Comme il s'y était engagé fin novembre (1), le président de la République a réuni le 19 décembre l'ensemble des organisations patronales et syndicales les plus représentatives au plan national, en présence du Premier ministre, François Fillon, et des membres du gouvernement concernés, pour élaborer en commun l'agenda social des mois à venir. Première du genre, cette rencontre, en plus des thèmes de réforme dans les domaines de l'emploi, du pouvoir d'achat et des relations sociales à aborder en 2008, aura permis de définir la méthode selon laquelle ils seront traités et leur calendrier. Calendrier qui, compte tenu du nombre des sujets devant être discutés, apparaît pour le moins chargé mais aussi, eu égard aux échéances fixées, particulièrement serré.
Les partenaires sociaux prolongeront leur négociation sur la modernisation du marché du travail, qui devait en principe s'achever à la fin de l'année (2), les 9 et 10 janvier prochains. Ils rencontreront « autour du 15 janvier » le ministre du Travail pour lui faire part des résultats de leurs travaux. Si les discussions engagées ne débouchent pas sur un texte, le gouvernement, comme c'était initialement convenu, reprendra la main et « entreprendra une concertation rapide avant d'élaborer un projet de loi dont il aura la responsabilité », a indiqué Nicolas Sarkozy. Ce dernier a par ailleurs invité les partenaires sociaux à « une rencontre avec le gouvernement » avant que ne s'engage la renégociation de la convention d'assurance chômage en 2008, pour clarifier « la répartition et l'articulation des rôles entre le régime de solidarité financé par l'Etat et le régime d'assurance chômage financé par les entreprises et les salariés ». Devant initialement débuter fin 2008, cette renégociation pourrait être avancée au premier semestre afin de tenir compte du contenu de la négociation sur la modernisation du marché du travail et de la fusion ANPE-Unedic (3).
Autre thème figurant à l'agenda social 2008 proposé par le chef de l'Etat : la réforme de la formation professionnelle. Nicolas Sarkozy entend d'abord « mener un travail en commun dans un groupe » réunissant les principaux acteurs impliqués (Etat, partenaires sociaux et régions). Pouvant s'appuyer sur les travaux en cours au sein du Conseil d'orientation pour l'emploi (COE) (4), ce groupe devra remettre au gouvernement « pour la fin mars » ses conclusions en matière d'objectifs prioritaires et de méthode pour les atteindre. Gouvernement et partenaires sociaux décideront ensuite ensemble « qui fait quoi et quand sur ces sujets », a précisé le président de la République, qui juge utile d'établir des priorités « dans ce chantier complexe ». En la matière, il souhaite « que soit examinée en premier lieu une meilleure orientation des financements et des dispositifs de formation vers ceux qui en ont le plus besoin, en particulier les demandeurs d'emploi et les salariés les moins qualifiés ».
La question de la conditionnalité des allégements de charges consentis aux entreprises sera également débattue en 2008. « Il me semble juste que ces allégements aient des contreparties salariales », a rappelé le chef de l'Etat, précisant qu'« il n'est pas normal qu'ils restent inchangés pour des entreprises et des branches qui refuseraient de négocier les salaires ou maintiendraient trop longtemps leurs minima en dessous du SMIC ». Un scénario sur ce thème élaboré par Christine Lagarde et Xavier Bertrand, respectivement ministre de l'Emploi et du Travail, a été transmis pour avis au COE, avant de l'être à la Commission nationale de la négociation collective, « afin que le gouvernement puisse proposer au Parlement des dispositions législatives dès le printemps ».
Autre priorité du pensionnaire de l'Elysée : la rénovation du système de négociation collective. Nicolas Sarkozy souhaite que soient examinés les critères de la représentativité et la question du financement des syndicats. Il estime par ailleurs nécessaire de réfléchir aux conditions de validité de l'ensemble des accords (5). En matière de temps de travail, il « ne veu[t] plus que la loi ou des accords de branche verrouillent toute possibilité, pour ceux qui le souhaitent, de travailler plus pour gagner plus ». Et d'ajouter : « Cette discussion doit avoir lieu dans l'entreprise et lorsqu'il y aura allongement du temps de travail, il devra y avoir des contreparties sonnantes et trébuchantes. » Les partenaires sociaux doivent indiquer au président de la République s'ils sont « prêts à négocier sur tout ou partie de ces sujets » ou s'ils préfèrent « que le gouvernement s'en saisisse après concertation » avec eux. Dans l'hypothèse d'une négociation, étant donné qu'une première saisine du gouvernement sur une partie de ces chantiers est intervenue il y a sept mois, le chef de l'Etat croit « raisonnable de se fixer pour échéance le mois de mars prochain ».
Dans un communiqué du 19 décembre, Matignon indique par ailleurs que le projet de loi sur le service public de l'emploi « devrait être adopté au second semestre 2008 ». Et que « le chantier du Grenelle de l'insertion et la réforme du revenu de solidarité active devraient aboutir en 2008 ».
Nicolas Sarkozy et François Fillon devaient adresser avant Noël aux partenaires sociaux un courrier avec des documents d'orientation faisant la synthèse des décisions sur le contenu, la méthode et le calendrier de l'agenda social 2008. Agenda qui, sur proposition de la CFDT, traitera également de l'insertion professionnelle des jeunes de banlieue. La CFTC a, pour sa part, fait ajouter un point sur la participation des salariés. Le chef de l'Etat a en outre proposer aux partenaires sociaux de tenir « une réunion similaire d'agenda consacrée à la protection sociale début 2008 ». Et a demandé au Premier ministre d'établir un agenda social spécifique à la fonction publique, auquel seraient associées, en plus des fédérations syndicales de fonctionnaires, les confédérations. Un point est aussi prévue en mars 2008 pour préparer le volet social de la présidence française de l'Union européenne.
(5) Dès le 18 décembre, les partenaires sociaux avaient annoncé la tenue le 24 janvier d'une première séance de « délibération sociale » sur la démocratie sociale.