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La réforme des mesures de protection juridique des majeurs

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Meilleure prise en compte de la personne du majeur protégé, réaffirmation des principes de nécessité, de subsidiarité et de proportionnalité qui doivent sous-tendre toute mesure de protection, création du mandant de protection future, harmonisation et simplification de la tutelle et de la curatelle. Ainsi peuvent se résumer les principales avancées de la loi du 5 mars 2007 concernant les mesures de protection juridique des majeurs.

Selon le code civil, à sa majorité - fixée à 18 ans -, chacun est capable d'exercer la jouissance de ses droits. Toutefois, en certaines circonstances - maladie, accident, addictions... -, les majeurs peuvent ne plus être à même de gérer leurs propres biens et risquer de causer des dommages à des tiers.

C'est pour répondre à ces situations que, dès la loi du 3 janvier 1968 portant réforme du droit des incapables, a été mis en place un régime de protection des majeurs, axé sur la préservation du patrimoine des intéressés.

Conçu pour quelques dizaines de milliers de personnes incapables d'assurer leur autonomie, le régime de protection concerne aujourd'hui 700 000 majeurs et 68 000 nouvelles mesures sont prononcées chaque année. A ce rythme, on estime que un million de personnes seront placées sous protection en 2010. Face à cette évolution, une succession de rapports ont souligné, ces dernières années, l'urgence d'une refonte du dispositif, devenu inadapté et très coûteux. Au final, plus de 10 ans de réflexion et de débats auront été nécessaires pour que la loi du 5 mars 2007 portant réforme de la protection juridique des majeurs soit adoptée.

Ce texte, qui modifie profondément le code civil, maintient toutefois, tout en les aménageant, les trois grandes mesures de protection juridique existant jusque-là : la sauvegarde de justice, la curatelle et la tutelle, mesures judiciaires dont les différences tiennent essentiellement aux conséquences qu'elles emportent sur la capacité juridique des personnes protégées.

Mais, à côté, la loi instaure un nouveau mécanisme, cette fois conventionnel : le mandat de protection future qui permet à une personne d'organiser pour l'avenir la gestion, par exemple, de ses biens pour le cas où elle se trouverait un jour dans l'incapacité de l'assurer elle-même. Cette mesure donne corps à l'une des principales avancées de la loi du 5 mars 2007 : la prise en compte de la volonté de la personne et de ses droits. De fait, nombre de dispositions de ce texte ont pour motivation l'intérêt de la personne, et plus seulement celui de ses biens.

Les mesures de protection juridique se distinguent de la mesure d'accompagnement judiciaire - elle aussi créée par la loi du 5 mars 2007 (1), en particulier par les causes qui peuvent justifier leur ouverture : qu'elles soient judiciaires ou conventionnelles, les mesures de protection juridique ne peuvent être ouvertes que pour une cause médicale - l'altération des facultés personnelles de l'intéressé -, tandis que la mesure d'accompagnement judiciaire peut être ordonnée, quel que soit l'état du majeur, pour rétablir son autonomie dans la gestion de ses prestations sociales lorsque les actions mises en place dans le cadre de la mesure d'accompagnement social personnalisé ont échoué.

D'autres principes sous-tendent l'évolution des mesures de protection juridique opérée par la loi du 5 mars 2007. Cette dernière renforce ainsi les principes de nécessité, de subsidiarité et de proportionnalité de la mesure de protection juridique. Elle donne également avec plus de force la priorité à la famille. Enfin, elle accroît les contrôles sur la mise en oeuvre de ces mesures.

A l'instar de la plupart des dispositions de cette loi, ces mesures entreront en vigueur au 1er janvier 2009, le temps pour le gouvernement de prendre les dispositions réglementaires nécessaires et, pour les intéressés, de se familiariser avec les évolutions du texte. Quelques dispositions concernant le mandat de protection future permettent toutefois de prendre les devants dès aujourd'hui.

Le gouvernement doit, par ailleurs, présenter annuellement, à compter du 1er janvier 2010 et jusqu'au 1er janvier 2015, un rapport au Parlement dressant un bilan statistique des évolutions du nombre de mesures judiciaires de protection juridique des majeurs (art. 46 de la loi).

I - LES GRANDS PRINCIPES DE LA PROTECTION DES MAJEURS (art. 7 de la loi)

A - Les principes de nécessité, de subsidiarité et de proportionnalité

La loi du 5 mars 2007 renforce les principes de nécessité, de subsidiarité et de proportionnalité préalables à l'ouverture d'une mesure judiciaire de protection juridique (tutelle, curatelle et sauvegarde de justice).

1 - LE PRINCIPE DE NÉCESSITÉ

La loi consacre d'abord un principe jurisprudentiel repris par le Conseil de l'Europe, la nécessité de la mesure. En effet, depuis longtemps, la Cour de cassation exige du juge, outre la preuve d'une altération des facultés personnelles du majeur, la vérification du besoin de protection.

La loi prévoit, de manière générale et explicite, que « la mesure de protection ne peut être ordonnée par le juge qu'en cas de nécessité » (code civil [C. civ.], art. 428 nouveau). Ce principe est ensuite décliné au travers des définitions des différentes mesures. Ainsi, la personne doit, dans le cas d'une demande de tutelle, avoir besoin d'être « représentée d'une manière continue dans les actes de la vie civile », dans le cas d'une demande de curatelle, avoir besoin d'être « conseillée ou contrôlée dans les actes importants de la vie civile » et, dans le cas d'une demande de sauvegarde de justice, avoir besoin « d'une protection temporaire ou d'être représentée pour l'accomplissement de certains actes déterminés » (C. civ., art. 433 et 440 nouveaux).

2 - LE PRINCIPE DE SUBSIDIARITÉ

De même, une force légale plus forte est conférée au principe de subsidiarité. Actuellement, ce dernier peut se déduire de l'article 498 du code civil qui interdit l'ouverture d'une tutelle si l'application d'un régime matrimonial permet de pourvoir aux intérêts de la personne à protéger.

Généralisant et élargissant cette règle, la loi prévoit que la mesure de protection ne peut être ordonnée par le juge que lorsqu'il ne peut être suffisamment pourvu aux intérêts de la personne protégée par l'application des règles du droit commun de la représentation, de celles relatives aux droits et devoirs respectifs des époux (notamment les devoirs de secours et d'assistance mutuels prévus par l'article 212 du code civil) et des règles des régimes matrimoniaux, par une mesure de protection judiciaire moins contraignante ou encore par le mandat de protection future conclu par l'intéressé (C. civ., art. 428 nouveau).

S'agissant des régimes matrimoniaux, le texte renvoie aux articles 217, 219, 1426 et 1429 du code civil. En effet, lorsque l'un des époux est hors d'état de manifester sa volonté, l'article 217 autorise l'autre époux à demander au juge d'accomplir seul un acte pour lequel le concours ou le consentement de son conjoint serait nécessaire. Il peut s'agir d'un acte de disposition (vente d'un immeuble par exemple) ou d'administration (mise en location du logement familial notamment) portant sur un bien indivis ou commun. Sur le fondement de l'article 219, l'époux peut même demander au juge de l'habiliter à représenter son conjoint, d'une manière générale ou pour certains actes particuliers, dans l'exercice des pouvoirs résultant du régime matrimonial. Enfin, sous le régime de communauté, en application des articles 1426 et 1429, si l'un des époux est hors d'état de manifester sa volonté, l'administration des biens est conférée par jugement à l'autre époux.

Relevons en outre qu'un décret du 29 octobre 2004 portant réforme de la procédure en matière familiale tend à favoriser l'application du droit commun des régimes matrimoniaux à la place de l'ouverture d'une mesure de protection (2).

En tout état de cause, saisi d'une demande d'ouverture d'une mesure judiciaire de protection juridique, le juge devra donc vérifier désormais si les difficultés du majeur ne peuvent pas être réglées par le jeu de ces autres règles.

3 - LE PRINCIPE DE PROPORTIONNALITÉ

Enfin, la loi du 5 mars 2007 introduit un principe de proportionnalité conduisant à adapter la mesure de protection à la situation du majeur. Concrètement, le choix de la mesure devra dépendre du degré d'altération des facultés de la personne à protéger et son contenu devra être individualisé en fonction de cette altération (C. civ., art. 428 nouveau).

Cette exigence est déclinée par plusieurs dispositions de la loi autorisant le juge à adapter le contenu de chaque mesure soit pour en atténuer les effets (curatelle et tutelle allégées), soit, au contraire, pour les aggraver (curatelle renforcée).

B - Une meilleure prise en compte de la protection de la personne

1 - LE PRINCIPE

Consacrant une jurisprudence constante de la Cour de cassation datant de 1989, la loi du 5 mars 2007 affirme que les mesures de protection des majeurs visent aussi bien leur personne que leurs biens (C. civ., art. 415 et 425 nouveaux).

En outre, cette protection est instaurée et assurée dans le respect des libertés individuelles, des droits fondamentaux et de la dignité de la personne.

Elle a pour finalité l'intérêt de la personne protégée et favorise, dans la mesure du possible, l'autonomie de celle-ci. Ces deux objectifs se distinguent par une différence de degré : le premier est absolu tandis que le second devra être respecté « dans la mesure du possible », c'est-à-dire compte tenu de la situation et de l'état de la personne.

Cette dimension n'avait pas été prise en compte en tant que telle par la loi du 3 janvier 1968 qui ne l'a envisagé qu'à travers des questions spécifiques, comme le mariage ou le divorce du majeur. La vision de cette loi était donc patrimoniale, la protection du majeur passant par la préservation de ses biens.

A l'avenir, la mesure sera donc destinée à la protection tant de la personne que de ses intérêts patrimoniaux, s'il n'en est pas disposé autrement. Toutefois, l'article 425 du code civil ouvre au juge des tutelles la possibilité de limiter expressément une mesure à l'une ou l'autre de ces missions.

2 - SA TRADUCTION CONCRÈTE

Dans cet esprit, la loi permet au majeur d'organiser sa protection future au travers du mandat de protection future (voir page 31).

Elle renforce également les droits de la personne dans le cadre de la tutelle et de la curatelle en facilitant le mariage et en prévoyant la possibilité de conclure un pacte civil de solidarité (3).

De manière générale, la loi renforce le droit à la protection du logement et des objets personnels du majeur et impose un droit au maintien des comptes bancaires. Elle instaure par ailleurs un droit à l'audition de la personne protégée avant qu'elle ne soit placée sous une mesure de protection. Et affirme son droit à participer aux décisions la concernant, tout en assortissant ce principe d'exceptions, jugées trop nombreuses par un certain nombre d'associations. Enfin, elle énonce de droit pour le majeur protégé d'entretenir des relations avec ses proches.

a - La protection du logement et des objets personnels

La loi du 5 mars 2007 apporte quelques modifications au régime de protection du logement et des meubles du majeur protégé (C. civ., art. 426 nouveau).

Le maintien à disposition du logement et des meubles

Comme actuellement, les personnes chargées d'administrer le patrimoine du majeur auront l'obligation de maintenir à sa disposition son logement et ses meubles aussi longtemps que possible, c'est-à-dire tant que l'état de l'intéressé autorise son maintien ou son retour dans son domicile. Avec la loi du 5 mars 2007, cette protection portera non seulement sur la résidence principale mais également sur la résidence secondaire. En outre, ne sont plus visés les seuls meubles meublants (meubles destinés à l'usage et à l'ornement des appartements, comme les tapisseries, les glaces, les pendules...), mais tous les meubles.

La loi maintient par ailleurs le principe selon lequel seules des conventions de jouissance précaires sont autorisées. Autrement dit, le logement pourra être loué mais seulement jusqu'au retour du majeur, y compris en cas de dispositions ou stipulations contraires. Ainsi, la réglementation des baux d'habitation (droit au renouvellement, au maintien dans les lieux, durée minimale de bail) n'est pas applicable.

L'exercice des droits relatifs au logement et au mobilier

En revanche, la loi apporte des modifications à la situation dans laquelle il devient nécessaire ou de l'intérêt de la personne protégée d'exercer les droits relatifs à son logement ou à son mobilier.

Dans cette hypothèse, il pourra, comme maintenant, être disposé de ces droits par aliénation (sortie d'un bien ou d'un droit du patrimoine du propriétaire, par vente par exemple). Il pourra en être également ainsi, à l'avenir, par la résiliation ou la conclusion d'un bail

En outre, la procédure permettant de porter atteinte à ces droits est modifiée. En effet, actuellement, l'aliénation doit faire l'objet d'une autorisation spéciale du juge des tutelles après avis du médecin traitant attestant que la personne n'est plus apte à vivre dans son logement. A l'avenir, le pouvoir d'autoriser l'aliénation mais aussi la résiliation ou la conclusion d'un bail sera transféré du juge des tutelles au conseil de famille. Ce n'est qu'à défaut de conseil de famille que l'autorisation sera donnée ou refusée par le juge. Toutefois, cette protection spéciale du bien s'exercera « sans préjudice des formalités que peut requérir la nature des biens ». Ainsi, par exemple, la vente du logement d'une personne sous curatelle requerra, en application du nouvel article 467 du code civil, l'assistance du curateur qui devra apposer sa signature à côté de celle de la personne protégée.

Un avis médical préalable ne sera requis que si la vente, la location ou la résiliation du bail du logement a pour finalité l'accueil de la personne protégée dans un établissement. Il devra être demandé à un médecin choisi sur une liste établie par le procureur de la République, et non plus au médecin traitant. Selon Pascal Clément, ministre de la Justice au moment des débats parlementaires, « si le texte prévoit la consultation d'un médecin inscrit sur une liste, c'est parce que nous nous méfions d'un avis qui pourrait résulter d'une pression exercée par la famille. Rien n'empêche le médecin agréé de demander l'avis du médecin traitant. Mais ce dernier peut avoir une longue histoire commune avec la famille et être de parti pris, ce qu'il faut éviter » (J.O.A.N. [C.R.] n° 5 du 18 janvier 2007, page 404).

Les souvenirs et objets personnels

Les souvenirs et objets personnels demeureront inaliénables et devront être gardés à la disposition de la personne protégée, c'est-à-dire conservés par celle-ci ou remis à un tiers chargé d'en assurer la garde, par exemple l'établissement d'hébergement. Cette règle est en outre étendue aux objets qui sont indispensables aux personnes handicapées ou destinés aux soins des personnes malades.

Le choix de la résidence principale

C'est au majeur protégé qu'il reviendra de choisir le lieu de sa résidence. C'est ici la résidence principale du majeur qui est visée. En cas de difficulté, le juge, ou le conseil de famille s'il a été constitué, statuera (C. civ., art. 459-2 nouveau).

Cette disposition s'applique aux majeurs sous tutelle et curatelle, mais également à ceux ayant établi un mandat de protection future lorsqu'il porte sur la protection de la personne (C. civ., art. 479 nouveau) et à ceux sous sauvegarde de justice lorsqu'est nommé un mandataire spécial (C. civ., art. 438 nouveau).

b - Le droit aux comptes et aux livrets bancaires

Proscrire la pratique, unanimement dénoncée, des comptes « pivot », qui consiste à rassembler sur un seul compte l'ensemble des avoirs des majeurs dont la protection est confiée à une association, sans individualisation possible des intérêts produits. Telle est la finalité du nouvel article 427 du code civil.

La loi du 5 mars 2007 affirme ainsi le droit du majeur protégé de percevoir les fruits, produits et plus-values générés par ses fonds et valeurs, et qui lui reviennent exclusivement. Pour le garantir, elle fait obligation à la personne chargée de sa protection de maintenir les comptes et livrets ouverts en son nom et lui interdit de les modifier ou d'en ouvrir d'autres auprès d'un établissement bancaire. Toutefois, ces comptes et livrets pourront être modifiés si le conseil de famille ou, à défaut, le juge des tutelles l'autorise, et à la condition que l'intérêt du majeur le commande.

Si la personne protégée n'a pas de compte ou de livret, la personne chargée de sa protection devra en ouvrir un.

En outre, le juge ou le conseil de famille pourra ordonner, si la situation de la personne protégée le justifie et même si elle dispose déjà d'un compte, l'ouverture d'un compte en son nom auprès de la Caisse des dépôts et consignations.

Cette obligation de recourir à des comptes bancaires distincts et personnels pour chaque personne protégée s'accompagne d'une obligation d'individualiser les opérations de paiement, d'encaissement et de gestion patrimoniale appartenant au majeur protégé. Ces opérations bancaires devront en effet être exclusivement réalisées au moyen des comptes ouverts au nom du majeur protégé, sauf en cas de mesure confiée aux préposés des établissements de santé et des établissements sociaux et médico-sociaux soumis aux règles de comptabilité publique. Cette dérogation s'explique par la nécessité de respecter les règles spécifiques de la comptabilité publique qui imposent le principe de séparation entre l'ordonnateur - c'est-à-dire celui qui exécute le budget et donne les ordres de paiement ou d'encaissement - et le comptable - qui manie les fonds.

Enfin il est prévu que, si le majeur protégé a fait l'objet d'une interdiction d'émettre des chèques, la personne chargée de la mesure de protection peut, avec l'autorisation du juge, ou du conseil de famille s'il a été constitué, faire fonctionner sous sa signature les comptes dont la personne protégée est titulaire et disposer de tous les moyens de paiement habituels.

Ces obligations s'imposent à tous les régimes de protection juridique. En cas de tutelle, elles sont précisées par des dispositions spécifiques. En effet, à compter du 1er janvier 2009, les capitaux revenant au tutélaire devront être versés directement sur un compte ouvert exclusivement à son nom et mentionnant l'existence de la tutelle (C. civ., art. 498 nouveau). Ce versement devra être fait directement par le débiteur (compagnie d'assurance, notaire en cas de partage...), sans possibilité de faire transiter les fonds par un autre compte. Propre à la tutelle, cette obligation d'individualiser le versement des capitaux s'ajoute à celle, prévue à l'article 427 du code civil pour toute mesure de protection juridique d'un majeur, d'individualiser les opérations bancaires de paiement de gestion patrimoniale.

c - Le droit d'audition par le juge

La loi du 5 mars 2007 prévoit également plusieurs dispositions renforçant la place du majeur dans le processus judiciaire, comme l'obligation de l'auditionner avant le prononcé d'une mesure judiciaire de protection juridique (C. civ., art. 432 nouveau).

Elle renforce, en l'inscrivant dans le code civil, l'obligation pour le juge des tutelles de procéder à l'audition de la personne à protéger avant de statuer. La personne devra être entendue ou, à tout le moins appelée, c'est-à-dire convoquée. La loi vise ici l'hypothèse d'un refus de l'intéressé de répondre à la convocation qui lui est adressée ou son refus de répondre aux questions du juge qui s'est déplacé pour le rencontrer. En ce cas, un procès-verbal de carence est établi et la procédure peut continuer, explique le rapporteur de la loi au Sénat (Rap. Sén. n° 212, février 2007, Richemont, page 132).

Actuellement, ce principe figure aux articles 1246 et 1247 du nouveau code de procédure civile. Ces derniers prévoient que cette audition est une formalité substantielle. L'audition ne peut être écartée qu'en cas de contre-indication médicale.

A compter du 1er janvier 2009, deux nouveaux cas de dispense s'appliqueront : lorsque l'audition est de nature à porter atteinte à la santé de la personne à protéger ou si cette dernière est hors d'état d'exprimer sa volonté. Dans ces cas, le juge devra se prononcer par décision spécialement motivée et sur avis du médecin choisi sur une liste établie par le procureur de la République. En pratique, « il pourra s'agir d'une personne désorientée par une atteinte cérébrale ou psychique grave comme, par exemple, la maladie d'Alzheimer ou un coma », expliquent les travaux parlementaires (Rap. Sén. n° 212, février 2007, Richemont, page 132).

La loi du 5 mars prévoit également la possibilité, pour le majeur susceptible de faire l'objet d'une mesure de protection, d'être accompagné par un avocat ou, sous réserve de l'accord du juge, par toute autre personne de son choix lors de son audition. Cette disposition existe déjà au niveau réglementaire mais acquiert ainsi une valeur légale afin de mieux garantir les droits de la défense.

d - La prise en compte de la volonté du majeur protégé

La loi du 5 mars 2007 améliore la prise en compte de la volonté de la personne protégée par rapport aux décisions relatives à sa personne. Et ce, quel que soit le régime de protection juridique mis en oeuvre : tutelle et curatelle (C. civ., art. 457-1 à 459-1), mandat de protection future lorsqu'il porte sur la protection de la personne (C. civ., art. 479 nouveau) et sauvegarde de justice lorsqu'est nommé un mandataire spécial (C. civ., art. 438 nouveau).

L'information du majeur

Ainsi, la personne protégée devra recevoir de la personne chargée de sa protection, selon des modalités adaptées à son état, toutes les informations sur sa situation personnelle et sur l'utilité, le degré d'urgence et les effets des actes envisagés, ainsi que sur les conséquences d'un refus de sa part.

Cette obligation d'information s'ajoute à celle que la loi impose à des tiers. Il s'agit, par exemple, de maintenir le droit du majeur protégé de recevoir lui-même une information sur son état de santé.

Le consentement du majeur aux décisions relatives à sa personne

La loi consacre et précise le statut bâti par la jurisprudence en matière de décisions personnelles en instaurant deux régimes de protection de la personne avec, d'un côté, les décisions strictement personnelles qui ne peuvent être prises que par le majeur seul et, de l'autre, celles pour lesquelles le consentement du majeur doit être obtenu avec l'assistance ou par la représentation de la personne chargée de sa protection. A l'heure actuelle, le code civil ne régit en effet que quelques aspects purement civils ou juridiques de cette protection : le mariage, le testament, le divorce, l'autorité parentale...

Dans le cadre d'une tutelle ou d'une curatelle, afin de contrôler le respect de ces droits des personnes protégées, le curateur ou le tuteur devra rendre compte au conseil de famille ou, à défaut, au juge des tutelles, des diligences qu'il a accomplies pour assurer cette protection. Les conditions de ce compte rendu seront fixées par le conseil de famille ou par le juge au moment de l'ouverture de la mesure ou ultérieurement (C. civ., art. 463 nouveau).

Les actes strictement personnels

L'accomplissement des actes dont la nature implique un consentement strictement personnel ne peut jamais donner lieu à assistance ou représentation du majeur protégé.

Ce principe s'applique sous réserve de dispositions législatives particulières. A cet égard, le code de la santé publique contient, par exemple, des dispositions relatives au consentement à l'acte médical.

Deux séries d'actes sont réputées strictement personnelles :

les actes relatifs à la filiation, c'est-à-dire la déclaration de naissance d'un enfant et sa reconnaissance, le choix et le changement de son nom, ainsi que le consentement du majeur à sa propre adoption ou à celle de son enfant ;

les actes de l'autorité parentale relatifs à la personne de l'enfant du majeur protégé.

Les autres actes relatifs à sa personne

Pour les actes relatifs à la personne du majeur qui ne sont pas réputés être strictement personnels, le code civil lie l'obligation de recueillir son consentement au degré d'altération de ses facultés.

Ainsi, si son état le permet, le majeur protégé prend seul les décisions relatives à sa personne, sans assistance ni représentation de la personne chargée de sa protection. Le principe est donc alors celui de la liberté de décision.

Si, à l'inverse, son état ne lui permet pas de prendre seul une « décision personnelle éclairée », la personne chargée de sa protection peut, sur autorisation du conseil de famille ou du juge, assister le majeur. L'autorisation est alors donnée d'avance dans la décision d'ouverture de la mesure ou ultérieurement. Elle est soit générale (l'ensemble des actes relatifs à la personne est couvert), soit ponctuelle (seuls les actes énumérés sont autorisés).

Si, enfin, cette assistance ne suffit pas, le conseil de famille ou le juge peut, le cas échéant après l'ouverture de la mesure de protection juridique, autoriser la personne chargée de la protection à représenter le majeur, c'est-à-dire à prendre la décision en son nom.

La situation de danger et les actes graves

Un régime particulier est prévu en cas de danger. La personne chargée de la protection du majeur peut ainsi prendre à l'égard de celui-ci les mesures de protection strictement nécessaires pour mettre fin au danger que, du fait de son comportement, l'intéressé ferait courir à lui-même. Pour ne pas laisser le système sans contrôle, elle doit en informer sans délai le juge ou, s'il existe, le conseil de famille.

En ce qui concerne les actes les plus graves, la personne chargée de la protection pourra, en cas d'urgence, prendre seule une décision ayant pour effet de porter gravement atteinte à l'intégrité corporelle de la personne protégée ou à l'intimité de sa vie privée. S'il n'y a pas urgence, elle devra obtenir l'autorisation du conseil de famille ou, à défaut, du juge.

L'application des dispositions des autres codes

Les conditions de recueil du consentement du majeur protégé prévues par le code civil ne feront pas obstacle à l'application des dispositions spécifiques prévues par le code de la santé publique et le code de l'action sociale et des familles prévoyant l'intervention d'un représentant légal.

De fait, l'article L. 1111-6 du code de la santé publique donne, par exemple, à tout majeur hospitalisé, sauf à celui sous tutelle, la possibilité de désigner une personne de confiance qui sera consultée au cas où il serait hors d'état d'exprimer sa volonté et de recevoir l'information nécessaire à cette fin. En cas d'ouverture d'une tutelle, le juge des tutelles peut soit confirmer la personne de confiance antérieurement désignée dans sa mission, soit la révoquer. De même, en application de l'article L. 1122-2 du code de la santé publique, l'adhésion personnelle du majeur protégé à une recherche biomédicale sur sa personne doit être recherchée et, en toute hypothèse, il ne peut être passé outre à son refus ou à la révocation de son acceptation. L'autorisation est, pour un majeur sous tutelle, donnée par son représentant légal ou, si la recherche représente un risque sérieux d'atteinte à la vie privée ou à l'intégrité du corps humain, par le juge ou le conseil de famille. Lorsqu'une recherche biomédicale est effectuée sur une personne majeure sous curatelle, le consentement est donné par l'intéressé assisté par son curateur pour les recherches ne présentant pas de risques sérieux pour sa personne. Dans le cas contraire, le juge est sollicité.

Dans le cas où la mesure de protection est confiée à une personne ou un service préposé de l'établissement d'accueil de la personne protégée, les diligences et les actes graves prévus par le code de la santé publique qui touchent à la personne, et dont la liste doit être fixée par décret, seront subordonnés à une autorisation spéciale du juge, qui pourra décider, notamment s'il estime qu'il existe un conflit d'intérêts, d'en confier la charge au subrogé curateur ou au subrogé tuteur, s'il a été nommé, et, à défaut, à un curateur ou à un tuteur ad hoc.

e - Les relations avec les proches

La personne protégée entretient librement des relations personnelles avec tout tiers, parent ou non. Elle a le droit d'être visitée, et le cas échéant, hébergée par ceux-ci. En cas de difficulté, le juge, ou le conseil de famille s'il a été constitué, statue (C. civ., art. 459-2 nouveau).

C - La priorité donnée à la famille

La loi du 5 mars 2007 fait de la protection des majeurs un devoir des familles et de la collectivité publique (C. civ., art. 415 nouveau).

L'obligation des membres de la famille vis-à-vis d'un majeur atteint d'une altération de ses facultés se traduit notamment par le renforcement du principe de priorité familiale dans le choix du tuteur ou du curateur (C. civ., art. 449 nouveau) et par le fait que l'époux, le partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou les enfants du majeur protégé peuvent être tenus de conserver la charge de la curatelle ou de la tutelle au-delà de 5 ans (C. civ., art. 453 nouveau).

Quant au devoir de la collectivité publique, il se traduit principalement par la prise en charge financière du dispositif.

II - LE DÉCLENCHEMENT DE LA MESURE DE PROTECTION

A - Les conditions requises pour placer un majeur sous protection juridique

Actuellement, une mesure de protection peut être ouverte dans deux hypothèses :

soit en cas d'altération des facultés personnelles, mentales ou corporelles de l'intéressé ;

soit lorsque ce dernier, par sa prodigalité, son intempérance ou son oisiveté, s'expose à tomber dans le besoin ou compromet l'exécution de ses obligations familiales.

Avec la loi du 5 mars 2007, seul le premier cas de figure - l'altération des facultés personnelles - sera maintenu à compter du 1er janvier 2009, avec toutefois quelques modifications (C. civ., art. 425 nouveau).

1- LA SUPPRESSION DE L'OUVERTURE D'UNE MESURE POUR CAUSE DE PRODIGALITÉ

La loi supprime le cas d'ouverture d'une mesure de protection juridique - la curatelle - en cas de prodigalité, d'intempérance ou d'oisiveté.

Dès l'origine du code civil, en 1804, la possibilité de nommer un conseil judiciaire au prodigue était prévue. La mesure était toutefois controversée. Pour certains, l'atteinte portée à la liberté individuelle de disposer librement de sa fortune était trop forte. D'autres, au contraire, mettaient en avant « l'intérêt du prodigue et la nécessité de le protéger contre ses entraînements, la protection de la famille ou encore le souci d'empêcher les individus sans scrupules de s'enrichir en profitant de la faiblesse d'autrui » (Rap. Sén. n° 212, février 2007, Richemont, page 119).

La loi du 3 janvier 1968 n'a pas remis en cause ce cas d'incapacité mais l'a, à l'inverse, étendu à l'intempérance et à l'oisiveté en prévoyant la possibilité d'ouvrir dans cette hypothèse une curatelle, sans toutefois exiger de certificat médical, au motif que le prodigue, l'intempérant ou l'oisif n'est pas inapte mais a besoin d'une assistance juridique. Enfin, l'ouverture de la mesure a été subordonnée au risque que le prodigue, l'intempérant ou l'oisif s'expose à tomber dans le besoin ou à compromettre l'exécution de ses obligations familiales.

En pratique, cette possibilité a été à l'origine de l'ouverture de curatelles sans que le majeur soit véritablement dans l'impossibilité de pourvoir seul à ses intérêts. Or, « conformément au principe de subsidiarité, la prodigalité, l'intempérance ou l'oisiveté ne justifient plus de priver le majeur de sa capacité » (Rap. A.N. n° 3557, janvier 2007, Blessig, page 129). Ce, d'autant plus que la loi du 5 mars 2007 a par ailleurs instauré la mesure d'accompagnement social personnalisé et celle d'accompagnement judiciaire (4).

2 - L'ALTÉRATION DES FACULTÉS PERSONNELLES

Une mesure de protection juridique pourra être ouverte lorsqu'une personne se trouvera dans l'impossibilité de pourvoir seule à ses intérêts en raison d'une altération, médicalement constatée, soit de ses facultés mentales, soit de ses facultés corporelles, de nature à empêcher l'expression de sa volonté (C. civ., art. 425 nouveau).

a - L'appréciation de l'altération des facultés mentales

En ce qui concerne l'altération des facultés mentales, contrairement à la législation actuelle qui évoque trois causes limitatives d'altération - maladie, infirmité, affaiblissement dû à l'âge -, la loi du 5 mars 2007 ne fixe pas de liste.

De fait, selon le rapporteur de la loi à l'Assemblée nationale, Emile Blessig, d'autres causes peuvent être invoquées. Tel est le cas de « la dépression ou [du] stress post-traumatique qui est défini comme un trouble mais pas toujours comme une maladie, et qui pourtant altère les facultés mentales en modifiant le discernement » (Rap. A.N. n° 3557, janvier 2007, Blessig, page 129).

En tout état de cause, l'altération seule ne suffira pas. Elle devra en effet entraîner l'impossibilité pour la personne de pourvoir seule à ses intérêts.

b - L'appréciation de l'altération des facultés corporelles

Quant à l'altération des facultés corporelles, elle devra, pour justifier une mesure de protection, empêcher l'expression de la volonté. Alors que le projet de loi initial évoquait l'entrave à l'expression de la volonté, l'Assemblée nationale lui a substitué le verbe « empêcher » « afin que l'ouverture d'une mesure de protection juridique en cas d'altération des facultés corporelles soit subordonnée à une impossibilité absolue pour la personne d'exprimer sa volonté » (Rap. A.N. n° 3557, janvier 2007, Blessig, page 129).

Il s'agit, par exemple, expliquent les rapports parlementaires, de prendre en compte la situation de personnes qui souffrent d'importantes infirmités motrices, notamment à la suite de graves accidents de la circulation routière, et qui « sont privés de l'usage de la parole mais peuvent, par le biais d'assistance technique et d'un entourage attentif, se faire comprendre et exprimer leur volonté » (Rap. Sén. n° 212, février 2007, Richemont, page 118).

c - La nécessité d'un constat médical

En tout état de cause, et comme aujourd'hui, cette altération devra être médicalement constatée. L'actuel article 1245 du nouveau code de procédure civile prévoit en effet que l'altération doit être constatée par un médecin spécialiste inscrit sur une liste établie chaque année par le procureur de la République après avis du préfet.

Pour les mesures judiciaires de protection

A compter du 1er janvier 2009, la demande d'une mesure judiciaire de protection juridique (sauvegarde de justice, curatelle, tutelle) adressée au juge devra être accompagnée, à peine d'irrecevabilité, d'un certificat circonstancié rédigé par un médecin choisi sur une liste établie par le procureur de la République (C. civ., art. 431 nouveau).

A la différence du dispositif actuel, il ne sera plus exigé que ce médecin soit un « spécialiste ». La loi valide ainsi une jurisprudence de la Cour de cassation qui a jugé que l'inscription sur la liste établie par le procureur de la République, après avis du préfet, conférait la qualité de « spécialiste ».

Toujours dans le droit-fil de la jurisprudence, le certificat médical devra être circonstancié. Son coût sera fixé par décret. Il s'agit ainsi d'encadrer le prix de ce document qui peut poser problème pour un certain nombre de familles.

Le médecin inscrit sur la liste établie par le procureur de la République pourra solliciter l'avis du médecin traitant de la personne protégée pour établir le certificat circonstancié ou décider son accueil dans un établissement (C. civ., art. 431-1 nouveau). A l'heure actuelle, l'avis du médecin traitant est obligatoirement requis préalablement à l'ouverture d'une mesure de protection, ce qui peut le mettre dans une situation délicate vis-à-vis de la famille, voire du patient. La loi du 5 mars 2007 n'interdit toutefois ni l'établissement du certificat médical circonstancié par le médecin traitant, s'il figure sur la liste établie par le parquet, ni de solliciter son avis si le juge l'estime utile.

Pour le mandat de protection future

Le mandat de protection future prendra effet une fois que le mandataire - c'est-à-dire la personne chargée de la protection du majeur - aura fourni au greffe du tribunal d'instance le mandat ainsi qu'un certificat médical émanant du médecin inscrit sur la liste du procureur de la République et établissant l'altération des facultés personnelles (C. civ., art. 481 nouveau) (voir page 29).

B - Les personnes autorisées à demander une mesure judiciaire de protection

La loi du 5 mars 2007 étend la liste des personnes pouvant solliciter l'ouverture d'une mesure judiciaire de protection. Elle supprime, parallèlement, la possibilité pour le juge de se saisir d'office.

1 - LA SUPPRESSION DE LA SAISINE D'OFFICE DU JUGE

La loi supprime, à compter du 1er janvier 2009, la possibilité offerte au juge des tutelles de se saisir d'office.

En pratique, actuellement, la moitié des dossiers sont ouverts par le juge des tutelles à la suite d'une requête de l'intéressé ou de sa famille. Dans les autres cas, les services sociaux (des communes, des offices d'habitations à loyer modéré, des départements) ou hospitaliers, les médecins, plus rarement les banques et les notaires, ont pris l'habitude d'envoyer au juge des signalements, même lorsqu'ils ne se justifient pas, en raison de la carence de l'entourage familial. A partir d'un signalement, le juge peut utiliser la possibilité de se saisir d'office afin de vérifier si la mesure de protection répond à un réel besoin.

Cette règle est considérée comme contraire à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales. « Que le même juge puisse se saisir de la situation d'une personne, instruire le dossier puis rendre la décision, en étant seul à chacun de ces stades de la procédure, va en effet à l'encontre de la conception traditionnelle du juge arbitre » (Rap. Sén. n° 212, février 2007, Richemont, page 128).

2 - L'ÉLARGISSEMENT DU CERCLE DES PERSONNES HABILITÉES

En contrepartie de la suppression de la saisine d'office du juge, le cercle des personnes habilitées à former une requête est élargi (C. civ., art. 430 nouveau).

A l'heure actuelle, seule la personne qu'il y a lieu de protéger, ses proches parents (conjoint, ascendants, descendants, frères et soeurs), le ministère public et le curateur, s'il est nécessaire de transformer une curatelle en tutelle, ont qualité pour demander l'ouverture d'une mesure de protection. Les autres parents, les alliés ou les amis, le médecin traitant ou le directeur de l'établissement qui héberge la personne à protéger peuvent simplement donner un avis au juge des tutelles qui a alors la possibilité de se saisir d'office. La loi du 5 mars 2007 prend en compte toutes les formes de conjugalité ainsi que l'ensemble des parents.

Ainsi, dès le 1er janvier 2009, la demande d'ouverture d'une mesure de protection pourra être présentée au juge par la personne qu'il y a lieu de protéger (comme auparavant) ou, selon le cas, par son conjoint (sans changement), son partenaire pacsé ou son concubin, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé. De même, tout parent ou allié ou toute personne entretenant avec le majeur des liens étroits et stables pourra également former une requête. Relevons que la loi avait, un temps, envisagé d'exiger de ce proche qu'il réside avec le majeur. Cette condition a finalement été abandonnée.

Par ailleurs, la loi maintient la possibilité d'une requête par le ministère public, soit d'office, soit à la demande d'un tiers, ce qui peut être nécessaire si la famille reste passive.

Enfin, la loi habilite la personne qui exerce à l'égard du majeur vulnérable une mesure de protection juridique - mandataire spécial dans le cadre d'une sauvegarde de justice, curateur, tuteur, mandataire de protection future - à saisir le juge. Relevons que la personne chargée d'une mesure d'accompagnement judiciaire - qui ne constitue pas une mesure de protection juridique - ne pourra pas demander sa transformation en une mesure de protection juridique. « Il s'agit en effet d'éviter que les services sociaux aient la possibilité de saisir directement le juge, ce qui limiterait les garanties procédurales que la réforme instaure pour assurer un meilleur respect du principe de subsidiarité » (Rap. Sén. n° 212, février 2007, Richemont, page 129). Ainsi, la personne chargée d'une mesure d'accompagnement judiciaire souhaitant obtenir sa transformation devra donc saisir le procureur de la République, qui exercera son contrôle.

III - LE MANDAT DE PROTECTION FUTURE (art. 7)

Principale innovation de la réforme, le mandat de protection future est une mesure conventionnelle destinée à permettre à chacun d'organiser pour l'avenir sa protection, et d'éviter ainsi l'ouverture d'une mesure judiciaire. En cela, il est une illustration majeure de la meilleure prise en compte de la volonté de la personne dans le cadre de la protection des majeurs.

A l'instar de la plus grande partie des dispositions de la loi du 5 mars 2007, ce nouveau dispositif entrera en vigueur au 1er janvier 2009. Toutefois, depuis le 7 mars 2007, la loi permet à toute personne de confier un mandat de protection future à une personne physique (et non morale). Mais ce mandat ne pourra prendre effet qu'au 1er janvier 2009 (art. 45, III de la loi). Il s'agit en fait de permettre aux personnes intéressées de préparer l'entrée en vigueur de ce mécanisme.

A - Le mandant

Toute personne majeure ou mineure émancipée ne faisant pas l'objet d'une mesure de tutelle pourra charger une ou plusieurs personnes de la représenter, par un même mandat, au cas où elle ne pourrait plus pourvoir seule à ses intérêts en raison d'une altération de ses facultés mentales ou corporelles (C. civ., art. 477 nouveau).

Le majeur sous tutelle se trouve donc privé de ce droit. En revanche, celui qui se trouve sous curatelle pourra l'exercer, mais seulement avec l'assistance de son curateur.

La loi du 5 mars 2007 prévoit également un second cas de mandat de protection future, cette fois pour autrui. En effet, les parents ou le dernier vivant des père et mère qui ne font l'objet d'aucune mesure de curatelle ou de tutelle, sont également autorisés à désigner un ou plusieurs mandataires de protection future pour leur enfant dans le cas où ce dernier ne pourrait plus pourvoir seul à ses intérêts. Deux hypothèses sont prévues :

lorsque l'enfant est mineur, les intéressés peuvent mandater en son nom s'ils exercent sur lui l'autorité parentale ;

lorsque l'enfant est majeur, le mandat peut être donné en son nom par les intéressés s'ils en assument la prise en charge matérielle et affective.

Ces dispositions visent ainsi à permettre aux parents d'un enfant handicapé d'organiser par avance sa protection. La désignation par le dernier vivant des père et mère ne prendra effet qu'à compter du jour de son décès ou de son impossibilité de continuer à prendre soin de son enfant.

B - Le mandataire

1 - LE CHOIX DU MANDATAIRE

Le mandataire pourra être toute personne physique choisie par le mandant ou une personne morale figurant sur la liste de mandataires judiciaires à la protection des majeurs, établie par le préfet sur avis conforme du procureur de la République (C. civ., art. 480 nouveau).

La personne désignée devra jouir de la capacité civile pendant toute l'exécution du mandat. Elle devra également remplir l'ensemble des conditions requises pour exercer une tutelle ou une curatelle (ne pas être mineure, majeure protégée, membre des professions médicales et de pharmacie à l'égard d'un patient...).

Pendant l'exécution du mandat, le mandataire ne pourra être déchargé de ses fonctions qu'avec l'autorisation du juge des tutelles.

Plusieurs mandataires pourront être désignés mais par un seul et même mandat (C. civ., art. 477 nouveau).

2 - LES MISSIONS DU MANDATAIRE

Le mandataire aura pour mission de représenter le mandant lorsque, en raison d'une altération de ses facultés mentales ou corporelles, il ne pourra plus pourvoir seul à ses intérêts. La protection confiée au mandataire pourra porter à la fois sur les biens du mandant et sur sa personne, ou sur l'un de ces deux objets. L'objet du mandat est ainsi laissé à l'initiative du mandant qui est libre de définir l'étendue de la mission confiée au mandataire, et notamment de donner des directives pour la gestion de son patrimoine.

a - Une mission exécutée personnellement

En principe, le mandataire doit exécuter personnellement le mandat. Toutefois, à l'instar du curateur ou du tuteur, il pourra s'adjoindre le concours de tiers pour les actes de gestion du patrimoine, mais seulement à titre spécial. Il devra alors répondre de la personne qu'il s'est substituée (C. civ., art. 482 nouveau).

b - La protection de la personne du mandant

Selon le nouvel article 479 du code civil, si le mandat porte sur la protection de la personne du mandant, le mandataire devra respecter les dispositions définies en matière d'information et de consentement de la personne protégée aux décisions personnelles la concernant (voir page 27). Rappelons, par exemple, que le mandataire sera tenu à une obligation d'information du mandant et qu'il ne pourra prendre les décisions strictement personnelles ou choisir le lieu de résidence. Toute stipulation contraire sera, en tout état de cause, réputée non écrite.

Le mandant pourra décider de confier au mandataire l'exercice des missions que le code de la santé publique et le code de l'action sociale et des familles confient au représentant d'une personne en tutelle ou à la personne de confiance, afin qu'il intervienne comme son représentant légal à l'occasion de certains actes ou diligences, ainsi que pour l'exercice de certains droits (C. civ., art. 479 nouveau).

c - La protection des biens du mandant

Le mandat pourra également porter sur la protection des biens. Dans ce cas, plusieurs obligations s'imposent au mandataire pendant et à l'issue du mandat.

Les obligations du mandataire pendant le mandat

Le mandataire devra faire procéder à l'inventaire des biens de la personne protégée dès la prise d'effet du mandat et non, comme en cas de tutelle, dans les 3 mois qui suivent (C. civ., art. 486 nouveau). Dans la mesure où il donnera lui-même effet au mandat en produisant au greffe du tribunal le certificat médical (voir page 34), le mandataire ne sera pas pris au dépourvu et pourra procéder immédiatement à l'inventaire. Il devra en outre l'actualiser au cours du mandat afin de maintenir à jour l'état du patrimoine.

Le mandataire devra, par ailleurs, établir chaque année un compte de sa gestion. A la différence du tuteur, il ne disposera cependant pas de la possibilité de demander aux établissements de crédits les informations utiles pour établir ce compte, qui sera vérifié selon les modalités fixées par le mandat. Des modalités différentes de conservation des documents sont prévues selon que le mandat est notarié ou conclu sous seing privé (voir ci-dessous). Le juge des tutelles pourra en outre décider de les soumettre à la procédure de vérification et à d'approbation prévues en cas de tutelle.

Les obligations du mandataire à l'issue du mandat

Lorsque le mandat prendra fin, et dans les 5 ans qui suivront, le mandataire chargé de gérer les biens de la personne protégée aura des obligations similaires à celles imposées à un tuteur. Il devra tenir à la disposition de la personne qui continue la gestion des biens, du majeur protégé s'il a recouvré ses facultés ou de ses héritiers l'inventaire des biens et ses actualisations, ainsi que les 5 derniers comptes de gestion. Il devra également tenir à leur disposition les pièces nécessaires pour continuer la gestion ou assurer la liquidation de la succession (C. civ., art. 487 nouveau).

C - Le régime et la forme du mandat

Le mandat de protection future est soumis au droit commun du mandat, sous réserve des dispositions spécifiques prévues par la loi du 5 mars 2007 qui pourraient y être contraires (C. civ., art. 478 nouveau).

Le mandat doit fixer les modalités de contrôle de son exécution (C. civ., art. 479 nouveau).

Conformément au droit commun du mandat, le mandat de protection future peut être donné par acte notarié ou sous seing privé (C. civ., art. 477 nouveau). A ces deux formes de mandat correspondent des champs de protection patrimoniale différents.

Le mandat de protection future pour autrui doit, quant à lui, être nécessairement conclu sous forme notariée (C. civ., art. 477 nouveau).

1 - LE MANDAT NOTARIÉ

a - L'établissement du mandat

Lorsque le mandat est établi par acte authentique, il est reçu par un notaire choisi par le mandant. L'acceptation du mandataire est faite dans les mêmes formes (C. civ., art. 489 nouveau).

Au cours des débats parlementaires, il avait été envisagé que l'acte soit passé devant 2 notaires. L'objectif recherché, selon les défenseurs de cette thèse à l'Assemblée nationale, était de limiter les risques de conflits d'intérêts possibles entre la personne protégée et sa famille. Cette solution a finalement été écartée.

Une fois passé et accepté, le mandat ne peut être modifié ou révoqué par le mandant, et il ne peut faire l'objet d'une renonciation par le mandataire, que tant qu'il n'a pas pris effet. Relevons que ce mandat prend effet le jour où, accompagné du certificat médical attestant l'altération des facultés personnelles du mandant, il est produit au greffe du tribunal d'instance par le mandataire (voir page 34).

Ces modifications et révocations sont possibles par simple notification du mandant au mandataire et au notaire, c'est-à-dire sans passer un nouvel acte notarié. De même, le mandataire peut renoncer au mandat par simple notification au mandant et au notaire.

b - L'étendue du mandat notarié

Le mandat notarié inclut tous les actes patrimoniaux que le tuteur a le pouvoir d'accomplir seul ou avec une autorisation du conseil de famille ou, à défaut, du juge des tutelles (C. civ., art. 490 nouveau). Autrement dit, le mandataire peut procéder à l'inventaire des biens ainsi qu'à des actes d'administration, conservatoires et de disposition (voir encadré, ci-dessous).

Une exception est toutefois prévue : les actes de disposition à titre gratuit ne pourront être accomplis par le mandataire que sur autorisation du juge des tutelles (C. civ., art. 490 nouveau). Cette règle vise à éviter des donations abusives ou sous influence, notamment au profit du mandataire.

En outre, la loi écarte explicitement l'exigence d'un mandat exprès prévue par l'article 1988 du code civil pour les actes de disposition. Ainsi, même s'il est conçu en termes généraux, c'est-à-dire s'il ne comporte pas une autorisation expresse, le mandat autorise le mandataire à faire tout acte de disposition qu'un tuteur peut accomplir.

Rappelons que, s'agissant de la protection de la personne, celle-ci est réglée par les dispositions du code civil applicables aux mesures judiciaires de protection juridique (voir page 27).

c - Le contrôle de la gestion du patrimoine du mandant par le notaire

Comme nous l'avons vu, le mandataire doit établir chaque année un compte de sa gestion (voir page 32). Dans le cadre d'un mandat notarié, il doit en rendre compte au notaire qui a établi le mandat en lui adressant ses comptes, auxquels doivent être annexées toutes pièces justificatives utiles. Le notaire assure, quant à lui, la conservation des pièces transmises ainsi que celle de l'inventaire des biens et de ses actualisations (C. civ., art. 491 nouveau).

Le notaire doit, en outre, saisir le juge des tutelles de tout mouvement de fonds et de tout acte non justifiés ou n'apparaissant pas conformes aux stipulations du mandat (C. civ., art. 491 nouveau).

2 - LE MANDAT SOUS SEING PRIVÉ

a - L'établissement du mandat

Le mandat sous seing privé doit être daté et signé de la main du mandant. Il est soit contresigné par un avocat, soit établi selon un modèle qui doit être défini par décret (C. civ., art. 492 nouveau).

Le mandataire accepte le mandat, quelle qu'en soit la forme, en y apposant sa signature.

Comme le mandat notarié, une fois passé et accepté, le mandat sous seing privé peut, tant qu'il n'a pas reçu exécution, être modifié ou révoqué par le mandant selon les mêmes formes que l'acte initial, faire l'objet d'une renonciation par le mandataire qui la notifie au mandant (C. civ., art. 492 nouveau).

b - L'étendue du mandat

Le mandat sous seing privé est limité, quant à la gestion du patrimoine, aux actes qu'un tuteur peut faire sans autorisation du conseil de famille ou, à défaut, du juge des tutelles (C. civ., art. 493 nouveau). Un mandat sous seing privé ne peut donc autoriser le mandataire à accomplir seul que les actes conservatoires et les actes d'administration du patrimoine du mandant.

S'il s'avérait nécessaire, dans l'intérêt de ce dernier, d'élargir le mandat à un acte non prévu ou soumis à autorisation, le mandataire devra saisir le juge afin qu'il ordonne cet acte (C. civ., art. 493 nouveau).

Le mandataire sous seing privé a, en revanche, s'agissant de la protection de la personne du mandant, les mêmes pouvoirs qu'un mandataire notarié.

c - Les obligations comptables du mandataire

Parce qu'il dispose de pouvoirs moindres que ceux permis par un mandat notarié, le bénéficiaire d'un mandat sous seing privé est soumis à des obligations comptables moins contraignantes.

C'est lui-même qui est chargé de conserver l'inventaire des biens et ses actualisations, les 5 derniers comptes de gestion accompagnés de leurs pièces justificatives, ainsi que les pièces qui, à la fin du mandat, seront nécessaires à la continuation de la gestion (C. civ., art. 494 nouveau).

Pendant l'exécution du mandat, le contrôle de la gestion du mandataire est assuré par le juge des tutelles et le procureur de la République qui peuvent demander à ce que les pièces comptables leur soient présentées (C. civ., art. 494 nouveau).

D - L'exécution du mandat

1 - LA PRISE D'EFFET DU MANDAT

Le mandat prend effet lorsqu'il est établi que le mandant ne peut plus pourvoir seul à ses intérêts. Ce dernier en reçoit alors notification (C. civ., art. 481 nouveau).

Afin de faire constater cette incapacité, le mandataire doit produire le mandat et un certificat médical, rédigé par un médecin choisi sur la liste tenue par le procureur de la République, et qui établit que le mandant subit soit une altération de ses facultés mentales, soit une altération de ses facultés corporelles de nature à empêcher l'expression de sa volonté (C. civ., art. 481 nouveau).

Ce certificat doit être produit au greffier du tribunal d'instance qui constate la prise d'effet du mandat, puis le restitue au mandataire (C. civ., art. 481 nouveau). Cette opération ne requière donc aucune intervention du juge et le greffier ne dispose d'aucun pouvoir d'appréciation.

2 - LA MODIFICATION DE LA PROTECTION PAR LE JUGE

C'est le juge des tutelles qui est chargé de statuer sur la mise en oeuvre du mandat ou sur les conditions et les modalités de son exécution. Il peut être saisi à cet effet par toute personne intéressée (C. civ., art. 484 nouveau).

Le juge peut alors modifier la protection apportée au mandant selon les modalités suivantes (C. civ., art. 485 nouveau) :

après avoir révoqué le mandat, il peut ouvrir une mesure de protection juridique en prononçant une sauvegarde de justice, une curatelle ou une tutelle ;

lorsque le champ d'application du mandat s'avère insuffisant pour protéger les intérêts personnels ou patrimoniaux de la personne, il peut compléter le mandat en lui adjoignant une mesure de protection judiciaire qu'il confie, le cas échéant, au mandataire de protection future. Il peut également autoriser ce dernier ou un mandataire ad hoc à accomplir un ou plusieurs actes déterminés non couverts par le mandat.

En cas de coexistence d'un mandat de protection future et d'une protection judiciaire, les deux s'exercent de manière indépendante. Dès lors, le mandataire de protection future et les personnes désignées par le juge ne sont pas responsables l'un envers l'autre. Toutefois, ils ont l'obligation de s'informer mutuellement des décisions qu'ils prennent (C. civ., art. 485 nouveau).

3 - LA FIN DU MANDAT

Le mandat de protection future prend fin par (C. civ., art. 483 nouveau) :

le rétablissement des facultés personnelles de l'intéressé constaté à la demande de ce dernier ou du mandataire. Pour ce faire, ils doivent produire au greffier du tribunal d'instance le mandat ainsi que le certificat médical établi par un médecin choisi sur la liste tenue par le procureur de la République et attestant le rétablissement des facultés du mandant. Le greffier se borne, au vu du certificat produit, à constater la fin du mandat qui sera automatique ;

le décès du mandant ;

son placement en curatelle ou en tutelle, sauf décision contraire du juge, notamment dans l'hypothèse où il ouvre une tutelle aux biens mais maintient le mandat de protection future pour la protection de la personne, ou inversement ;

le décès du mandataire, son placement sous une mesure de protection (personne physique) ou sa déconfiture (personne morale) ;

la révocation judiciaire du mandataire. En effet, le juge des tutelles, saisi par toute personne intéressée, a la possibilité de révoquer un mandat de protection future dans 3 situations :

- l'absence d'altération des facultés personnelles du mandant ou, en cas d'altération de ses facultés corporelles, l'absence d'empêchement à l'expression de sa volonté,

- lorsque l'exercice par le conjoint de ses droits et devoirs ou des règles du droit commun de la représentation et des régimes matrimoniaux apparaissent suffisantes pour qu'il soit pourvu aux intérêts du mandant par son conjoint avec qui la communauté de vie n'a pas cessé,

- lorsque l'exécution du mandat est de nature à porter atteinte aux intérêts du mandant.

Relevons que si un mandat de protection future ne peut coexister, sauf décision contraire du juge, avec une mesure de tutelle ou de curatelle, tel n'est pas le cas pour une mesure

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