Dans le cadre de la lutte contre les abus et les fraudes, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 (1) a permis de prendre en compte - au-delà des ressources et de la situation familiale - les éléments de train de vie pour l'octroi ou le renouvellement du droit au revenu minimum d'insertion (RMI), à certaines prestations familiales (prestations d'accueil du jeune enfant, complément familial, allocation de rentrée scolaire), à l'allocation de parent isolé (API), à la couverture maladie universelle complémentaire (CMU-C) et à l'aide à l'acquisition d'une couverture complémentaire santé (ACS). Le décret fixant leurs modalités d'évaluation est enfin paru au Journal officiel.
Lorsque l'organisme local de sécurité sociale, à l'occasion de l'instruction d'une demande ou lors d'un contrôle, constate une disproportion marquée entre le train de vie du demandeur ou du bénéficiaire et les ressources qu'il déclare, une évaluation forfaitaire des éléments du train de vie est effectuée afin de déterminer son droit à la prestation.
Le président du conseil général, dans le cas du RMI - sur demande ou après consultation de la caisse d'allocations familiales -, ou l'organisme de sécurité sociale, dans les autres cas, en informe alors le demandeur ou le bénéficiaire par lettre recommandée avec accusé de réception. Celle-ci doit tout d'abord l'informer de l'objet de la procédure engagée, de son déroulement, de ses conséquences, de sa possibilité de demander à être entendu et à être assisté, lors de cet entretien, du conseil de son choix, des sanctions applicables en cas de déclarations fausses ou incomplètes et de ce que le résultat de cette évaluation est transmis aux autres organismes de sécurité sociale qui lui attribuent, le cas échéant, des prestations sous conditions de ressources. Cette lettre doit aussi l'inviter à renvoyer, dans un délai de 30 jours, le questionnaire adressé par l'organisme visant à évaluer les différents éléments de son train de vie accompagné de toutes les pièces justificatives. A défaut de réponse complète dans ce délai, le demandeur ou le bénéficiaire est prévenu qu'il s'expose à la suspension, selon le cas, soit du délai d'instruction de la demande pendant une durée maximale qui doit être fixée par décret, soit du versement de la prestation jusqu'à la production des pièces requises.
Sont pris en compte pour l'évaluation du train de vie :
les propriétés bâties détenues ou occupées par le demandeur ou le bénéficiaire : pour le RMI, les prestations familiales et l'API, à hauteur d'un quart de la valeur locative annuelle et, pour la CMU-C et l'ACS, le total de la valeur locative annuelle, définie dans tous les cas aux articles 1494 à 1508 et 1516 à 1518 B du code général des impôts (2) ;
les propriétés non bâties détenues ou occupées par le demandeur ou le bénéficiaire : pour le RMI, les prestations familiales et l'API, à hauteur d'un quart de la valeur locative annuelle et, pour la CMU-C et l'ACS, le total de la valeur locative annuelle, définie dans tous les cas aux articles 1509 à 1518 A du code général des impôts (3) ;
les travaux, charges et frais d'entretien des immeubles : 80 % du montant des dépenses ;
les personnels et services domestiques : 80 % du montant des dépenses ;
les automobiles, bateaux de plaisance, motocyclettes : à hauteur de 6,25 % de la valeur vénale de chaque bien lorsque celle-ci est supérieure à 10 000 € pour le RMI et l'API, et de 25 % pour les prestations familiales, la CMU-C et l'ACS ;
les appareils électroménagers, équipements son-hifi-vidéo, matériels informatiques : 80 % du montant des dépenses lorsque celles-ci sont supérieures à 1 000 € ;
les objets d'art ou de collection, articles de joaillerie et métaux précieux : à hauteur de 0,75 % de leur valeur vénale pour le RMI et l'API et de 3 % pour les prestations familiales, la CMU-C et l'ACS ;
les voyages, séjours en hôtels et locations saisonnières, restaurants, frais de réception, biens et services culturels, éducatifs, de communication ou de loisirs : 80 % du montant des dépenses ;
les clubs de sports et de loisirs, droits de chasse : 80 % du montant des dépenses ;
les capitaux : à hauteur de 2,5 % de leur montant à la fin de la période de référence pour le RMI et l'API et de 10 % pour les prestations familiales, la CMU-C et l'ACS.
Les dépenses visées ci-dessus sont celles réglées pendant la période de référence, différente selon la prestation concernée. Quant à la valeur vénale, il s'agit de la valeur réelle à la date de mise à disposition. Afin de l'évaluer, sont notamment retenus, lorsqu'ils existent : le montant garanti par le contrat d'assurance ; l'estimation particulière effectuée par un professionnel ; la référence issue d'une publication professionnelle faisant autorité.
A noter : dans tous les cas, les biens et services ne sont pas pris en compte lorsqu'ils ont été détenus ou utilisés à usage professionnel. En cas d'usage mixte, l'évaluation est effectuée au prorata de l'utilisation à usage privé ou personnel.
Il y a disproportion marquée entre le train de vie et les ressources déclarées lorsque le montant du train de vie est supérieur ou égal :
pour le RMI, à la moitié de son montant annuel, augmentée des revenus perçus, pour la période de référence, au titre, d'une part, des prestations et aides mentionnées aux articles R. 262-6 et R. 262-7 du code de l'action sociale et des familles, et d'autre part, des rémunérations tirées d'une activité professionnelle ou de stages de formation qui ont commencé au cours de la période de versement du RMI ;
pour les prestations familiales, au double du plafond de ressources applicable à la prestation concernée, augmenté des revenus perçus, pour la période de référence, au titre des prestations et rémunérations exclues en tout ou en partie, pour l'appréciation des ressources déclarées, en application des articles R. 532-3 à R. 532-8 du code de la sécurité sociale ;
pour l'API, à la moitié du revenu familial annuel fixé à 150 % de la base mensuelle de calcul des prestations familiales pour le parent isolé et à 50 % de cette même base par enfant à charge, augmentée des revenus perçus, pour la période de référence, au titre des prestations et rémunérations exclues en tout ou en partie, pour l'appréciation des ressources déclarées, en application des articles R. 524-3 et R. 524-6 du code de la sécurité sociale ;
pour la CMU-C et l'ACS, au double du plafond de ressources applicable pour l'ouverture du droit, augmenté des revenus perçus, pour la période de référence, au titre des prestations et rémunérations exclues en tout ou en partie, pour l'appréciation des ressources déclarées, en application des articles R. 861-8 et R. 861-10 du code de la sécurité sociale.
Si l'examen de la situation du demandeur ou du bénéficiaire est effectivement disproportionnée par rapport à ce qui a été déclaré, les éléments du train de vie seront alors pris en compte pour la détermination du droit à la prestation. Même si les ressources prises en compte selon l'évaluation forfaitaire du train de vie ne donnent pas droit à la prestation, l'attribution, la prorogation ou le renouvellement de la prestation n'est toutefois pas refusé en cas de circonstances exceptionnelles liées notamment à la situation économique et sociale du foyer, ou si la disproportion marquée a cessé. En cas de refus, la décision - qui doit être motivée et indiquer les voies de recours - est notifiée au demandeur ou au bénéficiaire, par lettre recommandée avec accusé de réception.
Signalons enfin que le décret modifie les conditions d'octroi de la CMU-C. Nous y reviendrons dans le prochain numéro des ASH.
(2) Des règles spécifiques sont prévues pour les propriétés situées à l'étranger.
(3) Des règles spécifiques sont prévues pour les propriétés situées à l'étranger.