Un refus qui en dit long sur les priorités politiques ? Après lui avoir adressé plusieurs courriers depuis le mois de juillet dernier, la CGT-chômeurs (1) a, le 23 octobre, demandé un entretien avec Christine Lagarde, ministre de l'Emploi, qui lui a opposé une fin de non recevoir. Un signe de « mépris du gouvernement » à l'égard des sans-emploi, estime François Desanti, secrétaire général de l'organisation, qui dénonce la politique actuelle du traitement du chômage.
Depuis l'été dernier, la CGT-chômeurs alerte les pouvoirs publics sur les radiations « abusives » des listes de l'ANPE, dont le nombre est, selon elle, en augmentation. Parmi les différents motifs de cette sanction, la « non-réponse à convocation » (37 % des radiations) est sujet à litiges. « Aujourd'hui, des chômeurs engagent des procédures, y compris devant le tribunal administratif, parce qu'ils n'ont pas reçu la convocation que l'ANPE refuse d'adresser en recommandé », explique François Desanti. Le syndicat a déposé une cinquantaine de dossiers auprès des tribunaux, dont une quinzaine ont déjà été jugés. Les allocataires concernés ont tous eu gain de cause et ont été rétablis dans leurs droits, l'ANPE n'ayant pas les moyens de prouver que les destinataires ont bien reçu leur convocation. « Mais quel que soit le jugement, il y a toujours pour la personne une période sans ressources », déplore François Desanti. Pour la CGT-chômeurs, qui espère inverser la tendance comme elle l'avait fait pour les « recalculés » en 2004, les décisions des tribunaux administratifs devraient faire jurisprudence : les chômeurs injustement radiés devraient être rétablis dans leurs droits dès qu'ils contestent la décision, sans avoir à en passer par le recours judiciaire. A moins que l'administration n'accepte de recourir aux courriers recommandés.
Autre sujet d'inquiétude : la fusion de l'ANPE avec l'Unedic. « Sur la création d'un guichet unique sous l'égide du service public de l'emploi, tout est à discuter, poursuit François Desanti. Mais créer une institution qui serait à la fois organisme payeur et placeur, juge et partie, est une décision politique qui ne peut pas être prise sans mesurer les effets désastreux qu'elle pourrait avoir sur les chômeurs. » De même, le syndicat craint une confusion des missions des agents de l'ANPE et une transformation de leur mission d'origine - « aider au reclassement des chômeurs » - vers le contrôle et la sanction.
Cette logique de « contrôle renforcé », combinée au durcissement de la politique de l'immigration, a abouti à une autre mesure vivement critiquée par la CGT-chômeurs, ainsi que par plusieurs syndicats de l'ANPE : l'obligation pour les agents de l'ANPE et des Assedic de transmettre systématiquement aux préfectures les copies des titres de séjour et de travail des étrangers s'inscrivant comme demandeurs d'emploi (voir ce numéro, page 14). Pour sa part, FO-ANPE a, le 16 octobre, saisi la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité, considérant que cette mesure constitue « une discrimination flagrante dans le traitement de l'inscription des demandeurs d'emploi en raison de leur pays d'origine ».
Seule satisfaction, estime la CGTchômeurs : la reconduction de la prime de Noël, « un acquis social » même si le maintien de son budget est réexaminé chaque année. Pour autant, elle juge son montant insuffisant (152,45 € pour une personne seule) et souhaiterait qu'elle soit versée à toutes les personnes privées d'emploi, et non pas aux seuls bénéficiaires des minima sociaux. Avec les trois autres organisations de chômeurs, AC !, l'APEIS (Association pour l'emploi, l'information et la solidarité) et le MNCP (Mouvement national des chômeurs et précaires), elle prévoit une mobilisation nationale le 8 décembre sur le traitement des demandeurs d'emploi. Le mot d'ordre : « Ce n'est pas aux chômeurs qu'il faut s'atta-quer, mais au chômage ».
(1) CGT-Chômeurs : 263, rue de Paris - 93100 Montreuil - Tél. 01 48 18 85 44.