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« La garantie des risques locatifs ne doit pas être qu'un cadeau aux bailleurs »

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Si la nouvelle garantie des risques locatifs, baptisée PASS-GRL (voir ce numéro, page 5), affiche des ambitions généreuses, encore faut-il qu'elle s'applique bien aux locataires les plus fragiles et n'aggrave pas la situation de certains d'entre eux, prévient Christophe Robert, directeur des études à la Fondation Abbé-Pierre (1).
Comment accueillez-vous cet outil ?

Nous y sommes bien sûr globalement favorables. Le Loca-pass a permis aux salariés éligibles au 1 % logement d'obtenir une avance du dépôt de garantie et une caution en cas d'impayés de loyer, pendant les trois premières années du bail et sur une période de 18 mois. Le PASS-GRL va plus loin : il fonctionne comme une assurance souscrite par le bailleur sans limitation dans le temps et vise un public plus large. On ne peut que se réjouir de voir les partenaires sociaux du 1 % logement et l'Etat prendre à bras le corps le problème d'accès au logement de publics fortement fragilisés. Le dispositif répond à un besoin urgent, né du décalage entre un marché de l'emploi qui se précarise et un marché du logement très rigide, qui reste fermé à beaucoup de personnes pourtant solvables.

Quel est l'aspect le plus novateur ?

Ce n'est pas simplement un système d'assurance pour les bailleurs. Un accompagnement social assuré par l'APALG (Association pour l'accès aux garanties locatives), gérée paritairement, est prévu. Au bout de 15 jours d'impayé de loyer, celle-ci procède à une analyse sociale et budgétaire de la situation du locataire et peut lui proposer un plan de recouvrement amiable. Cette démarche préventive est intéressante : on constate, en effet, un accroissement des difficultés des ménages en raison de chutes brutales de revenus liées à la perte d'emploi ou à des changements de situation familiale. En outre, dans les départements où ils existent, les dispositifs de prévention des expulsions permettent, dans bien des cas, d'éviter des mises à la rue dramatiques.

Le locataire est dispensé de fournir une caution...

La caution - personne physique ou morale - est remplacée par le Fonds de garantie universelle des risques locatifs créé la loi du 5 mars 2007 sur le droit au logement opposable. On ne peut que s'en réjouir, la caution est un écueil considérable, notamment pour les personnes à faibles revenus. En même temps, on l'a bien vu avec le Loca-pass qui a prévu aussi cette dispense, les bailleurs exigent parfois des garanties complémentaires, pas toujours légales : fiches de paye sur plusieurs mois avec un revenu largement supérieur aux besoins pour couvrir le loyer, informations sur les comptes des proches, etc. Il faudra vérifier que ce nouveau système de garantie soit effectivement exclusif.

Le dispositif se veut universel...

Contrairement au Loca-pass qui ne concerne que 60 % des publics fragiles, le PASS-GRL prétend en effet couvrir un nombre plus important de locataires indépendamment de leur statut, y compris les chômeurs et les titulaires de minima sociaux. Si l'UESL (Union d'économie sociale pour le logement) compensera les risques d'impayés des personnes éligibles au 1 % logement - soit ceux qui bénéficiaient déjà du Loca-pass -, l'Etat se chargera des autres publics. Mais quelle garantie avons-nous qu'il ne resserrera pas la cible de bénéficiaires dans le cadre des arbitrages de la loi de finances ? Par ailleurs, seuls les logements du parc privé conventionné ou ceux pour lesquels le propriétaire en fait la demande sont concernés. L'universalité n'est donc pas encore une réalité.

Vos autres réserves ?

Le loyer maximum retenu est de 2 300 par mois, renvoyant ainsi à des niveaux de revenus qui couvrent la quasi-totalité des ménages en France ! Il faudra nous assurer que cette ouverture par le haut n'entraîne pas une fermeture par le bas et une exclusion des plus fragiles (2). Quant au taux d'effort du locataire, il peut atteindre jusqu'à 50 % des ressources du ménage ! Pourtant aucune banque n'accorde de prêt à l'accession à la propriété au-dessus de 33 % et, dans le locatif, on considére que 25 % est un taux raisonnable. En acceptant des niveaux de dépenses liées au logement trop importants, on risque d'aggraver les situations de certaines familles. Celles-ci se restreignent alors sur les dépenses d'alimentation et de santé.

Votre sentiment général ?

Ce dispositif apparaît comme un cadeau offert aux propriétaires avec des primes d'assurance intéressantes (3). Nous serons très vigilants à ce qu'il soit gagnant-gagnant, pour les bailleurs et pour les publics fragiles.

Notes

(1) Fondation Abbé-Pierre : 3/5, rue de Romainville - 75019 Paris - Tél. 01 55 56 37 00.

(2) Droit au logement (DAL) craint également que ce « dispositif généraliste et privatisé » pénalise les locataires modestes et qu'en cas de difficulté, les compagnies d'assurance accélèrent les procédures d'expulsion.

(3) 1,8 % ou 2,5 % TTC du loyer annuel (charges comprises) selon que le bailleur passe ou non par un agent immobilier.

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