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Asile : la Cimade dénonce les pratiques arbitraires des préfectures

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« Alors que les discours et la loi distinguent les demandeurs d'asile des autres personnes migrantes, en pratique, ce sont de moins en moins l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) et la commission des recours des réfugiés (CRR) qui jouent le rôle déterminant dans la procédure d'asile. » En plein débat sur la perspective d'un changement de tutelle de l'OFPRA, la Cimade a rendu public le 20 juin, à l'occasion de la VIIe journée mondiale du réfugié, un rapport sur l'accueil et le traitement des demandeurs d'asile par les préfectures, passages obligés pour les prétendants à la protection internationale (1). Son constat, réalisé à partir de l'observation des pratiques dans une vingtaine de départements, est sans appel : « L'amélioration progressive des conditions matérielles d'accueil cache mal le développement par les préfectures d'exigences bureaucratiques superflues, de «spécificités locales» qui rendent illisibles les règles censées régir nationalement et faciliter le traitement des demandeurs d'asile. » Et le document foisonne d'exemples et de témoignages qui dénoncent « la maltraitance » des candidats au statut de réfugié.

Pour enregistrer une demande, décrit la Cimade, certaines préfectures exigent, de manière illégale, la présentation de documents non obligatoires, tels qu'un passeport ou la traduction du document d'état civil. Dans certains départements, l'administration ne réclame pas seulement une domiciliation associative, mais aussi un hébergement réel, y compris pour le renouvellement du premier récépissé de trois ans. La réforme du dispositif national d'accueil, issue de la loi sur l'immigration du 24 juillet 2006 et qui lie le versement de l'allocation financière à l'hébergement en centre d'accueil pour demandeurs d'asile (CADA), est encore chaotique : « En Ile-de-France, les premiers mois d'application montrent qu'un nombre important de demandeurs d'asile refuse l'offre de prise en charge, essentiellement parce qu'ils souhaitent rester parmi leurs proches ou parce qu'ils n'ont pas compris de quoi il s'agissait. » Ils sont 50 % à refuser d'aller en CADA en Essonne, 60 % dans la Seine-Saint-Denis... La régionalisation du dispositif d'accueil, qui oblige le demandeur à se présenter non plus dans la préfecture de son département, mais dans celle désignée pour la région, ne fait qu'allonger le délai de délivrance de l'autorisation de séjour. Celui-ci pouvait atteindre 45 jours au début de l'année 2007, regrette la Cimade, rappelant que ce dispositif est désormais étendu à cinq régions.

Le rapport s'attarde particulièrement sur le sort des demandeurs faisant l'objet de mesures dérogatoires, pour lesquels le rôle du préfet est encore plus déterminant. C'est le cas de la procédure dite « Dublin II », qui renvoie la responsabilité de la demande d'asile à un autre Etat européen. Aucune disposition réglementaire n'ayant été prise en France pour l'appliquer, elle reste « marquée du sceau de l'exception », se traduisant notamment par « une procédure opaque sans aucune information », ou encore par « des méthodes expéditives d'arrestation et de transfert en l'absence d'un recours suspensif ».

Trois autres exceptions permettent de refuser le séjour à un demandeur d'asile, rappelle la Cimade : les demandes émanant de personnes représentant une menace grave à l'ordre public, de celles originaires d'un « pays sûr » et de celles formulant une demande considérée comme « frauduleuse » ou « abusive ». Toutes sont soumises à des procédures dites « prioritaires », qui représentaient en 2006 plus de 30 % de l'ensemble des demandes. Beaucoup des étrangers concernés, déplore la Cimade, sont découragés de formuler une demande d'asile, notamment ceux originaires des « pays sûrs », qui se voient notifier leur refus de séjour sans être informés qu'ils peuvent tout de même saisir l'OFPRA. Quant au dossier considéré comme frauduleux, « les préfets en font une utilisation extensive ».

Autres requêtes victimes du zèle administratif, selon le rapport, celles formulées en centre de rétention : délais de cinq jours pour rédiger son dossier, absence d'accès à un interprète ou à un traducteur, dysfonctionnements administratifs... A ce parcours d'obstacles s'ajoute pour l'étranger la menace d'un retour expéditif, certaines préfectures continuant pendant l'instruction de sa demande d'asile de se préoccuper des formalités de son retour.

Autant de pratiques discrétionnaires, conclut la Cimade, entraînées par la réforme du droit d'asile de 2003, à laquelle les associations attribuent la chute du nombre de demandeurs : - 38 % en 2006, pour un taux d'accord de 8 % au total. La récente condamnation de la France par la Cour européenne des droits de l'Homme sur l'absence de recours suspensif à la frontière, estime l'association, constitue un rappel à l'ordre qui devrait entraîner une réforme globale des procédures d'accès au séjour des demandeurs d'asile.

Notes

(1) Main basse sur l'asile, le droit d'asile (mal) traité par les préfets - Cimade : 176, rue de Grenelle - 75007 Paris -Tél. 01 44 18 60 50 - Disponible sur www.cimade.org.

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