Le collectif SSIG-FR (Services sociaux d'intérêt général-France) (1) a atteint, lors d'une conférence à Bruxelles le 5 juin, son objectif : sensibiliser les responsables des autres Etats membres à la problématique des services sociaux d'intérêt général en Europe et à leur spécificité (2). Tous les spécialistes des institutions européennes (Commission, Parlement, Comité des régions, Comité économique et social) et les représentants des futures présidences de l'Union européenne (Portugal, Slovénie, France) étaient présents aux côtés des associations européennes et nationales. Il y a urgence, a rappelé Maurice Duranton, vice-président de l'Association internationale de la Mutualité et président de la Mutualité de la Fonction publique, « la situation actuelle qui nous met face aux dispositions du Traité [sur la concurrence ou le marché intérieur] met en danger nos services ». Et de lancer un appel pour que se créent d'autres collectifs SSIG sur le modèle du groupement français (sur l'étude sur les SSIG en Europe présentée le 4 juin par la Commission, voir ce numéro, page 13).
Tous les participants, à l'image de Jean-Louis Destans, président (PS) du conseil général de l'Eure et membre du Comité des régions, ont demandé la mise en place d'un cadre général pour les services sociaux d'intérêt général, mais avec des nuances. Pour Raymond Hencks, syndicaliste luxembourgeois et membre du Comité économique et social européen, il faut renoncer à certaines chimères. « La distinction entre les services économiques et non économiques (3) reste floue et n'a plus lieu d'être. Toute prestation effectuée, même bénévole, a une valeur économique. » Une idée qui suscite cependant l'inquiétude dans le secteur social.
La question du périmètre des services sociaux a aussi été évoquée. « Veut-on arriver à des services de pauvres pour les pauvres ? », s'est interrogé Laurent Ghekière, délégué auprès de l'Union européenne pour l'Union sociale pour l'Habitat, citant la mise en demeure de la Commission européenne imposant aux Pays-Bas de réserver les logements sociaux aux personnes défavorisées et de vendre les autres. Ce qui va à l'encontre de l'objectif de mixité sociale, défend-il.
Message entendu pour les représentants des gouvernements et de la Commis-sion européenne. « L'idée d'une directive sur les SSIG n'est pas majoritaire au Conseil actuellement, a indiqué Cyrille Cosme, diplomate à la Représentation française à Bruxelles. Mais nous faisons tout pour qu'elle le devienne. »
Clôturant la séance, le commissaire européen pour l'Emploi, les Affaires sociales et l'Egalité des chances, Vladimir Spidla, s'est voulu rassurant : « Je suis déterminé à défendre des services sociaux soutenables et accessibles à tous. Il existe un besoin de clarté juridique au niveau des règles du marché intérieur. » Mais, a-t-il précisé, « tout le monde sait qu'une directive se décide à 27 au Conseil des ministres de l'Union européenne ». Et de laisser entendre que d'autres instruments étaient et pourraient être précisés dans une communication présentée à l'automne 2007 dans le cadre de l'exercice de révision des règles du marché intérieur.
(1)
(3) Ne sont normalement soumis aux règles européennes que les services économiques. Mais la notion d'« économique » ne recouvre pas la définition française de services marchands et est appréciée très largement par la Commission européenne et la Cour de justice.