La loi du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable - dite loi « DALO » - a consacré le droit pour les personnes mal logées de pouvoir se tourner vers l'Etat pour obtenir un logement (1). Concrètement, ce droit va pouvoir s'exercer par un recours amiable devant une commission de médiation censée statuer sur le caractère prioritaire des demandes de logement social non satisfaites par les bailleurs sociaux, puis, le cas échéant, par un recours contentieux devant une juridiction administrative (2). La loi prévoit qu'une commission de médiation doit être installée dans chaque département au plus tard le 1er janvier 2008, exigence désormais réalisable avec la parution du décret qui en fixe la composition et les règles de fonctionnement (3).
Chaque commission de médiation doit être composée de 13 membres (4), tous nommés par le préfet pour une durée de 3 ans - renouvelable une fois - mais pas forcément tous désignés par la même autorité.
Sont ainsi désignés par le préfet :
3 représentants de l'Etat ;
1 représentant des organismes d'habitations à loyer modéré ou des sociétés d'économie mixte de construction et de gestion de logements sociaux, et un représentant des autres propriétaires bailleurs ;
1 représentant des organismes chargés de la gestion d'une structure d'hébergement, d'un établissement ou d'un logement de transition, d'un logement-foyer ou d'une résidence hôtelière à vocation sociale ;
1 représentant d'une association de locataires affiliée à une organisation siégeant à la commission nationale de concertation ;
2 représentants des associations agréées dans le département dont l'un des objets est l'insertion ou le logement des personnes défavorisées ;
1 personnalité qualifiée qui assure la présidence et qui dispose d'une voix prépondérante en cas de partage égal des voix.
Au-delà, chaque commission de médiation comprend également un représentant du département, désigné par le conseil général, un représentant des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) qui ont conclu un accord collectif intercommunal, désigné sur proposition conjointe des présidents des EPCI concernés (5), ainsi qu'un représentant des communes désigné par l'association des maires du département. Etant précisé que, lorsqu'il n'existe aucun accord collectif intercommunal dans le département, la commission comprend alors 2 représentants des communes.
A propos des associations agréées dont l'un des objets est l'insertion ou le logement des personnes défavorisées, le décret précise qu'il s'agit de celles qui « mènent de façon significative » dans le département des actions d'insertion ou en faveur du logement des personnes défavorisées. L'agrément est accordé par le préfet pour une durée de 3 ans renouvelable et peut être retiré à tout moment si l'organisme ne satisfait plus aux conditions de l'agrément ou en cas de manquements graves ou répétés à ses obligations. La décision de retrait ne peut toutefois intervenir qu'après que l'association en cause a été mise à même de présenter ses observations.
A noter : le secrétariat de la commission est assuré par un service de l'Etat désigné par le préfet.
La commission de médiation est saisie dans les conditions prévues par la loi du 5 mars 2007 afin de juger du caractère prioritaire ou non de la demande qui lui est présentée ainsi que sur l'urgence qu'il y a à attribuer au demandeur un logement ou à l'accueillir dans une structure d'hébergement. Le décret indique que la demande, réalisée au moyen d'un formulaire répondant aux caractéristiques arrêtées par le ministre chargé du logement et signée par le demandeur, doit préciser l'objet et le motif du recours, ainsi que les conditions de logement ou d'hébergement du demandeur. Ce dernier doit fournir, en outre, toutes pièces justificatives de sa situation et mentionner, en particulier, les demandes de logement ou d'hébergement effectuées antérieurement ainsi que, le cas échéant, l'existence d'un arrêté d'insalubrité, de péril ou de fermeture administrative affectant son logement ou d'une procédure engagée à cet effet. La réception du dossier donne lieu à la délivrance d'un accusé de réception par le secrétariat de la commission. Ce document est important car c'est sa date de délivrance qui fait courir les délais qui s'imposent à l'instance pour rendre sa décision (voir ci-dessous).
La commission peut entendre toute personne dont elle juge l'audition utile. Elle peut par ailleurs demander au préfet de faire appel aux services compétents de l'Etat ou des collectivités territoriales ou à toute personne ou organisme compétent pour faire les constatations sur place ou l'analyse de la situation sociale du demandeur qui seraient nécessaires à l'instruction du dossier. L'instance doit, en tout état de cause, tenir compte notamment des démarches précédemment effectuées par l'intéressé.
Le décret revient sur les personnes qui pourront, à partir du 1er janvier 2008, être désignées par la commission comme prioritaires et devant être logées d'urgence. Nécessairement de bonne foi et satisfaisant aux conditions réglementaires d'accès au logement social, elles devront se trouver dans l'une des situations suivantes :
ne pas avoir reçu de proposition adaptée à leur demande de logement social dans le délai fixé par le préfet dans chaque département ;
être dépourvues de logement. « Le cas échéant, indique le décret, la commission apprécie la situation du demandeur au regard du logement ou de l'hébergement dont il peut disposer en vertu de l'obligation d'aliments définie par les articles 205 et suivants du code civil » ;
être logées dans des locaux impropres à l'habitation, ou présentant un caractère insalubre ou dangereux. Le cas échéant, la commission tient compte des droits à hébergement ou à relogement auxquels le demandeur peut prétendre en application des articles L. 521-1 et suivants du code de la construction et de l'habitation, des articles L. 314-1 et suivants du code de l'urbanisme ou de toute autre disposition ouvrant au demandeur un droit à relogement ;
avoir fait l'objet d'une décision de justice prononçant l'expulsion du logement ;
être hébergées dans une structure d'hébergement de façon continue depuis plus de 6 mois ou logées dans un logement de transition depuis plus de 18 mois ;
être handicapées, ou avoir à leur charge une personne en situation de handicap ou au moins un enfant mineur, et occuper un logement :
- soit présentant au moins un des risques pour la sécurité ou la santé énumérés à l'article 2 du décret du 30 janvier 2002 (6) ou auquel font défaut au moins deux des éléments d'équipement et de confort mentionnés à l'article 3 du même décret (7),
- soit d'une surface habitable inférieure à 16 mètres carrés pour un ménage sans enfants ou 2 personnes (augmentée de 9 mètres carrés par personne en plus dans la limite de 70 mètres carrés pour 8 personnes et plus) ou, pour une personne seule, d'une surface inférieure à 9 mètres carrés.
En outre, si la situation particulière du demandeur le justifie, la commission peut, par une décision spécialement motivée, désigner comme prioritaire une personne ne répondant qu'incomplètement aux caractéristiques définies ci-dessus.
Saisie par un demandeur de logement ordinaire, la commission de médiation doit, en principe, rendre sa décision dans un délai de 3 mois à compter de la réception de la requête. Exceptions : dans les départements d'outre-mer (DOM) et, jusqu'au 1er janvier 2011, dans les départements comportant au moins une agglomération - ou une partie d'une agglomération - de plus de 300 000 habitants, ce délai est de 6 mois.
Autre délai fixé : celui laissé aux maires des communes concernées par le logement d'un demandeur reconnu prioritaire par la commission de médiation et que le préfet se propose de désigner à certains organismes bailleurs. Les édiles disposent dans ce cas de 15 jours pour donner, à la demande du préfet, leur avis sur ce relogement. A l'expiration de ce délai, il sera réputé avoir été émis.
Enfin, lorsqu'elle sera saisie par une personne qui, sollicitant l'accueil dans une structure d'hébergement, un établissement ou logement de transition, un logement-foyer ou une résidence hôtelière à vocation sociale, n'a reçu aucune proposition adaptée en réponse à sa demande, la commission devra rendre sa décision dans un délai qui ne pourra dépasser 6 semaines. Pour sa part, le préfet devra proposer, dans un délai de 6 semaines au plus, une place dans un des établissements précités aux personnes désignées par la commission de médiation. Passé ce délai, si l'intéressé n'a pas été accueilli dans l'une de ces structures, il pourra exercer le recours contentieux prévu par la loi.
A compter du 1er décembre 2008, le recours devant la juridiction administrative prévu par la loi « DALO » pourra être introduit par le demandeur qui n'a pas reçu d'offre de logement tenant compte de ses besoins et capacités passé un délai de 3 mois après la notification de la décision de la commission de médiation le reconnaissant comme prioritaire et comme devant être logé d'urgence. Dans les DOM et, jusqu'au 1er janvier 2011, dans les départements comportant au moins une agglomération - ou une partie d'une agglomération - de plus de 300 000 habitants, ce délai sera de 6 mois.
La loi du 5 mars 2007 prévoit aussi que, en l'absence de commission de médiation dans le département, le demandeur peut exercer un recours devant la juridiction administrative si, après avoir saisi le préfet, il n'a pas reçu une offre tenant compte de ses besoins et de ses capacités dans un certain délai. Le décret fixe ce délai à 3 mois.
(2) Le recours contentieux ne sera possible qu'à partir du 1er décem-bre 2008 pour les demandeurs les plus prioritaires, et du 1er janvier 2012 pour les autres.
(3) La commission de médiation de Paris est la première à avoir déjà été installée, le 30 novembre.
(4) Avec pour chacun, un suppléant désigné.
(5) A défaut de proposition commune, ce représentant est tiré au sort par le préfet parmi les personnes proposées.
(6) Exemple : le logement comprend des dispositifs de retenue des personnes - garde-corps des fenêtres, escaliers, loggias et balcons - dans un état non conforme à leur usage - Voir ASH n° 2249 du 8-02-02, p. 9.
(7) Exemple : « une installation d'alimentation en eau potable assurant à l'intérieur du logement la distribution avec une pression et un débit suffisants pour l'utilisation normale de ses locataires » - Voir ASH n° 2249 du 8-02-02, p. 9.