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Lutte contre la récidive : la défenseure des enfants plaide pour un large maintien de l'excuse de minorité

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Le projet de loi renforçant la lutte contre la récidive des majeurs et des mineurs (1) « renforce la répression de la récidive pour les mineurs, par parallélisme au droit des majeurs, sans réellement tenir compte de la spécificité de la justice des mineurs (réponses judiciaires progressives et adaptées) », déplore la défenseure des enfants dans un avis du 27 juin (2). Un constat d'ailleurs partagé par les professionnels du secteur (voir réactions, page 49). Dominique Versini a ainsi adressé à la garde des Sceaux des propositions d'aménagement du texte tenant compte de la Convention internationale des droits de l'enfant (CIDE) du 20 novembre 1989, mais « sans méconnaître la gravité de certains actes de délinquance commis par des mineurs ».

La défenseure des enfants s'inquiète tout d'abord de la disposition selon laquelle, dès la première récidive, le mineur s'exposerait à une peine égale à la moitié des peines planchers prévues pour les majeurs récidivistes. Cela pose « la question de l'élément juridique permettant de caractériser cette récidive, compte tenu des conséquences pénales aggravées prévues par le texte ». Aussi suggère-t-elle que les « mesures éducatives (admonestation, par exemple) et les sanctions éducatives (mesure de réparation, interdiction de paraître dans le magasin où le vol a été commis, par exemple), qui sont prononcées pour des faits d'une moindre gravité, [ne constituent pas] le premier terme pour retenir la récidive légale à l'encontre d'un mineur ». En conséquence, il conviendrait, selon elle, de « préciser que seules les sanctions pénales peuvent constituer le premier terme de récidive retenue pour les mineurs ». Une proposition à laquelle la ministre de la Justice n'est « pas hostile », selon une lettre qu'elle a adressée le 29 juin à Dominique Versini, après avoir pris connaissance de son avis.

La défenseure des enfants s'est également penchée sur la possibilité pour les magistrats, en cas de deuxième récidive, de prononcer une peine inférieure à la peine minimale en motivant leur décision sur la base de « garanties exceptionnelles d'insertion ou de réinsertion ». « Cette motivation spéciale, qui peut se concevoir pour des majeurs en mesure de présenter des garanties d'insertion professionnelle durable, apparaît particulièrement difficile à satisfaire pour les mineurs de 16 à 18 ans pour lesquels il n'est pas envisageable - au regard de la CIDE - de ne pas tenir compte des circonstances de fait et de la personnalité du mineur, même en situation de deuxième récidive », explique Dominique Versini. En réponse à cet argument, Rachida Dati lui a assuré que la demande et le contenu de ces garanties « relèvent de l'appréciation souveraine de la juridiction de jugement » et que, par définition, cette appréciation de pur fait ne sera pas contrôlée par la Cour de cassation.

Toujours au sujet des mineurs de plus de 16 ans, le projet de loi, pour certains crimes et délits commis en deuxième récidive, écarte le régime plus favorable de l'excuse de minorité, en exposant ainsi les mineurs aux mêmes peines que les majeurs récidivistes. Le juge ne pourra rétablir l'excuse de minorité qu'en motivant spécialement sa décision, « ce qui va à l'encontre de la CIDE qui pose comme principe que tout enfant de moins de 18 ans doit bénéficier d'une justice adaptée à son âge en tenant compte du fait que sa personnalité est en cours d'élaboration », indique la défenseure des enfants. Qui recommande donc de « s'en tenir aux dispositions actuelles qui permettent déjà au juge - dans des situations qu'il détermine lui-même - d'écarter l'excuse atténuante de minorité en fonction de la gravité des faits ou de la personnalité du mineur ». Rachida Dati justifie cette disposition au motif que « certains mineurs, particulièrement ceux à qui sont imputables des actes de violences aux personnes, doivent faire l'objet de sanctions empreintes de fermeté, de nature structurante et fondées sur la responsabilité individuelle des intéressés. Ces sanctions constituent aussi un rappel salutaire des limites à ne pas franchir ». Globalement, la ministre considère que « l'absence de tout automatisme dans l'application des peines minimales [...] paraît garantir la conformité du projet [de loi sur la récidive] avec la CIDE : il repose sur une appréciation judiciaire et individualisée de chaque mineur ».

Dominique Versini rappelle en outre que, avant la fin 2007, la France devra présenter le bilan de ses actions en matière de droits de l'enfant au Comité des Nations unies. Document qui devra faire apparaître la suite donnée aux recommandations qu'il a émises en 2004 après avoir constaté que la législation française favorisait la répression au détriment des mesures éducatives. « Il est à prévoir que le texte en discussion, s'il devait être voté en l'état, ferait l'objet de nouvelles critiques », estime la défenseure des enfants. Ce à quoi la garde des Sceaux répond qu'elle est « très attachée au strict respect par la France de ses engagements internationaux et au primat de l'éducatif sur le répressif ».

Pour conclure, la défenseure des enfants recommande d'engager « sans tarder une réflexion approfondie avec l'ensemble des professionnels concernés dans une approche pluridisciplinaire (éducation, santé, social, justice...) permettant de construire une nouvelle stratégie sur cette question fondamentale de société qui concerne l'avenir de nos enfants ».

Notes

(1) Voir ASH n° 2512 du 15-06-07, p. 5.

(2) Disponible sur www.defenseurdesenfants.fr.

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