Comment réduire la pauvreté ? Faciliter l'intégration sur le marché du travail ? Accroître l'efficience du système éducatif ? Relever le défi du vieillissement de la population ?... Dans son « étude économique 2007 » sur la France (1), l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) apporte aux responsables politiques français des pistes, dont la plupart rejoignent celles esquissées par Nicolas Sarkozy.
Pour l'OCDE, la première priorité du nouveau gouvernement de François Fillon doit être de renforcer significativement l'emploi, ce qui aurait un effet bénéfique sur la pauvreté, l'exclusion sociale et les finances publiques. Et l'un des objectifs clé est d'améliorer l'utilisation de l'ensemble des ressources, en particulier dans le secteur public, pour s'attaquer d'une façon plus efficace aux problèmes sociaux et atteindre « une meilleur soutenabilité des finances publiques à long terme ». Ce qui appelle de nouvelles réformes, après, notamment, celles des retraites de 2003 et de l'assurance maladie de 2004.
Pour stimuler l'emploi peu qualifié, le SMIC devrait croître à un « rythme beaucoup plus faible dans les prochaines années, au minimum en évitant les «coups de pouce» », préconise l'OCDE. Selon elle, « utiliser la prime pour l'emploi [...] et concentrer plus directement sur les familles pauvres » est une stratégie plus efficace contre la pauvreté que des hausses du SMIC couplées à de nouveaux allégements de charges. Autre enjeu important : limiter la dualité du marché du travail, où cohabitent des salariés protégés (titulaires de contrats à durée indéterminée) et des chômeurs ou travailleurs en situation précaire. Ce qui suppose de revoir la législation sur la protection de l'emploi, dans un sens qui faciliterait également les transitions sur le marché du travail, et donc de « réformer les institutions et les pratiques rigides du marché du travail ». L'une des options - à laquelle le président de la République est d'ailleurs favorable, mais qui est loin de faire consensus (2) - serait d'introduire un contrat de travail unique qui assure une protection augmentant avec l'ancienneté dans l'entreprise et qui maintienne le contrôle judiciaire sur le caractère non abusif du licenciement, tout en laissant l'employeur, pour le reste, seul juge de la pertinence économique de la décision de se séparer d'un ou de plusieurs de ses salariés. Mais cette solution pourrait aboutir à moins de flexibilité qu'actuellement, ce qui n'est pas souhaitable pour l'OCDE. Restent alors d'autres possibilités, moins ambitieuses, qui passent par la recherche de nouveaux moyens pour assouplir la réglementation du contrat à durée indéterminée, objectif qui pourrait être atteint, par exemple, « en élargissant la définition du licenciement économique, en simplifiant les procédures de licenciement et en allégeant les obligations de reclassement imposées aux entreprises ».
Autre anomalie pointée par le rapport : le faible taux d'emploi au-delà de 55 ans en France. Pour y remédier, l'OCDE plaide pour l'abrogation des dispositifs qui incitent à une retraite anticipée, et considère donc qu'il nécessaire de mettre fin à la dispense de recherche d'emploi pour les seniors et à l'exonération fiscale des indemnités de départ à la retraite. Pour l'instance, il est également important : d'harmoniser les droits et les obligations des personnes sans emploi potentiellement actives ; de mettre en place un système commun d'aide au retour à l'emploi ; d'instaurer une obligation de recherche d'emploi et de cibler ces actions sur les personnes qui en ont le plus besoin - et non pas en fonction de la prestation particulière dont elles bénéficient. Cette harmonisation exige, selon elle, un système dans lequel une seule institution serait chargée de tous les dispositifs, ce qui serait plus facile « si l'organisme responsable des services de placement des chômeurs, l'ANPE, était mieux coordonné et à terme fusionné avec celui de l'assurance chômage, l'Unedic ».
Un autre enjeu majeur pour le nouveau gouvernement est de doper les résultats du système éducatif, ce qui suppose déjà de pouvoir les mesurer correctement. D'où la proposition de l'OCDE d'améliorer les indicateurs de « valeur ajoutée » qui sont rendus publics pour les lycées et de les étendre aux collèges.
Il faudrait aussi, selon elle, mettre en place une sélection explicite pour l'entrée à l'université, et l'inscription à des cours universitaires dispensés gratuitement ne devrait pas être autorisée « si l'université considère que la probabilité de réussite est très faible ». Par ailleurs, des droits de scolarité plus élevés pourraient permettre d'améliorer la qualité de l'enseignement supérieur. « Il faudrait augmenter [ces droits] progressivement, mais nettement, en les fixant à un niveau proportionnel, bien qu'inférieur au coût des cours », soutient dès lors l'OCDE, qui ajoute que « l'équité dans l'accès à l'éducation supérieure pourrait être assurée grâce à un système de prêts remboursables en fonction du revenu futur, auquel viendraient s'ajouter le cas échéant des bourses ».
Autre question délicate : comment financer le coût du vieillissement démographique au titre de la santé, de la dépendance et des retraites ? Après les progrès accomplis avec la réforme des retraites de 2003, il est maintenant indispensable d'accroître l'emploi des seniors et de persévérer en 2008 dans cet effort de réduction des coûts « en préservant l'indexation de la durée de cotisation sur l'espérance de vie comme prévu par la loi de 2003 », estime l'OCDE, qui juge cette solution, et/ou une diminution du taux de remplacement, préférable à un relèvement des cotisations. D'autre part, elle recommande d'engager immédiatement un processus d'élimination progressive des privilèges des régimes spéciaux des salariés des entreprises actuellement ou anciennement publiques, épargnés jusqu'à présent par les réformes.
(1) Synthèse disponible sur
(2) Voir en dernier lieu ASH n° 2513 du 25-06-07, p. 7.