas prises en compte. Il faut donc « professionnaliser » les interventions. Et puis, il manque toujours un « texte satisfaisant » sur les locaux de travail. Pour l'APAJH, il faut lancer un audit global sur les installations ouvertes au public, puis un plan national de financement des travaux, dans lequel l'Etat devra inscrire sa participation pour « intervenir de manière incitative et positive ».

Du pain sur la planche

Les ressources des personnes handicapées, du moins de celles qui ne peuvent travailler, sont également un beau sujet de déception pour nombre d'associations qui se mobiliseront le 29 mars sous la bannière de « Ni pauvre, ni soumis » (1).

Enfin, la FNATH pointe « l'absence de véritable statut pour les représentants associatifs », citant l'exemple de ceux qui siègent dans les commissions départementales pour l'accessibilité, dont les nombreux frais de déplacement ne sont pas remboursés. Plus globalement, l'APF se demande si les associations ne sont pas « peu à peu mises de côté ». Le CNCPH (Conseil national consultatif des personnes handicapées) n'est plus systématiquement consulté sur certains textes. Quant au comité de suivi de la réforme, installé le 23 octobre dernier suite au rapport Gohet, il « tarde à engager concrètement ses travaux ». Six groupes de travail ont été définis mais un seul vient de commencer à se réunir.

Autant dire que la conférence nationale du handicap, prévue par la loi elle-même et que Valérie Létard a promis, le 11 février, de réunir « avant l'été », a du pain sur la planche. Trois ans après le vote de la loi, indique la FNATH, « le recul est maintenant suffisant pour apprécier les dysfonctionnements et les imperfections de [son] application » et pour « les corriger au plus vite ». A moins qu'il ne suffise d'aller, comme le suggère l'AFM, « jusqu'au bout de ses ambitions » ?

Notes

(1) Voir ASH n° 2543 du 1-02-08, p. 44.

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