Recevoir la newsletter

Accueil d'urgence des sans-papiers : le gouvernement cherche une porte de sortie

Article réservé aux abonnés

Adopté sans faire de bruit par l'Assemblée nationale, l'article 21 du projet de loi relatif à la maîtrise de l'immigration, à l'intégration et à l'asile - qui concerne l'hébergement d'urgence - est passé moins inaperçu lors de son examen au Sénat. En effet, depuis son passage au Palais du Luxembourg, la controverse n'a pas cessé d'enfler autour de cette disposition, accusée par les associations de remettre en cause l'accueil des sans-papiers en hébergement d'urgence. Durant les jours qui ont suivi l'adoption par les sénateurs, le 5 octobre, d'une version à peine remaniée de l'article décrié, le gouvernement a tenté de mettre fin à la polémique en promettant, par la voix du Haut Commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, Martin Hirsch, que les conditions actuelles d'accueil des personnes sans papiers dans les centres d'hébergement d'urgence seraient maintenues en tout état de cause. Sans garantir toutefois la suppression pure et simple de l'article 21, en renvoyant l'issue à la commission mixte paritaire (CMP) prévue le 16 octobre.

Ce que dit désormais l'article 21

Comme pour le recours aux tests ADN dans le cadre du regroupement familial (voir ci-contre), c'est un amendement du député (UMP) Thierry Mariani qui se trouve à l'origine de la disposition controversée. Il propose de modifier l'article 4 de la loi du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable (DALO), qui prévoit que toute personne accueillie dans une structure d'hébergement d'urgence doit pouvoir y demeurer, dès lors qu'elle le souhaite, jusqu'à ce qu'une orientation lui soit proposée (orientation vers une structure d'hébergement stable ou de soins, ou vers un logement, adaptés à sa situation). L'amendement Mariani a ainsi ajouté une condition en prévoyant que l'intéressé pourrait dès lors qu'il le souhaite « et qu'[il] peut justifier de la régularité de son séjour » demeurer dans le centre d'urgence en attendant une orientation. Après avoir, dans un premier temps, supprimé l'article 21 en commission des lois devant la colère des grandes associations caritatives, les sénateurs ont finalement décidé, après une longue discussion en séance plénière, de le maintenir, se contentant de changer de place certains termes. Ainsi, le texte adopté le 5 octobre dispose que toute personne accueillie dans une structure d'hébergement d'urgence doit pouvoir y demeurer, dès lors qu'elle le souhaite, jusqu'à ce qu'une orientation lui soit proposée « si elle peut justifier de la régularité de son séjour sur le territoire ». Une manière de déplacer la condition de régularité au niveau de l'orientation, a expliqué le sénateur (UMP) Jean-Jacques Hyest, et d'affirmer ainsi dans la loi qu'une personne sans papiers ne peut faire valoir un droit à un hébergement au titre de la loi DALO (1). Une « rédaction entortillée qu'on peut comprendre dans tous les sens », a dénoncé, de son côté, le sénateur (PS) Louis Mermaz. Même réaction du côté des associations, pour qui la nouvelle mouture du texte n'a levé en aucun cas les inquiétudes.

« Le texte pose problème », reconnaît Martin Hirsch

Mal à l'aise, le gouvernement a réagi dès le lendemain de l'adoption du texte. Tout d'abord par la voix de Martin Hirsch, qui a reconnu sur Europe 1 que « le texte tel qu'il a été voté pose problème ». Puis par le biais d'un « communiqué conjoint » de Brice Hortefeux, Christine Boutin et Martin Hirsch, admettant que la portée de la modification apportée à l'article 4 de la loi DALO devait être précisée « afin d'éviter les malentendus ». Par la suite, sans attendre le passage du texte en CMP, le Haut Commissaire a reçu le 8 octobre, en compagnie de membres des cabinets des ministres de l'Immigration, du Logement et des relations avec le Parlement, les représentants de plusieurs grandes associations de lutte contre les exclusions (2). Ces derniers espéraient obtenir la suppression pure et simple de l'article 21. Ils n'auront donc pas obtenu d'assurance ferme en ce sens, Martin Hirsch indiquant simplement que le gouvernement s'engageait à ce que l'hébergement d'urgence reste « inconditionnel » et qu'il ferait part aux parlementaires de la demande de suppression formulée par les associations. Cet engagement « est sur le fond et les principes, mais pas sur la suppression » de l'article, a ajouté le Haut Commissaire. En effet, les modalités précises de modification ou de suppression de la disposition controversée « appartiennent à la CMP ». Les associations, qui souhaitent maintenir leur mobilisation jusqu'à la réunion de la commission mixte paritaire, comptent faire, en attendant, un travail de lobby auprès des députés et des sénateurs qui y siégeront.

Notes

(1) Rappelons que la loi DALO a institué un droit opposable - c'est-à-dire garanti par une possibilité de recours juridictionnel devant un juge administratif - non seulement au logement, mais aussi à l'hébergement (voir ASH n° 2496 du 2-03-07, p. 21). Toutefois, alors que le droit au logement d'un étranger a été subordonné à une double condition de régularité et de stabilité de son séjour en France, tel n'a pas été le cas du droit à l'hébergement. Les parlementaires de la majorité cherchent ainsi un moyen de subordonner l'opposabilité du droit à l'hébergement à une condition de régularité (mais non de stabilité), tout en se défendant de vouloir refuser l'hébergement d'urgence à des étrangers en situation irrégulière.

(2) La Fondation Abbé-Pierre, le Secours catholique, les Petits frères des pauvres, Emmaüs France, la Fédération nationale des associations d'accueil et de réinsertion sociale et l'Armée du salut.

LE SOCIAL EN TEXTES

S'abonner
Div qui contient le message d'alerte
Se connecter

Identifiez-vous

Champ obligatoire Mot de passe obligatoire
Mot de passe oublié

Vous êtes abonné, mais vous n'avez pas vos identifiants pour le site ?

Contactez le service client 01.40.05.23.15

par mail

Recruteurs

Rendez-vous sur votre espace recruteur.

Espace recruteur