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Modernisation du marché du travail : les négociations débouchent sur un accord

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Après quatre mois de discussions, patronat et syndicats ont finalisé le 11 janvier, au terme d'un dernier round de négociations de trois jours, un accord sur la modernisation du marché du travail. S'il ne révolutionne pas le droit du travail, ce texte, dont nous présentons les principales dispositions, pose les bases d'une « flexisécurité » à la française : plus de flexibilité pour les entreprises sur le contrat de travail et sa rupture, plus de sécurité pour les salariés sur certains droits. La CFTC, FO et la CFE-CGC ont décidé de le signer. La CFDT, qui devait se prononcer le 17 janvier, a laissé entendre qu'elle ferait de même, laissant alors la seule CGT dans le camp du refus. Ainsi validé par une majorité de confédérations syndicales, le texte sera repris, en tout ou partie, dans un projet de loi qui doit être présenté au Parlement à la fin du premier semestre 2008.

Plusieurs dispositions de l'accord visent à sécuriser les ruptures de contrats de travail. Par exemple, il y est expressément stipulé que tout licenciement devra être fondé sur un motif réel et sérieux. Les pouvoirs publics sont invités à prendre les dispositions nécessaires pour que ce principe s'applique à tous les contrats de travail (ce qui enterrerait alors définitivement le contrat « nouvelles embauches »). Par ailleurs, une indemnité de rupture interprofessionnelle unique devrait permettre de rationaliser le calcul des indemnités de rupture du contrat à durée indéterminée (CDI). Son montant ne pourrait être inférieur, sauf dispositions conventionnelles plus favorables à partir de un an d'ancienneté dans l'entreprise, à un cinquième de mois par année de présence (1). Les signataires de l'accord prévoient également de travailler avec les pouvoirs publics « à la possibilité de fixer un plafond et un plancher au montant des dommages et intérêts susceptibles d'être alloués en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse ». D'autre part, le salarié pourra, selon l'accord, dénoncer le reçu pour solde de tout compte qu'il aura signé dans un délai de six mois (au-delà, il sera libératoire). A noter encore : en cas de rupture du contrat de travail due à la survenance d'une inaptitude d'origine non professionnelle et en cas d'impossibilité de reclassement dans l'entreprise, les indemnités de rupture dues aux salariés pourraient être prises en charge soit par l'entreprise, soit par un fonds de mutualisation à la charge des employeurs.

Deux autres mesures traduisent, elles, la volonté du patronat de privilégier les solutions négociées à l'occasion des ruptures du contrat de travail. Davantage encore que la possible création, à titre expérimental, d'un contrat à durée déterminée « à terme incertain » réservé aux ingénieurs et cadres, conclu « pour la réalisation d'un objet défini » et qui pourrait être rompu par l'une ou l'autre des parties à la date anniversaire de sa conclusion pour un motif réel et sérieux, c'est l'éventuel avènement d'une « rupture conventionnelle » du CDI qui incarne cette ambition. Exclusif de la démission et du licenciement, cette rupture à l'amiable permettrait à l'employeur et à son salarié de convenir en commun des conditions de la rupture du contrat de travail qui les lie. Un droit de rétractation pendant un délai de 15 jours suivant la signature de la convention actant l'accord des parties serait créé. Et l'accord définitif de rupture serait homologué par le directeur départemental du travail dont le silence vaudrait validation à l'issue d'un délai préfix (2) de 15 jours calendaires. Le salarié pourrait bénéficier d'une indemnité spécifique dont le montant ne pourrait être inférieur à celui de l'indemnité de rupture interprofessionnelle unique et accéder aux allocations chômage.

L'accord prévoit, d'autre part, la « portabilité » de certains droits. En cas de rupture du contrat de travail ouvrant droit à indemnisation par l'assurance chômage, les anciens salariés bénéficieraient ainsi du maintien des couvertures complémentaires santé et prévoyance appliquées dans leur ex-entreprise pendant une durée maximum égale au tiers de la durée de leur droit à indemnisation, sans pouvoir être inférieur à trois mois. Le financement du maintien de ces garanties serait assuré conjointement par l'ancien employeur et l'ancien salarié dans les mêmes proportions qu'antérieurement ou par un système de mutualisation défini par accord collectif. Par ailleurs, les anciens salariés pourraient conserver 100 % du solde des heures de formation acquises au titre du droit individuel à la formation (20 heures par an, cumulables sur six années dans la limite de 120 heures), et utiliser ces droits en priorité pendant leur prise en charge par le régime d'assurance chômage. Ceux qui retrouvent un emploi pourraient aussi les mobiliser, en accord avec leur nouvel employeur, pendant les deux années suivant leur embauche. A noter : les possibilités de mise en place de mécanismes de « portabilité » ou de « transférabilité » pour d'autres droits - compte épargne-retraite, par exemple - devront, selon l'accord, être recherchées par les branches professionnelles, qui ouvriront à cet effet des négociations dans les 12 mois suivant la publication au Journal officiel des dispositions législatives et réglementaires le mettant en oeuvre.

L'accord comprend également de nombreuses mesures destinées à sécuriser la situation des salariés. A titre d'exemple, une prime forfaitaire devrait être instituée pour les jeunes de moins de 25 ans involontairement privés d'emploi et ne remplissant pas les conditions de durée d'activité antérieure ouvrant l'accès aux allocations du régime d'assurance chômage. Son montant et les conditions pour y accéder, notamment, seront fixés par la prochaine convention d'assurance chômage dont la négociation s'ouvrira au cours du premier semestre 2008. Les salariés devraient également pouvoir bénéficier d'un « bilan d'étape professionnel » destiné à inventorier de manière prospective et régulière leurs compétences et, lors de la prochaine négociation sur la formation professionnelle, les partenaires sociaux s'attelleront à définir les moyens d'assurer durablement le financement d'un système de qualification des salariés et demandeurs d'emploi les moins formés. Autre mesure pour sécuriser les salariés : la condition d'ancienneté pour bénéficier de l'indemnisation conventionnelle de la maladie devrait passer de trois à un an. Et le délai de carence être ramené de 11 à sept jours.

L'accord prévoit, d'autre part, d'instituer une période d'essai interprofessionnelle dont la durée, sauf accord de branche conclu avant son entrée en application et prévoyant des durées supérieures, serait comprise entre : un et deux mois au maximum pour les ouvriers et employés ; deux et trois mois au maximum pour les agents de maîtrise et les techniciens ; trois et quatre mois au maximum pour les cadres. Par accord de branche étendu uniquement, la période d'essai pourrait éventuellement être renouvelée une fois, sans que sa durée, renouvellement compris, puisse respectivement dépasser quatre, six et huit mois. La fixation de périodes d'essai plus courtes dans la lettre d'engagement ou le contrat de travail seraient toujours possibles. A noter : en cas d'embauche dans l'entreprise à l'issue d'un stage, la durée de celui-ci pourrait être prise en compte dans celle de la période d'essai, sans que cela puisse la réduire de plus de la moitié, sauf accord de branche ou d'entreprise prévoyant des dispositions plus favorables. Seraient visés les stages intégrés à un cursus pédagogique réalisés lors de la dernière année d'études.

Notes

(1) Actuellement, le montant légal de l'indemnité de licenciement varie selon qu'il s'agit d'un licenciement pour motif personnel ou pour motif économique. Sauf faute grave ou lourde, le salarié en contrat à durée indéterminée licencié pour un motif personnel a droit, à condition de compter deux ans d'ancienneté ininterrompue au service du même employeur, à une indemnité au minimum égale à 1/10 de mois de salaire par année d'ancienneté (majorée de 1/15 de mois par année d'ancienneté au-delà de dix ans). En cas de licenciement prononcé pour un motif économique, l'intéressé a droit, sous réserve de répondre à la même condition d'ancienneté, à une indemnité qui ne peut être inférieure à 2/10 de mois de salaire par année d'ancienneté (majorée de 2/15 de mois par année d'ancienneté au-delà de dix ans).

(2) Le délai préfix n'est susceptible ni de suspension ni d'interruption.

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