Lors d'un déplacement le 22 juin au tribunal de grande instance de Bobigny, Rachida Dati s'est engagée à agir pour une justice « ferme et humaine », « moderne et qui s'adresse à tous ». La ministre de la Justice a ainsi assuré de sa fermeté dans la lutte contre la récidive, notamment celle des mineurs à l'égard desquels elle entend mettre en application « un principe simple : «une infraction - une réponse» » (1). Elle a également émis l'idée d'expérimenter la dissociation des fonctions des juges des enfants : « Pourquoi ne pas dédier certains juges pour enfants au jugement des mineurs délinquants alors que les autres seraient dédiés au traitement de l'enfance en danger ? » Dans cet esprit, la garde des Sceaux estime nécessaire de revoir l'ordonnance du 2 novembre 1945 relative à l'enfance délinquante « non pas pour l'assouplir, non pas pour la durcir, mais pour la rendre plus lisible et plus cohérente ». Et d'ajouter que « la justice des mineurs deviendra [ainsi] plus rapide et plus efficace ». En outre, elle engagera, dès 2008, une campagne de recrutement de psychologues pour soutenir et conforter l'action des éducateurs dans les structures ouvertes.
Autre préoccupation de la chancellerie : moderniser la justice afin qu'elle soit plus proche des citoyens, et qu'elle « juge dans des délais raisonnables, dans des termes compréhensibles et [qu'elle] respecte les justiciables ». Pour ce faire, elle entend procéder à la numérisation et à la dématérialisation des procédures (2). Rachida Dati a également confirmé la rénovation de la carte judiciaire, qui se fera de manière progressive à partir du 1er janvier 2008 et ne sera « ni mécanique, ni géométrique, ni technocratique », a-t-elle assuré. Afin de préparer cette réforme, très critiquée par les professionnels de la justice, la ministre a installé le 27 juin un comité consultatif de la carte judiciaire chargé de lui présenter, au plus tard le 30 septembre prochain, des suggestions sur les schémas de redéploiement. Toujours dans une optique de modernisation, Rachida Dati a annoncé qu'elle allait instituer au sein de son ministère un porte-parole dont la mission sera d'informer le public sur les réformes et le fonctionnement de la justice.
« Une justice pour tous, c'est une justice qui lutte contre les discriminations », a également affirmé la ministre, qui veut instaurer dans tous les parquets un pôle anti-discrimination composé d'un magistrat et d'un délégué du procureur de la République. Une décision saluée par la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité (3). Leur mission : faire comprendre l'action de la justice en s'appuyant sur le monde associatif, et animer et coordonner sur le terrain un véritable réseau local de lutte contre les discriminations.
La ministre de la Justice va aussi demander aux juridictions de désigner un « juge dédié aux victimes », dont le rôle sera de « protéger [ces dernières] jusqu'au terme du parcours judiciaire de l'auteur condamné et de veiller à son indemnisation ».
Enfin, Rachida Dati a indiqué, à l'instar de son prédécesseur, Pascal Clément (4), vouloir créer « très rapidement » un contrôleur indépendant des lieux privatifs de liberté. Sa fonction : contrôler l'ensemble des lieux de détention, « ainsi que les conditions de vie de toutes les personnes détenues, les étrangers, les mineurs et les personnes hospitalisées d'office ». Dans le même esprit, la ministre entend aussi proposer « dès cet automne une grande loi pénitentiaire » qui assurera la garantie des droits fondamentaux des détenus. Elle s'est engagée à « consulter et à travailler avec les organisations syndicales, les personnes de la société civile et les associations » dès le mois de juillet, a indiqué la CGT pénitentiaire aux ASH après avoir été reçue par la ministre le 22 juin. Toujours concernant les personnes incarcérées, cette dernière mettra en place des « structures adaptées pour les détenus malades ou atteints de troubles psychiatriques ». Et créera cinq centres éducatifs fermés - auxquels seront affectés de manière permanente des psychiatres, des psychologues et des infirmiers - pour assurer le suivi des mineurs délinquants présentant des troubles du comportement.
(1) A cet effet, Rachida Dati adressera aux parquets une circulaire d'action publique en matière de délinquance des mineurs.
(2) Elle envisage par exemple, dès le 1er janvier 2008, d'offrir la possibilité aux avocats d'accéder au dossier pénal de leurs clients sous forme numérique, en suivant en temps réel par Internet son état d'avancement sans être obligé de se déplacer au tribunal.
(3) Cette décision de la ministre s'appuie sur une expérimentation locale menée par la HALDE et le TGI de Bobigny disposant d'un « référent discrimination ».