Médecins du monde tire une nouvelle fois la sonnette d'alarme. En un an, le nombre de consultations dans ses 21 centres d'accueil, de soins et d'orientation (CASO) - près de 40 000 pour un peu moins de 25 000 patients différents - a chuté de 16 %, explique l'association dans le VIIe rapport annuel de l'Observatoire de l'accès aux soins de sa mission France (1). Une diminution qui ne s'explique pas par une amélioration de l'accès aux soins, comme cela avait été le cas après la mise en place de la couverture maladie universelle (CMU). Il s'agit plutôt du « signe d'un contexte répressif qui entretient les patients en situation irrégulière dans la peur de se déplacer pour recourir aux soins ».
De fait, 56 % des patients étrangers se présentant dans ses centres sont en France depuis moins de un an, le quart depuis moins de trois mois et 23 % depuis au moins trois ans. Près de 20 % des patients sont à la rue, 41 % déclarent vivre dans un logement précaire et 18 % des mineurs sont sans logement. Dans 39 % des cas, un problème de santé nécessitant une prise en charge à moyen ou long terme a été diagnostiqué et, dans 15 % des situations, une pathologie chronique potentiellement grave en l'absence de soins (hypertension, diabète, hépatites virales, infection au VIH, syndrome de stress post-traumatique...). Pour autant, le recours tardif aux soins est constaté dans 13 % des consultations.
Un retard d'autant plus fréquent quand les droits à une couverture maladie ne sont pas ouverts. En théorie, près de 80 % des personnes rencontrées peuvent en bénéficier : 55 % relèvent de l'aide médicale de l'Etat (AME) et 24 % de l'assurance maladie (sécurité sociale, CMU). 20 % ne peuvent bénéficier d'aucun dispositif, notamment parce qu'ils ne peuvent justifier d'une résidence d'au moins trois mois sur le territoire. Cette proportion de « sans droits » - qui n'était que de 9 % en 2001 - est en hausse constante depuis six ans.
Parmi ceux qui pourraient bénéficier d'une couverture maladie, 82 % n'ont pas de droits ouverts quand ils se présentent en consultation, proportion qui s'élève à 93 % pour ceux qui relèvent de l'AME.
L'obligation de domiciliation, remarque de nouveau Médecins du monde, reste l'un des principaux obstacles à l'effectivité des droits. En 2006, 52 % des patients ne pouvaient fournir de justificatif de domicile le jour de leur première consultation. Parmi eux, 80 % n'avaient pas obtenu de domiciliation. En 2000, ils étaient seulement 45 % dans ce cas.
D'autres obstacles interviennent également : outre la crainte d'être interpellés pour les patients sans titre de séjour, les demandes d'avance de frais ou les dépassements d'honoraires (37 %), la méconnaissance des dispositifs, les difficultés administratives et la barrière linguistique. Les refus de soins, difficiles à mesurer chez les patients de Médecins du monde parce qu'ils sont rencontrés avant l'ouverture des droits, constituent également une réalité, rappelle l'association, à l'appui de l'enquête qu'elle a réalisée début 2006 (2). Cette dernière avait révélé que près de 40 % des médecins refusaient les soins aux bénéficiaires de l'AME et 10 % à ceux de la CMU. A partir d'une enquête complémentaire menée en novembre 2006 pour identifier les motifs de refus de soins aux patients relevant de l'AME, Médecins du monde suggère quatre « stratégies » pour remédier à cette discrimination : l'information des médecins, la simplification des procédures administratives, la mise en place d'un système de repérage des praticiens « au comportement non éthique » et la mise en place de sanctions disciplinaires.
Au-delà, l'association réitère ses souhaits pour améliorer l'accès aux soins : intégrer l'AME dans la CMU, protéger et régulariser les étrangers gravement malades et généraliser les PASS (permanences d'accès aux soins de santé), qui ne sont que 369, alors que 500 avaient été prévues par la loi de 1998 de lutte contre les exclusions. De plus, une très grande majorité de ces permanences « ne répond pas au cahier des charges », souligne l'association.
Les premières « Assises nationales des formations sociales et du développement social » se tiendront les 10 et 11 mars 2008 à la Sorbonne, à Paris. Les « ASH » s'associent à cette initiative des deux fédérations d'organismes de formation, l'Aforts et le GNI, et du « Journal de l'action sociale », également soutenue par l'Assemblée des départements de France et l'Association des régions de France.
(1) Rapport 2006 de l'Observatoire de l'accès aux soins de la mission France de Médecins du monde - Médecins du monde : 62, rue Marcadet -75018 Paris - Tél. 01 44 92 13 87.