Près d'un an après la loi DALO et la mise en place du plan d'action renforcé pour les sans-abri (PARSA), l'association Emmaüs a réinterrogé, comme elle l'avait fait en 2005 (1), les personnes accueillies dans ses centres d'hébergement et accueils de jour sur la qualité de leur prise en charge (2). Les résultats rendus publics sont tirés de l'exploitation de 419 questionnaires.
Malgré les changements intervenus au début de l'année 2007 (dont la « non-remise à la rue » et la création de places de « stabilisation »), 42 % des personnes accueillies par Emmaüs témoignent avoir eu, au cours des derniers mois, des difficultés pour trouver un hébergement pour une nuit. Le manque de places est donc toujours criant. Ces publics s'estiment-ils bien accompagnés ? 74 % répondent par l'affirmative en matière de soins, 59 % pour ce qui relève des démarches administratives. Mais, sur le plan de l'insertion, du chemin reste à parcourir, une minorité des sans-abri s'estimant bien soutenue pour accéder à une formation (30 %), à un emploi (33 %) ou à un logement (28 %).
Les usagers ont-ils constaté une amélioration de leur prise en charge ? La moitié estime qu'elle n'a pas changé. Alors que l'ensemble des citoyens, dont un panel a également été interrogé, est plus sévère : 71 % déclarent que la situation en est au même point. L'enquête révèle en même temps la faible notoriété de la loi DALO : 58 % des populations accueillies, comme de l'ensemble des Français sondés, n'ont jamais entendu parler de cette loi.
Dans les mois à venir, 28 % des sans-abri interrogés pensent qu'ils vivront toujours dans un centre d'hébergement, tandis que 38 % espèrent intégrer leur propre logement, sachant que la grande majorité (90 %) attend de se « fixer définitivement quelque part ». 76 % considèrent qu'il faut, parmi les actions à mener, développer les équipes de travailleurs sociaux qui partent à leur rencontre et 74 % qu'il faut ouvrir des centres « plus spécifiques ». Parmi les types de structures à ouvrir en priorité, 71 % plébiscitent des centres avec une prise en charge médicale importante, 71 % des centres d'accueil de proximité, 61 % des centres d'accueil à petits effectifs et 45 % des centres à faibles contraintes pour les publics accueillis.
Malgré les mesures prises en début d'année, il y a donc « toujours urgence », conclut Emmaüs. Cette enquête, souligne l'association, « sonne comme un signal d'alarme » sur la gravité d'une situation qui nécessite « une détermination politique claire pour amplifier les actions du PARSA et appliquer la loi DALO ». Elle propose dans cet objectif « dix mesures immédiates et concrètes » à l'adresse des pouvoirs publics et des candidats aux élections municipales, « dont elle attend une obligation de résultats ». Elle demande la mise en place, dans chaque ville et quartier, de maraudes pour combattre l'isolement des sans-abri, l'obligation de créer un centre d'hébergement d'urgence de proximité sur chaque territoire où plus de 20 personnes demandent à être hébergées, le lancement d'un programme d'initiatives et d'expérimentations pour répondre aux besoins des personnes à la rue (abris de nuit, lieux médico-sociaux...). Autre priorité : accélérer la création de maisons-relais et fixer des objectifs départementaux pour que chaque personne soit effectivement relogée dans le cadre de la loi DALO.
Emmaüs rappelle enfin la nécessité de mobiliser toutes les capacités de logement, de rendre publique la liste des logements vacants, d'appliquer le droit de préemption et de réquisition. Une campagne de communication sur le droit au logement devrait selon l'association être organisée. Dernière revendication, et non des moindres : le vote d'un budget 2008 à la hauteur de toutes ces priorités.
(2) « La prise en charge des SDF évaluée par les sans-abri et les Français », avec l'institut de sondage BVA -Novembre 2007 - Emmaüs : 179 bis, quai de Valmy - 75010 Paris - Tél. 01 46 07 51 51.