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La Cour européenne des droits de l'Homme juge suffisant le délai de rétractation de deux mois offert à la mère en cas d'accouchement sous X...

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Dans un arrêt du 10 janvier, la Cour européenne des droits de l'Homme (CEDH) a jugé suffisant le délai de deux mois, prévu par la législation française, permettant à la mère ayant accouché sous X de revenir sur sa décision de remettre son enfant en vue d'adoption.

Dans cette affaire, une Irlandaise de 36 ans, mariée et résidant en Irlande, a fait le choix de venir accoucher en France pour bénéficier de la possibilité, inconnue en droit irlandais, d'un accouchement anonyme. L'enfant, issu d'une relation extraconjugale, naît en février 2002. Informée au cours de deux entretiens avec les services sociaux qu'elle dispose d'un délai de deux mois suivant l'acte de remise de l'enfant pour en demander la restitution, elle signe un procès-verbal d'admission de l'enfant comme pupille de l'Etat et consent à son adoption. Durant ces entretiens, une infirmière et un médecin parlant anglais font office d'interprètes.

Au mois de mai, l'enfant est placé par les services de l'Etat dans une famille d'accueil en vue de son adoption plénière. En juillet, la mère demande sa restitution mais se voit opposer l'expiration du délai de rétractation. Elle se plaint alors en justice de ne pas avoir eu une parfaite conscience des implications d'un accouchement anonyme. Rejetée par le tribunal de grande instance de Lille, sa demande de restitution de l'enfant est accueillie favorablement par la cour d'appel de Douai. Celle-ci considère que la requérante « de nationalité irlandaise, de langue anglaise et ne parlant pas le français » n'a pas été mise en mesure de connaître les conséquences d'un accouchement sous X en France. En avril 2004, la Cour de cassation annule cette décision.

A la suite de l'adoption de l'enfant, prononcée en juin 2004, la mère biologique porte l'affaire devant la CEDH. Selon elle, la brièveté du délai de deux mois qui lui a été laissé pour réclamer son enfant et l'insuffisance d'informations sur la portée de ses actes en droit français, notamment en raison d'une aide linguistique insuffisante, sont contraires à l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme qui garantit le droit au respect de la vie privée et familiale.

Ayant relevé, d'une part, une grande diversité législative parmi les Etats membres du Conseil de l'Europe qui ont établi un délai de rétractation (1) et, d'autre part, la « présence d'intérêts difficilement conciliables, ceux de la mère biologique, ceux de l'enfant et ceux de la famille d'adoption », la Cour fait primer l'intérêt supérieur de l'enfant qui est de « bénéficier le plus rapidement possible de relations affectives stables dans sa nouvelle famille ». « Si le délai de deux mois peut sembler bref, il paraît néanmoins suffisant pour que la mère biologique ait le temps de réfléchir et de remettre en cause le choix d'abandonner l'enfant », juge-t-elle. Au vu de la diversité des systèmes juridiques, la Cour estime en outre qu'il s'agit d'un délai permettant « un équilibre et une proportionnalité suffisants entre les intérêts en cause ».

Enfin, retenant que la requérante s'est présentée à la maternité une semaine avant l'accouchement accompagnée de sa mère et d'un avocat français, la Cour estime qu'en la faisant bénéficier d'une assistance linguistique non prévue par les textes, les autorités françaises lui ont fourni une information suffisante et détaillée pour qu'elle comprenne exactement la portée de ses actes. Par conséquent, elle conclut à l'absence de violation par la France de l'article 8 de la convention.

(CEDH, 10 janvier 2008, aff. 35991/04, Kearns c/France)
Notes

(1) Il varie de dix jours à trois mois dans les Etats qui ont prévu un délai fixe. Par ailleurs, certains systèmes juridiques admettent la rétractation du consentement jusqu'au jugement d'adoption tandis que d'autres prévoient que le consentement est irrévocable.

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