Le Syndicat des psychiatres des hôpitaux (SPH) (1) dénonce l'avant-projet de loi « relatif à la rétention de sûreté et à la culpabilité civile » récemment transmis au Conseil d'Etat. « Il s'agit d'instaurer une privation supplémentaire de liberté en hôpital pénitentiaire après la peine pour les criminels «dangereux», de revenir sur les conditions de l'irresponsabilité pénale et de supprimer le secret médical en prison », déplore le syndicat. Il fustige « un nouvel exemple de réforme jetée en pâture à l'opinion publique » et conduite dans la précipitation « au mépris des règles du droit, de la déontologie et des pratiques des professionnels de santé ».
Concernant la « rétention de sûreté », « rien ne légitime cette double peine que représente l'enfermement sanitaire après la prison » : soit il s'agit, selon le SPH, de malades dangereux relevant d'une mesure de sûreté et de soins pour lesquels la sanction pénale, dépourvue d'accompagnement psychiatrique suffisante, n'avait pas de sens, soit il s'agit de criminels ayant purgé leur peine qui ne peuvent être condamnés à une nouvelle mesure privative de liberté.
Les dispositions « relatives aux auteurs d'infractions pénalement irresponsables en raison d'un trouble mental » l'inquiètent tout autant. « Il ne s'agit pas, selon l'avant-projet de loi, de supprimer l'irresponsabilité pénale, précise Jean-Claude Pénochet, secrétaire général du SPH, mais de mettre en cause la parole des experts psychiatriques en organisant un procès qui n'en est pas un pour les malades mentaux. » Le texte vise en effet à faciliter la saisine de la chambre de l'instruction, possible par le parquet ou par les victimes. Les personnes mises en examen, les experts et les témoins seraient entendus au cours d'une audience publique, à la suite de laquelle les magistrats pourraient soit renvoyer l'auteur des faits vers un tribunal ou une cour d'assises, soit confirmer son irresponsabilité et délivrer un « arrêt de constatation de culpabilité civile », en remplacement du non-lieu aujourd'hui prononcé. « Ce terme n'existe aujourd'hui pas en droit et traduit une revanche sur l'irresponsabilité pénale en rendant les malades coupables », souligne Jean-Claude Pénochet. Si le SPH ne s'oppose pas à la reconnaissance des droits de la partie civile, il estime que la remise en cause des expertises et la déclaration de culpabilité des malades « ne sera pas une bonne chose pour l'équilibre du procès pénal ». Sur quelque 200 irresponsabilités pénales déclarées chaque année, « très rares sont les recours à la chambre d'instruction », aujourd'hui possibles pour les victimes qui souhaitent être éclairées sur les motifs de la déclaration d'irresponsabilité, remarque Jean-Claude Pénochet.
(1) SPH : C/o CHS - 89, rue Cazeaux-Cazalet - 33410 Cadillac - Tél. 05 56 76 52 64.