Des progrès indéniables et des garanties supplémentaires. Les associations de défense des étrangers saluent les avancées contenues dans le décret créant le fichier informatique « ELOI » (voir ce numéro, page 19) par rapport à son projet initial, tout en restant très critiques. Un arrêté pris en juillet 2006 et instaurant ce fichier, dont l'objectif est de faciliter l'éloignement des étrangers en situation irrégulière, avait été annulé au mois de mars par le Conseil d'Etat, qui avait estimé que ce nouvel outil devait donner lieu à un décret et être validé par la Commission nationale de l'informatique et des libertés (1). La Haute Juridiction n'avait toutefois pas retenu les arguments de fond des associations qui avaient formé le recours.
Reste que le ministère de l'Immigra-tion ne s'en est pas tenu à une question de forme et a modifié le fonctionnement du fichier, traduisant, selon le cabinet de Brice Hortefeux, « une prise en compte du dialogue régulier avec les associations spécialisées ». La nouvelle version du décret ne prévoit ainsi plus le recueil d'informations relatives aux visiteurs des personnes placées en rétention administrative. Certaines données, qui, selon l'arrêté annulé, devaient être enregistrées pour trois ans après l'éloignement effectif, ne seront conservées que trois mois, hormis notamment celles concernant l'identité ou la filiation de la personne. Enfin, le fichier sera accessible à des agents « spécialement habilités ».
Si ces évolutions sont indéniables, le principe du « fichage des sans-papiers comme des délinquants » est pour autant maintenu, tempère Jean-Pierre Dubois, président de la Ligue des droits de l'Homme. « On assiste à une logique de rationalisation froide des procédures d'éloignement qui ne résoudra pas la situation complexe des personnes en rupture de droit au séjour », abonde Pierre Henry, directeur général de France terre d'asile.
Pourquoi, par ailleurs, conserver durant trois ans les données concernant les enfants ?, s'interroge Jean-Pierre Dubois. Estimant que le chemin n'a été « qu'à moitié fait », Laurent Giovannoni, secrétaire général de la Cimade, regrette que le fichier prévoie toujours l'enregistrement d'informations sur les personnes hébergeant des étrangers assignés à résidence, avec le risque d'accroître les arrestations au domicile ou de faciliter les poursuites pour « aide au séjour irrégulier ».