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Droits des usagers : les outils de la loi 2002-2 de plus en plus utilisés et appréciés, selon l'Uniopss

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Cinq ans après la loi du 2 janvier 2002 rénovant l'action sociale et médico-sociale, qui organise les droits des usagers dans les établissements et services (1), et deux ans après une première enquête sur le terrain qui avait donné des « résultats en demi-teinte » (2), l'Uniopss (Union nationale interfédérale des oeuvres et organismes privés sanitaires et sociaux) (3) a réitéré l'exercice pour évaluer l'application de ces dispositions. « Sans prétendre que l'échantillon a une valeur scientifique - 608 questionnaires ont été remplis dans 18 régions sur la base du volontariat, entre février et avril 2007 -, ce travail donne un éclairage sur le chemin parcouru et les difficultés rencontrées, juge Arnaud Vinsonneau, adjoint au directeur général de l'Uniopss et pilote de l'étude. C'est une contribution au débat, au moment où les pouvoirs publics ont inscrit une évaluation de ce volet de la loi 2002-2 à leur programme de travail 2008 » (4).

Seuls 4 % des établissements n'ont pas bougé

Sept outils ont été créés par la loi, dont quatre nécessitent une production écrite : le livret d'accueil, le règlement de fonctionnement, le contrat de séjour (tous trois doivent être remis lors de l'admission) et le projet d'établissement. L'enquête montre qu'ils ont été « massivement élaborés » ces cinq dernières années, en moyenne par 73 % des structures. 12,5 % y travaillent encore. 11 % réactualisent leurs documents. Reste moins de 4 % des établissements et services qui ne se sont pas attelés à la tâche.

Le document le plus fréquemment disponible est le règlement de fonctionnement (80 % des cas), devant le contrat de séjour (76 %) et le livret d'accueil (75 %). Le projet d'établissement ou de service reste plus à la traîne : 60 % des structures l'ont élaboré depuis 2002, et 21 % le réactualisent (il préexistait parfois à la loi).

« Les professionnels se sont saisis facilement du règlement de fonctionnement comme d'un outil utile, qui leur permet de préciser les règles de la vie en collectivité, dans le respect des droits et des responsabilités de chacun », commente Annelise Blettry, conseillère technique à l'Uriopss Provence-Alpes-Côte-d'Azur et Corse, qui a réalisé les deux enquêtes, en 2005 et en 2007. En revanche, sur le contrat de séjour, nombreux sont « les professionnels qui rappellent qu'ils ne sont pas tous juristes et qu'il y parfois un décalage entre les bonnes intentions et la pratique, en particulier pour ce que peuvent faire, ou pas, les usagers, souvent des personnes fragiles ou lourdement handicapées. Certains secteurs ont du mal à donner du sens à cet outil ou à lui trouver de l'intérêt. » Et puis, ajoute l'enquêtrice, « ce n'est sans doute pas un hasard si le secteur «handicap enfance», où les parents et leurs associations sont fortement mobilisés, a le plus faible taux d'absence du contrat de séjour (2 %), et le secteur de la protection de l'enfance le plus fort (26 %) ».

Une démarche participative

Qui a participé à l'élaboration des documents ? Tout (53 %) ou partie (39 %) des personnels, assurent les répondants (des directeurs à 81 %, des chefs de service à 9 %). Les structures ont donc pris le temps d'une démarche participative avec leurs salariés. Le phénomène est moins massif, mais néanmoins majoritaire, en direction des usagers : 53 % des répondants estiment les avoir impliqués dans la préparation. Avec des moyens variés qui vont de la consultation des instances de représentation à l'organisation de groupes de travail spécifiques, en passant par le test des documents auprès de volontaires. Enfin, les administrateurs ont été appelés à participer à l'élaboration des outils selon 63 % des répondants et à les valider dans 76 % des cas.

Quand les outils existent, sont-ils utilisés ? Oui, le plus souvent... Non, dans 10 % des cas (pour le règlement de fonctionnement) à 18 % (pour le projet d'établissement).

Pour introduire les outils dans la pratique, il faut une forte implication des professionnels, des procédures clairement établies et (encore) un réel investissement en temps, indiquent les répondants. Mieux vaut aussi multiplier les occasions : entretien lors de l'admission, rappel des droits et devoirs en cas de divergence ou d'incidents, réunions avec les familles, échanges en petits groupes, affichage, lettres d'information, pictogrammes...

Les départements toujours sans « personnes qualifiées »

La loi du 2 janvier 2002 a également mis en place des instances de participation : un conseil de vie sociale (CVS) le plus souvent (5). Les réponses sur le sujet montrent que subsiste une part non négligeable de méconnaissance ou de difficulté d'interprétation des textes. Là où le CVS existe, il se réunit trois fois par an (le minimum fixé par la loi) dans 41 % des cas. Le rythme est moins fréquent dans 29 % des établissements, plus rapide dans au moins 17 % des cas. Certains ont adopté le rythme mensuel ou bimestriel.

En cas de difficulté à faire valoir ses droits, l'usager peut faire appel à une « personne qualifiée », sorte de médiateur figurant sur une liste établie au plan départemental. 64 % des structures disent en avoir informé les usagers. Mais dans 20 départements au moins, la liste n'a toujours pas été dressée, et dans d'autres, si elle existe, les établissements n'en savent rien... Rien d'étonnant à ce que 6 % seulement des usagers aient pensé à se saisir de cette possibilité.

Enfin, 71 % des répondants affirment avoir informé sur la charte des droits et libertés de la personne accueillie. Mais 38 % se contentent de l'afficher, tandis que 54 % en ont débattu en interne, entre professionnels.

Quelles difficultés les professionnels ont-ils rencontré dans la mise en oeuvre des droits des usagers ? A chaque étape et tous secteurs d'activité confondus, c'est le manque de temps qu'ils avancent le plus souvent (34 %), devant la complexité de la démarche d'élaboration (19 %), le hiatus entre les textes réglementaires et leur application concrète (11 %), la difficulté de coordonner les actions (11 %). Pour 10 %, les outils élaborés apparaissent peu adaptés au public concerné. Enfin, 6 % - seulement - évoquent une résistance du personnel.

56 % des structures ont bénéficié d'un accompagnement, surtout de sessions d'information ou de formation, dont 30 % sur le long terme. Seuls 33 % ont évalué les dispositifs, il est vrai souvent mis en oeuvre en 2004 ou 2005. Enfin, 31 % ont fait l'objet (à une occasion ou une autre) d'un contrôle des pouvoirs publics, qui ont généralement vérifié l'existence des outils, pas leur qualité.

A l'usage, comment les professionnels considèrent-ils les dispositifs mis en place ? D'après les directeurs, 39 % jugent les documents écrits « utiles » et 22 % ont même développé une approche dynamique dans leur utilisation. 25 % ne font qu'appliquer les consignes de la direction. 6 % jugent les documents « sans intérêt mais obligatoires » et 0,6 % refusent de s'en saisir. « De nombreuses réponses montrent par ailleurs la difficulté de passer de la culture orale à l'objectivation par l'écrit de ce qui est fait », note Arnaud Vinsonneau.

On retrouve évidemment cet obstacle chez une partie au moins des usagers. Les uns jugent qu'il y a « trop de documents à lire ». D'autres n'y voient aucun intérêt sans accompagnement verbal. Mais ils sont contents si l'on « prend du temps avec eux » pour leur expliquer. Certains enfin y voient un signe de prise en compte de leur point de vue, mieux : « une marque de reconnaissance ».

Plus de retombées positives que d'appréhensions

Les pratiques ont-elles évolué avec la mise en oeuvre des nouveaux droits ? 49 % des répondants à cette question citent des conséquences négatives (parfois plus redoutées que constatées), notamment la surcharge de travail au détriment des prises en charge, la difficulté des personnes à assumer leur projet de vie, les risques de standardisation des pratiques et de développement des comportements procéduriers, ou encore l'incompréhension des personnels qui entendent parler des droits des usagers, pas de ceux des salariés...

Mais 79 % relèvent des évolutions positives, comme le renforcement de la communication et des échanges, la clarification des discours et des procédures, un suivi plus rigoureux des actions, un meilleur accueil des arrivants, une reconnaissance plus concrète des droits des usagers et de leur citoyenneté. Certains répondants soulignent aussi le renforcement de la dynamique de réflexion collective au sein des équipes, l'interrogation plus concrète sur les missions, les actions, la place faite aux usagers, qui redonne du sens au travail accompli. Une meilleure prise en compte de la parole des usagers ou des familles, et de leurs capacités, amène en retour un renforcement de la relation de confiance envers les professionnels, commentent certains répondants.

Au total, trois outils sont jugés d'un apport particulièrement intéressant par les structures qui s'attachent à développer la participation des usagers : le contrat de séjour, le projet personnalisé et le conseil de vie sociale. « Ce ne sont pas forcément les outils qui font l'objet de l'investissement le plus massif, pointe Annelise Blettry, mais quand les professionnels arrivent à les utiliser, leur jugement change. Le CVS semble même provoquer, de part et d'autre, un véritable engouement pour la «démocratie participative» dans les institutions. »

Notes

(1) Voir le supplément ASH au n° 2379 du 29-10-04 consacré aux droits des usagers.

(2) Voir ASH n° 2404 du 22-04-05, p. 31.

(3) Uniopss : 15-17, rue Albert - 75013 Paris - Tél. 01 53 36 35 00.

(4) La DGAS, l'IGAS et la DREES vont y travailler.

(5) Le conseil de vie sociale est obligatoire dans les établissements assurant l'hébergement, l'accueil de jour continu ou une aide par le travail. En sont dispensés certains établissements pour mineurs et les lieux de vie ou d'accueil.

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