Parallèlement à la loi du 5 mars 2007 réformant la protection de l'enfance qui a institué une mesure judiciaire d'aide à la gestion du budget familial (voir encadré page 17), la loi du 5 mars 2007 portant réforme de la protection juridique des majeurs crée le statut de délégué aux prestations familiales. Un statut largement inspiré de celui applicable aux mandataires judiciaires à la protection des majeurs, et qui se substituera, au 1er janvier 2009, à celui de tuteur aux prestations sociales « enfants ».
A noter : la nouvelle mesure judiciaire d'aide à la gestion du budget familial est applicable depuis le 6 mars 2007 alors que le nouveau statut des délégués aux prestations familiales n'entrera en vigueur qu'au 1er janvier 2009. Dans l'attente, les articles L. 167-4 et L. 167-5 du code de la sécurité sociale applicables aux tuteurs aux prestations sociales « enfants » continuent de s'appliquer.
Selon le nouvel article L. 474-1 du code de l'action sociale et des familles (CASF), les délégués aux prestations familiales sont les personnes qui exercent, « à titre habituel », la mesure judiciaire d'aide à la gestion du budget familial ordonnée par le juge.
Cette appellation est suffisamment large pour permettre à des personnes exerçant par ailleurs une autre activité professionnelle d'être déléguées aux prestations familiales.
Plusieurs conditions sont nécessaires pour exercer la fonction de délégué aux prestations familiales.
Les délégués aux prestations familiales devront, à compter du 1er janvier 2009, satisfaire à des conditions de moralité, d'âge, de formation certifiée par l'Etat et d'expérience professionnelle (CASF, art. L. 474-3 nouveau).
Lorsque la mesure judiciaire d'aide à la gestion du budget familial sera confiée à un service, ces conditions seront exigées des personnes physiques appartenant à ce service qui auront reçu délégation de celui-ci pour assurer la mise en oeuvre de la mesure. Ce service devra en outre informer le représentant de l'Etat dans le département des méthodes de recrutement utilisées pour se conformer à ces exigences ainsi que des règles internes qu'il a fixées pour contrôler ses agents dans l'exercice de leur mission (CASF, art. L. 474-3 nouveau).
Les délégués aux prestations familiales devront de plus être inscrits sur une liste dressée et tenue à jour par le représentant de l'Etat dans le département (CASF, art. L. 474-2 nouveau).
Cette liste comprendra :
les services soumis à autorisation mettant en oeuvre les mesures judiciaires d'aide à la gestion du budget familial ;
les personnes physiques exerçant à titre habituel des mesures judiciaires d'aide à la gestion du budget familial qui auront fait l'objet d'un agrément.
Pour autant, le procureur de la République n'est pas évincé de la procédure d'établissement et de radiation des listes puisqu'il disposera d'un pouvoir d'avis conforme sur l'agrément des personnes physiques - agrément qui sera préalable à l'inscription sur la liste -, ainsi que sur l'autorisation des services (voir ci-dessous).
Les personnes inscrites sur cette liste devront prêter serment dans des conditions qui seront fixées par décret.
Les services mettant en oeuvre les mesures judiciaires d'aide à la gestion du budget familial ordonnées par l'autorité judiciaire feront, à compter du 1er janvier 2009, leur entrée dans la nomenclature des établissements et services sociaux et médico-sociaux fixée par l'article L. 312-1, I du code de l'action sociale et des familles (15 ° nouveau).
Conséquence : le représentant de l'Etat dans la région devra arrêter les schémas régionaux d'organisation sociale et médico-sociale relatifs (CASF, art. L. 312-5, d nouveau) :
aux services mettant en oeuvre des mesures judiciaires d'aide à la gestion du budget familial ;
aux personnes physiques qui exercent des mesures judiciaires d'aide à la gestion du budget familial.
L'autorisation de création, de transformation ou d'extension d'un service chargé d'exercer des mesures judiciaires d'aide à la gestion du budget familial sera prise par l'autorité compétente de l'Etat, après avis conforme du procureur de la République (CASF, art. L. 313-3 modifié). Dès lors, l'autorité de l'Etat se trouvera liée par l'avis donné par le procureur de la République.
Cette entrée dans le secteur médico-social sera effective au 1er janvier 2009. Toutefois, les personnes morales qui étaient précédemment habilitées pour exercer une mesure de tutelle aux prestations sociales « enfants » ont 2 ans à compter de l'entrée en vigueur de la loi pour se conformer à ces nouvelles règles, soit jusqu'au 31 décembre 2010 (art. 44, V de la loi).
En leur qualité de service social et médico-social, ces services seront soumis aux procédures de contrôle et d'évaluation de droit commun instaurées par la loi du 2 janvier 2002 rénovant l'action sociale et médico-sociale, procédures qui ont été modifiées par la loi du 5 mars 2007 portant réforme de la protection juridique des majeurs (1).
Les retraits d'autorisation de fonctionner seront répertoriés sur une liste nationale tenue à jour que le représentant de l'Etat dans le département et le procureur de la République pourront consulter (CASF, art. L. 474-2 nouveau). Rappelons que le préfet de département est tenu de mettre à jour la liste départementale des délégués aux prestations familiales. Cette liste nationale sera un moyen pour lui de le faire.
Toute personne physique désireuse d'exercer à titre individuel et habituel des mesures judiciaires d'aide à la gestion du budget familial devra obtenir un agrément administratif préalable à son inscription sur la liste départementale (voir page 15) (CASF, art. L. 474-4 nouveau).
C'est le représentant de l'Etat dans le département qui délivrera cet agrément. Ce, après avoir vérifié que l'intéressé remplit les conditions d'âge, de moralité, de formation et d'expérience professionnelle et qu'il a souscrit une garantie des conséquences financières de sa responsabilité civile (voir ci-dessous). A l'inverse de ce qui est prévu pour les mandataires judiciaires à la protection des majeurs, le représentant de l'Etat n'a pas besoin d'avoir obtenu un avis conforme du procureur de la République pour délivrer l'agrément.
Par ailleurs, l'agrément devra s'inscrire dans les objectifs et répondre aux besoins fixés par le schéma régional d'organisation sociale et médico-sociale.
Un nouvel agrément de la personne physique devra intervenir en cas de changement affectant les conditions d'âge, de moralité, de formation, d'expérience professionnelle ainsi que la garantie financière exigées du délégué.
Un décret doit encore préciser ce dispositif.
La procédure d'agrément entrera en vigueur au 1er janvier 2009. Les personnes physiques qui étaient précédemment habilitées pour exercer une mesure de tutelle aux prestations sociales « enfants » ont 2 ans à compter de la parution du décret qui doit préciser ce dispositif, et au plus tard jusqu'au 1er janvier 2011, pour se conformer à cette procédure d'agrément.
La personne physique exerçant la fonction de délégué aux prestations familiales aura de plus l'obligation d'obtenir une garantie financière pour le cas où sa responsabilité civile serait mise en jeu (CASF, art. L. 474-4 nouveau).
Cette garantie n'est obligatoire que pour les dommages subis par les personnes que le délégué « prend en charge » et non pour ceux qui pourraient éventuellement être causés à des tiers.
Cette obligation s'impose pour obtenir l'agrément mais vaut pendant toute la durée de la mesure de protection puisque la personne physique devra être en mesure de « justifier » de ces garanties.
Un contrôle administratif de l'activité des délégués aux prestations familiales est instauré par la loi du 5 mars 2007.
Ce contrôle administratif sera assuré par le représentant de l'Etat dans le département qui disposera, à cet effet, d'une palette d'outils aux effets graduels (CASF, art. L. 474-5 nouveau).
Le préfet disposera d'un pouvoir d'injonction, auquel il pourra recourir d'office ou à la demande du procureur de la République :
soit en cas de violation par le délégué aux prestations familiales des lois et règlements ;
soit lorsque la santé, la sécurité, la moralité, l'éducation ou le développement du mineur protégé sera menacé ou compromis par les conditions d'exercice de la mesure judiciaire d'aide à la gestion du budget familial.
L'injonction faite à l'intéressé devra être assortie d'un délai, fixé par le représentant de l'Etat de manière « circonstanciée ». Elle devra être adressée à l'intéressé une fois qu'il aura été entendu par le préfet.
Dans un second temps, si le délégué aux prestations familiales n'a pas satisfait à l'injonction qui lui a été adressée, le représentant de l'Etat dans le département lui retirera son agrément sur avis conforme du procureur de la République ou à la demande de celui-ci.
Le procureur de la République devra également être informé de la décision de retrait prononcé par le représentant de l'Etat une fois qu'elle sera prise.
En cas d'urgence, l'agrément pourra être suspendu sans injonction préalable, et au besoin d'office, dans des conditions qui doivent être fixées par décret.
Là encore, le procureur de la République devra être informé de la décision de suspension prise en urgence.
Les délégués aux prestations familiales dont l'agrément est retiré ou suspendu seront répertoriés sur une liste nationale tenue à jour. Outre le représentant de l'Etat dans le département, le procureur de la République pourra consulter cette liste (CASF, art. L. 474-2 nouveau).
Rappelons que le représentant de l'Etat dans le département est tenu de mettre à jour la liste départementale des délégués aux prestations familiales (CASF, art. L. 474-1 nouveau). Cette liste nationale sera un moyen pour lui de le faire.
Tout un arsenal de sanctions pénales est mis en place par la loi du 5 mars 2007.
Ainsi, est puni de un an d'emprisonnement et de 15 000 € d'amende le fait d'exercer une activité de délégué aux prestations familiales (CASF, art. L. 474-6 nouveau) :
sans avoir été agréé, lorsqu'il s'agit d'une personne physique ;
malgré la suspension ou le retrait de l'agrément ;
s'il s'agit d'un service dont l'objet est l'exercice de mesures judiciaires d'aide à la gestion du budget familial, lorsque l'autorisation de création, d'extension ou de transformation a été retirée.
Des peines complémentaires sont également encourues par les personnes physiques exerçant des mesures judiciaires d'aide à la gestion du budget familial. C'est le juge qui décide à sa discrétion de les infliger de manière alternative aux peines principales ou cumulative.
En effet, lorsqu'elles commettent les infractions citées ci-dessus, les personnes physiques peuvent également être condamnées à (CASF, art. L. 474-7 nouveau) :
une mesure d'interdiction, définitive ou temporaire pour 5 ans au maximum, d'exercer l'activité de délégué aux prestations familiales ;
l'affichage ou la diffusion de la décision de condamnation. Dans ce cas, l'exécution de cette peine sera à la charge du condamné. L'affichage ou la diffusion pourra concerner l'intégralité ou une partie de la décision, ou prendre la forme d'un communiqué informant le public.
Les services mettant en oeuvre une mesure judiciaire d'aide à la gestion du budget familial ordonnée par l'autorité judiciaire bénéficieront d'un financement par l'organisme de sécurité sociale qui verse la prestation faisant l'objet de la mesure (CASF, art. L. 361-2 nouveau).
Lorsque plusieurs prestations sociales font l'objet de cette mesure, la charge incombe à l'organisme versant la prestation sociale dont le montant est le plus élevé.
Ce financement sera versé sous forme de dotation globale dont le montant sera déterminé en fonction d'indicateurs liés, en particulier, à la charge de travail résultant de l'exécution des mesures de protection.
Les mesures judiciaires d'aide à la gestion du budget familial mises en oeuvre par une personne physiques bénéficieront d'un financement identique à celui prévu pour les services (CASF, art. L. 474-8 nouveau). Autrement dit, un financement par l'organisme de sécurité sociale versant la prestation faisant l'objet de la mesure. Si plusieurs prestations sociales font l'objet de la mesure, la charge incombe à l'organisme versant celle dont le montant est le plus élevé.
Ce financement ne sera toutefois pas versé sous forme de dotation globale.
Dans notre numéro 2529 du 2 novembre 2007, page 15 :
I - La tutelle des mineurs
Dans ce numéro :
II - Le statut de délégué aux prestations familiales
A - Sa mission B - Les conditions d'exercice de la profession C - L'organisation du secteur d'intervention des délégués D - Le financement
La loi du 5 mars 2007 réformant la protection de l'enfance a rebaptisé le dispositif judiciaire de tutelle aux prestations sociales « enfants » en mesure judiciaire d'aide à la gestion du budget familial et l'a transféré du code de la sécurité sociale (CSS) vers un nouvel article 375-9-1 du code civil (2).
Dans le cadre de cette nouvelle mesure applicable depuis le 6 mars 2007, lorsque les prestations familiales ne sont pas employées pour les besoins liés au logement, à l'entretien, à la santé et à l'éducation des enfants et que l'accompagnement en économie sociale et familiale n'apparaît pas suffisant, le juge des enfants peut ordonner qu'elles soient, en tout ou en partie, versées à une personne physique ou morale qualifiée, dite « délégué aux prestations familiales » (nouvelle dénomination du tuteur aux prestations sociales « enfants »).
Ce délégué exerce auprès de la famille une action éducative visant à rétablir les conditions d'une gestion autonome des prestations. A cet effet, il prend l'ensemble de ses décisions en s'efforçant, d'une part, de recueillir l'adhésion des bénéficiaires des prestations familiales et, d'autre part, de répondre aux besoins liés à l'entretien, à la santé et à l'éducation des enfants.
La liste des personnes habilitées à saisir le juge aux fins d'ordonner cette mesure d'aide sera fixée par décret. Et la décision du juge doit dorénavant fixer la durée de la mesure, qui ne peut excéder 2 ans, renouvelables par décision motivée.
Les prestations familiales concernées par la mesure judiciaire d'aide à la gestion du budget familial sont la prestation d'accueil du jeune enfant, les allocations familiales, le complément familial, l'allocation de logement, l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé, l'allocation de soutien familial, l'allocation de rentrée scolaire, l'allocation de parent isolé et l'allocation journalière de présence parentale. Le délégué aux prestations familiales pourra également percevoir la rente accident du travail lorsqu'elle est versée aux enfants en cas de décès de son bénéficiaire (CSS, art. L. 434-12 nouveau).
La mesure d'aide à la gestion du budget familial n'est en revanche pas applicable à la prime forfaitaire mensuelle d'intéressement au retour à l'activité versée aux bénéficiaires de l'allocation de parent isolé lorsqu'ils retrouvent un emploi.
La loi précise en outre que, lorsqu'un délégué aux prestations familiales a été nommé, il reçoit de plein droit les allocations mensuelles d'aide à domicile assurées dans le cadre de l'aide sociale à l'enfance, comme c'était le cas du tuteur aux prestations sociales (CASF, art. L. 222-4, al. 2 modifié).
La charge des frais de la mesure judiciaire d'aide à la gestion du budget familial incombe à l'organisme débiteur des prestations familiales dues au bénéficiaire de la mesure (CSS, art. L. 552-6 et L. 755-4). Si plusieurs prestations sociales sont perçues par le délégué, la charge incombe à l'organisme versant la prestation du montant le plus élevé (CASF, art. L. 222-4-1 modifié).
(1) Sur ce point, voir ASH n° 2521 du 7-09-07, p. 15.
(2) Sur cette loi, voir ASH n° 2505 du 27-04-07, p. 17.