Conséquence de la loi du 20 novembre 2007 relative à la maîtrise de l'immigration, à l'intégration et à l'asile, une carte de séjour temporaire « salarié » peut être dorénavant délivrée, à titre exceptionnel, à l'étranger « dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir » (1). Une nouvelle voie de régularisation ouverte toutefois uniquement pour l'exercice d'emplois intervenant dans des métiers ou des régions caractérisés par des difficultés de recrutement. Dans une circulaire du 7 janvier 2008, le ministère de l'Immigration précise les conditions à remplir pour qu'un salarié puisse présenter une demande. On notera que, dès les premières lignes du texte, le ministère relativise la portée du dispositif, réaffirmant d'emblée la volonté du gouvernement de ne pas engager par cette nouvelle voie « une opération générale de régularisation ». Le dispositif « couvre par définition un nombre très limité de bénéficiaires » et « les étrangers en situation irrégulière au regard du droit au séjour ont vocation à regagner leur pays d'origine », insiste-t-il, tout en rappelant « la priorité qu'[il] attache à la lutte contre l'emploi illégal des étrangers ». De quoi conforter les associations comme le Groupe d'information et de soutien des immigrés (GISTI) dans leur appel à la prudence lancé récemment aux sans-papiers et à ceux qui les accompagnent (2).
Les préfectures doivent vérifier, en premier lieu, l'aptitude de l'étranger demandeur à exercer une activité professionnelle dans un métier ou une zone géographique caractérisés par des difficultés de recrutement. Deux conditions cumulatives doivent être remplies à cet égard.
L'étranger sans papiers salarié ou futur salarié doit tout d'abord disposer d'une qualification « et/ou » d'une expérience dans un des métiers répertoriés dans la liste des 30 professions ouvertes aux ressortissants des pays tiers (hors Union Européenne). Une liste qui, pour mémoire, a été régionalisée pour répondre aux besoins en main-d'oeuvre de chaque bassin d'emploi (3). A titre d'exemple, la liste des métiers - très qualifiés, rappelons-le - que les ressortissants étrangers peuvent exercer est ainsi réduite à 11 en Basse-Normandie ou encore à 13 dans la région Picardie et en Bretagne. Toutefois, pour le ressortissant d'un Etat lié à la France par un accord bilatéral de gestion concertée des flux migratoires dûment ratifié, les métiers supplémentaires éventuellement ouverts en vertu de cet accord doivent également être pris en compte. Aussi et surtout, la circulaire prévoit que, à titre exceptionnel et sous réserve que l'intégralité des autres conditions soient respectées, les demandes liées à un métier qui, sans figurer dans la liste régionale, « connaît des difficultés de recrutement particulièrement aiguës dans le bassin d'emploi concerné », peuvent tout de même faire l'objet d'un examen (4).
En tout état de cause, les préfectures sont invitées, en cas de doute, à saisir le consulat compétent du pays d'origine afin de faire authentifier les attestations ou diplômes produits ou de vérifier l'exactitude de l'expérience professionnelle alléguée dans le pays d'origine.
Deuxième condition à respecter : le demandeur doit apporter la preuve d'un engagement ferme de son employeur à l'occuper dans l'un des métiers figurant dans la déclinaison régionale de la liste fixée par le ministère de l'Immigration. Il peut s'agir d'une embauche formelle ou d'une promesse d'embauche en contrat de travail à durée indéterminée ou, à titre exceptionnel, à durée déterminée si celui-ci a une durée supérieure à un an. L'intéressé doit, en outre, fournir tous les justificatifs exigés pour la délivrance d'une carte de séjour temporaire mention « salarié » (5), renforçant l'implication de l'employeur dans la procédure d'admission exceptionnelle au séjour, sous peine d'irrecevabilité de la demande.
Le ministère de l'Immigration se montre plus souple s'agissant de l'appréciation des critères d'ordre humanitaire ou exceptionnel exigés par la loi. La circulaire invite en effet les préfets à procéder à un examen individualisé de situation « en faisant preuve de la plus grande bienveillance » à partir du moment où ils ont établi l'aptitude des intéressés à travailler dans l'un des métiers mentionnés dans la liste.
Le ministère leur demande, en outre, d'étudier « avec une particulière diligence » les dossiers qui leur ont été signalés par les employeurs eux-mêmes.
A noter : le cas échéant, le renouvellement de la carte de séjour « salarié » devra être effectué dans les conditions de droit commun. Les préfectures devront notamment vérifier que l'activité exercée reste, au moins les deux premières années, circonscrites à un métier sous tension, indique la circulaire.
(2) Le GISTI a constaté que, « depuis l'annonce d'une possible régularisation par le travail », nombreux sont ceux qui se sont déjà précipités dans les préfectures. Or le seul fait de travailler n'ouvre pas droit à une carte de séjour. De fait, selon l'association, « certains ont déjà fait l'objet d'interpellations au guichet et d'un éloignement du territoire » - Voir ASH n° 2538 du 4-01-08, p. 32.
(4) Une « petite fenêtre d'espoir », selon France terre d'asile qui, a indiqué l'association le 9 janvier dans un communiqué, entend bien utiliser le dispositif.