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Restrictions au regroupement familial et aménagement de la procédure d'asile au coeur d'un nouveau projet de loi

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Annoncé par le candidat Sarkozy et préparé par son équipe de campagne avant même son élection, le nouveau projet de loi sur l'immigration, l'intégration et l'asile a été présenté le 4 juillet en conseil des ministres par le ministre de l'Immigration, de l'Intégration, de l'Identité nationale et du Codéveloppement, Brice Hortefeux. Il s'agit du quatrième texte en quatre ans sur l'immigration après la loi « Villepin » sur l'asile de 2003 (1) et les deux lois « Sarkozy » de 2003 (2) et 2006 sur la maîtrise des flux migratoires (3).

Tour de vis supplémentaire sur l'immigration familiale

Le texte, qui comporte 14 articles, s'attaque en premier lieu au regroupement familial, que le gouvernement souhaite restreindre en en durcissant encore les conditions.

Le projet de loi oblige ainsi tout ressortissant étranger de plus de 16 ans pour lequel le regroupement familial est sollicité à passer, dans son pays de résidence, une évaluation de son degré de connaissance de la langue et des valeurs de la République ». Le cas échéant, « si le besoin en est établi », il devra suivre une formation d'une durée maximale de deux mois - organisée par l'autorité administrative à son intention -, avant d'obtenir « une attestation de suivi » indispensable pour espérer bénéficier du regroupement familial. Un dispositif similaire est prévu pour le conjoint de Français désireux d'obtenir un visa de long séjour. Il devrait ainsi bénéficier, dans son pays de résidence, de la même évaluation et là encore, si le besoin en est établi, aurait à suivre une formation d'une durée maximale de deux mois organisée par les autorités diplomatiques et consulaires. Le visa ne devrait pouvoir être délivré qu'au vu d'une attestation de suivi de cette formation (4).

Les revenus nécessaires pour faire venir sa famille dans le cadre du regroupement familial devraient, en outre, être augmentés. Le projet fait en effet varier le montant des ressources en fonction du nombre de membres que comptera la famille en France. Et propose de retenir comme plancher le SMIC mensuel et comme plafond 1,2 fois ce plancher (5).

Le texte entend par ailleurs imposer à l'étranger admis au séjour en France et à son conjoint de veiller, si un ou plusieurs de leurs enfants ont bénéficié de la procédure de regroupement familial, à « l'intégration républicaine de la famille dans la société française ». Et ce à travers la conclusion, avec l'Etat, d'un contrat d'accueil et d'intégration pour la famille, « par lequel ils s'obligent à suivre une formation sur les droits et les devoirs des parents en France ». Un non-respect de ce contrat pourrait aboutir in fine à une « mise sous tutelle, au bénéfice des enfants, des allocations familiales », a souligné le porte-parole du gouvernement, Laurent Wauquiez. Le projet de loi va ainsi plus loin que la loi du 24 juillet 2006 relative à l'immigration et à l'intégration, qui a rendu obligatoire la signature d'un contrat d'accueil et d'intégration à l'arrivée en France pour l'obtention d'un premier titre de séjour et de la carte de résident.

Le gouvernement compte par ailleurs profiter du nouveau texte pour abroger le dernier alinéa de l'article L. 211-2-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile issu de la loi du 24 juillet 2006 qui, explique l'exposé des motifs, « s'est révélé malaisé à appliquer ». Cette disposition ouvre la possibilité à l'étranger entré régulièrement en France, marié en France avec un Français et séjournant en France depuis plus de six mois avec son conjoint, de demander et d'obtenir un visa de long séjour. Une fois cette mesure supprimée, ceux des nouveaux conjoints de Français qui sont titulaires d'une carte de séjour temporaire, comme étudiant ou visiteur par exemple, devraient pouvoir changer de statut sans avoir à solliciter un visa de long séjour. « L'étranger en situation irrégulière qui épouse en toute bonne foi un ressortissant français et se trouve dans l'impossibilité évidente de faire l'aller et retour avec son pays d'origine pour y solliciter un visa de long séjour pourra solliciter une admission exceptionnelle au séjour. »

Le projet de loi vient encore préciser que l'insertion dans la société française - qui fait partie des critères d'appréciation utilisés pour statuer sur le cas de l'étranger sollicitant son admission au séjour en vertu de ses liens personnels et familiaux en France - est évaluée en tenant compte notamment de son degré de connaissance de la langue et des valeurs de la République.

De nouvelles mesures en matière d'asile

Le texte réforme par ailleurs la procédure d'asile à la frontière. Cela afin de prendre acte de la récente condamnation de la France par la Cour européenne des droits de l'Homme (CEDH), qui lui reprochait de ne pas octroyer un recours suspensif de plein droit aux étrangers placés en zone d'attente dont la demande d'asile à la frontière a été refusée (6). Les intéressés devraient ainsi avoir 24 heures à compter de la notification du refus d'asile pour déposer un tel recours. Le projet de loi prévoit que le juge pourra se dispenser d'une procédure contradictoire en rejetant le recours par une ordonnance motivée, notamment si la requête est entachée d'une irrecevabilité manifeste ou est manifestement infondée. Pour tenir compte des délais supplémentaires induits par le recours suspensif, la durée de maintien de l'étranger en zone d'attente fixé par la dernière décision de maintien devrait être prorogée d'office de quatre jours. Le recours devrait être exclusif de tout autre recours et notamment d'un référé.

Le projet de loi tire par ailleurs les conséquences de la définition des attributions du ministre de l'Immigration, de l'Intégration, de l'Identité nationale et du Codéveloppement - qui s'étendent à l'asile - en plaçant l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) auprès de ce dernier et non plus auprès du ministre des Affaires étrangères. C'est ainsi à Brice Hortefeux que reviendra le soin de proposer la nomination du président du conseil d'administration de l'instance. Le nouveau ministère remplace également le Quai d'Orsay pour ce qui concerne l'archivage des dossiers des demandeurs d'asile dont la demande a été définitivement rejetée. Enfin, le ministère des Affaires étrangères devrait partager avec le ministre de l'Immigration le pouvoir de proposer la nomination du directeur général de l'OFPRA.

Dispositions diverses

Parmi les autres dispositions, on notera notamment que le texte vient faciliter le recours à des moyens de télécommunication audiovisuelle par le juge des libertés et de la détention. Et ce, « afin de diminuer le nombre des transferts qui peuvent être contraires à la dignité des étrangers concernés », explique l'exposé des motifs. Actuellement, les auditions de ce type ne sont possibles qu'avec le consentement de l'étranger. Elles pourraient désormais être décidées par le seul juge, sur proposition de l'autorité administrative, sans que le consentement de l'intéressé soit nécessaire.

S'agissant de l'immigration de travail, entre autres mesures, le texte complète la loi du 24 juillet 2006 en précisant que la nouvelle carte de séjour portant la mention « salarié en mission » est délivrée à son titulaire « sans que lui soit opposable la situation de l'emploi ». Actuellement, l'administration dispose en effet du pouvoir d'apprécier l'opportunité de la venue en France de salariés étrangers en fonction de cette situation de l'emploi. Ce pouvoir d'appréciation serait donc supprimé à l'instar de ce qui existe pour les candidats à la délivrance d'une carte portant la mention « compétences et talents ».

Notes

(1) Voir ASH n° 2340 du 2-01-04, p. 29.

(2) Voir ASH n° 2336 du 5-12-03, p. 15 et n° 2338 du 19-12-03, p. 17.

(3) Voir ASH n° 2477-2478 du 10-11-06, p. 23 et n° 2479 du 17-11-06, p. 19.

(4) Ces dispositions relatives à la connaissance de la langue et de la culture françaises inquiètent tout particulièrement les associations - Voir en dernier lieu ASH n° 2513 du 22-06-07, p. 33.

(5) Soit, depuis le 1er juillet, 1 536, 08 € (montant calculé par la rédaction).

(6) Voir ASH n° 2506 du 4-05-07, p. 12.

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