« Le dossier médical personnel [DMP] n'est toujours pas opérationnel et ne pourra l'être avant plusieurs années », indique un rapport des inspections générales des affaires sociales et des finances et du conseil général des technologies de l'information (1), chargés en juillet dernier de réaliser un point détaillé sur l'état d'avancement et le pilotage du projet de DMP ainsi que sur sa capacité à répondre aux objectifs initiaux. Remis le 12 novembre à Roselyne Bachelot et à Eric Woerth, respectivement ministres de la Santé et des Comptes publics, ce rapport relève surtout « l'inadéquation entre les moyens, les options stratégiques successives du [groupement d'intérêt public chargé de la gestion du projet] et les objectifs qui lui ont été et lui sont encore assignés ». C'est donc un « diagnostic réservé » sur la capacité du projet actuel à atteindre ces objectifs que fait la mission interministérielle, qui propose tout de même un certain nombre d'actions en vue de le sauver.
« D'emblée, le projet de DMP s'est vu attribuer une série d'objectifs à l'évidence hors d'atteinte » : un calendrier des opérations qui imposait de réaliser en trois ans un projet que tous les autres pays ont prévu de développer sur au moins dix ans et un coût « longtemps et grandement sous-estimé », ce qui a conduit à ne jamais accorder au groupement d'intérêt public chargé de conduire le projet les moyens qui lui étaient nécessaires. Il en est ainsi résulté une gestion de projet « constamment précipitée, souvent improvisée, parfois inconséquente ». Le rapport déplore également la non-parution des textes réglementaires (contenu du DMP et identifiant national de santé) nécessaires à son existence. En outre, « aucune étude réellement approfondie sur le contenu et l'usage du DMP n'a précédé sa création, en 2004, par loi relative à l'assurance maladie », critique la mission, ce qui a conduit à laisser en suspens des questions sérieuses telles que les conditions d'utilisation de l'identifiant national de santé, les procédures d'identification et d'authentification envisagées, le rôle et la responsabilité du médecin traitant dans les processus d'ouverture, d'alimentation et de mise à jour du DMP.
Face à ces constats, la mission interministérielle propose des mesures permettant tout à la fois de « sauvegarder les acquis, retrouver la confiance des acteurs et relancer le projet ». Elle recommande, par exemple, d'inscrire le projet dans un « calendrier non impératif, réaliste et glissant », d'adopter une « démarche de déploiement progressive, par «phases d'extension» successives », de « [coupler] ce développement à des expérimentations en vraie grandeur, conduites avec les acteurs de terrain, de façon à valider le contenu des dossiers, [...] la sécurité et l'intérêt des adaptations d'usage ». Parallèlement, il convient bien entendu de publier les décrets nécessaires à l'existence du projet
Prenant acte des conclusions du rapport, le gouvernement a réaffirmé, dans un communiqué du 12 novembre, l'intérêt du DMP et la poursuite de sa mise en oeuvre. Pour ce faire, il a annoncé l'ouverture prochaine d'une phase de concertation qui s'achèvera en mars 2008 par un séminaire associant les professionnels de santé, les représentants des patients et les industriels. Objectif : préciser la feuille de route du projet de DMP, « en privilégiant des expérimentations sur le terrain et un déploiement progressif ciblé sur les professionnels de santé et les patients ayant le plus besoin du DMP », ont indiqué Roselyne Bachelot et Eric Woerth, ajoutant qu'une « démarche de consolidation de la gouvernance du projet et des systèmes d'information de santé sera par ailleurs menée ».
(1) Rapport disponible sur