Comment certains élèves se retrouvent-ils en dehors du système scolaire avant l'âge légal de fin de scolarité ? En étudiant le parcours de six adolescents de Roubaix, dont la scolarité s'est arrêtée alors qu'ils avaient entre 13 et 15 ans, Maryse Esterle-Hedibel, sociologue, démonte la « chaîne d'exclusions » ayant abouti à leur déscolarisation. Chaque histoire de désaffiliation scolaire est, bien sûr, une affaire singulière dans laquelle interfèrent des paramètres sociaux et des caractéristiques personnelle des protagonistes. La chercheure pointe néanmoins une constante retrouvée dans tous les cas analysés : l'absence de concertation entre les différents acteurs intervenant à l'intérieur et au-dehors de l'institution scolaire. A cet égard, l'étanchéité des relations entre les enseignants et les assistants sociaux scolaires ainsi que le secret professionnel observé par ces derniers s'avèrent particulièrement préjudiciables pour les jeunes. Des enseignants peuvent ainsi méconnaître des événements graves arrivés aux élèves et agir à contretemps. Cependant, même lorsque les personnels scolaires ont en main des données pouvant leur permettre de comprendre la problématique de l'élève - situation familiale l'amenant à s'absenter pour soutenir un parent malade, par exemple -, ces informations ne donnent pas lieu à des analyses ni à des stratégies d'action élaborées collectivement. De leur côté, les travailleurs sociaux ont besoin de temps pour tenter de débloquer les situations et mettre en place des projets avec les adolescents et les familles, alors que l'institution scolaire est dans une logique plus expéditive de traitement des perturbateurs indésirables. Ainsi, des jeunes peuvent se retrouver exclus de l'établissement, sans qu'aucune autre place leur soit pour autant désignée. A l'étude des processus de déscolarisation, il aurait pourtant « suffi de «peu de choses» pour que certains d'entre eux soient enrayés », estime l'auteure : regarder autrement ces « élèves transparents » pour ne pas uniquement analyser leur conduite comme une volonté de ne pas travailler. Et porter un regard différent sur leurs parents, très péjorativement considérés par les personnels scolaires qui font de l'incurie des familles la cause principale des déviances des enfants.
Les élèves transparents. Les arrêts de scolarité avant 16 ans - Maryse Esterle-Hedibel - Ed. Presses Universitaires du Septentrion - 21,50 € .
« Si les conduites à risque sont des appels à vivre, elles sont aussi des appels à l'aide » qui sollicitent une reconnaissance et un accompagnement du jeune en souffrance, explique le sociologue David Le Breton. Cette écoute, les adolescents et/ou leurs familles peuvent la trouver dans des lieux d'accueil spécialisés, dont plusieurs intervenants présentent ici la démarche. Pensant que le meilleur service à rendre à ces jeunes est d'aider leurs parents, c'est un travail clinique réservé à ces derniers que développe un service de l'association Parentel à Brest. « Nous soutenons, chez les parents, leur capacité à porter une parole en leur nom propre à propos de l'expérience qu'ils font eux-mêmes des difficultés juvéniles de leur enfant », c'est-à-dire des effets qu'a sur eux son entrée dans l'adolescence, explique Daniel Coum directeur de Parentel. D'autres dispositifs, comme le Point Ecoute jeunes et parents de Lyon, proposent des entretiens familiaux. Dans ce cadre, « les affects et les représentations différenciés de chacun peuvent se dire en étant entendus, alors que jusqu'ici ce sont surtout les effets confus et destructeurs ou conflictuels des actes qui étaient perçus », expliquent les psychologues Patrick Dessez, Anne Second-Pozo et Hélène de la Vaissière. Quelles que soient les modalités d'intervention mises en oeuvre, c'est à accompagner l'évolution des liens de l'adolescent avec son environnement que s'emploient ces « lieux-passages ». Etre en capacité d'aider les jeunes à quitter le monde de l'enfance et des dépendances : « c'est peut-être dans cette dimension d'aller de l'avant que les adolescents nous attendent », estime le sociologue Patrick Pelège, directeur du centre lyonnais Jean-Bergeret, de prévention des conduites à risques, à l'origine de cet ouvrage.
Adolescents et conduites à risque. Prévention et écoute - Sous la direction de P. Dessez et H. de la Vaissière - Ed. ASH - 21 € .
Représentative de la moyenne européenne, la France compte près de 10 % de la population se déclarant en situation de handicap, soit cinq millions de personnes. Parmi elles, selon le rapport annuel 2005 de l'Agefiph (Fonds pour l'insertion professionnelle des personnes handicapées), près de 939 000 sont susceptibles de travailler, mais seulement 680 000 ont un emploi. C'est dire que les travailleurs handicapés connaissent un taux de chômage plus important que celui de l'ensemble de la population active. En outre, leur durée de chômage est supérieure à celle des autres publics. Fruit des difficultés de scolarisation que rencontrent les enfants handicapés dès leur plus jeune âge, le niveau moyen de formation professionnelle et de qualification des actifs handicapés, plus faible que celui de l'ensemble de la population active, constitue une difficulté majeure pour leur insertion professionnelle. C'est pourquoi l'Agefiph qui, avec la loi « handicap » du 11 février 2005, s'est désengagée du domaine de la scolarité des étudiants handicapés - revenant désormais à l'Education nationale - fait porter une partie importante de son effort sur le cofinancement d'actions de formation qualifiante. Néanmoins, soulignent les auteures, ce sont encore, pour l'essentiel, les préjugés qui font obstacle à l'embauche, au maintien dans l'emploi ou au reclassement de personnes handicapées. Différentes enquêtes menées auprès de chefs d'entreprises ayant recruté des salariés handicapés font pourtant apparaître que ces derniers sont globalement crédités des mêmes qualités que les autres personnels. Aussi, pour combattre les discriminations, convient-il de développer l'information des employeurs tant sur la diversité des situations de handicap et la différence entre handicap et inaptitude au poste de travail, que sur les aides pouvant être mobilisées pour d'éventuels aménagements de poste ou de conditions de travail. Cet ouvrage les détaille, sans dissimuler que, pour faire évoluer les mentalités, les législations coercitives restent d'actualité. A cet effet, comme dans le domaine des incitations, la loi « handicap » du 11 février 2005 introduit de substantielles modifications au plan des sanctions pour non-respect de l'obligation d'emploi de personnes handicapées.
Handicap et emploi. Les finalités de la loi du 11 février 2005 - Claudine Bardoulet et Laurence Igounet - Ed. Vuibert - 22 € .
Admettre que le premier outil d'un intervenant social est sa personne implique « d'oser se positionner comme un sujet qui assume son humanité face à un autre être humain », affirme Christophe Gaignon, éducateur spécialisé, exerçant comme conseiller clinique dans un centre québécois pour adolescents qui présentent des problèmes de santé mentale et des troubles du comportement. Autrement dit, le professionnel engagé dans la relation d'aide ne peut mettre sa vie personnelle entre parenthèses : il doit partager un peu de son histoire avec la personne accompagnée et accepter de se laisser toucher par elle, pour qu'une véritable rencontre entre les deux protagonistes puisse avoir lieu, dont chacun sorte enrichi.
De la relation d'aide à la relation d'êtres. La réciprocité transformatrice - Chrisophe Gaignon - Ed. L'Harmattan - 18 € .
Inversant la logique de la dette sociale selon laquelle l'Etat doit ses secours aux citoyens malheureux, « la responsabilité individuelle envers la société » est aujourd'hui devenue « première par rapport à la responsabilité collective vis-à-vis des individus », affirme Isabelle Astier. Cette vaste entreprise de responsabilisation, promue par les politiques publiques, suppose une modification de l'intervention sociale : passant du « travail sur autrui » au « travail avec autrui », les professionnels ont désormais mission d'accompagner les usagers dans la construction de leur identité personnelle.
Les nouvelles règles du social - Isabelle Astier - Ed. PUF - 24 € .
Ni exclusion irrévocable, ni pleine intégration : les personnes handicapées sont dans un inconfortable entre-deux, ici qualifié de « liminalité ». Collectivement construite, cette situation d'extériorité constitue un mode de traitement de la déficience que le sociologue analyse comme un moyen de préserver l'ordre social troublé par « le désordre des apparences ».
Le handicap ou le désordre des apparences - Alain Blanc - Ed. Armand Colin - 25,50 € .
A partir d'une lecture clinique d'échecs scolaires d'enfants accueillis dans des instituts thérapeutiques, éducatifs et pédagogiques (ITEP), Sylvie Canat propose des réponses pédagogiques visant à « soigner le lien élève-travail scolaire ». Il ne s'agit pas de transformer les enseignants spécialisés en thérapeutes, mais de les inviter à prendre en compte les processus inconscients qui sont en jeu dans la relation éducative, pour répondre aux besoins particuliers des enfants « troublés » dans leur rapport à l'école.
Vers une pédagogie institutionnelle adaptée. Les besoins particuliers des élèves en situation de handicap scolaire - Sylvie Canat - Ed. Champ social - 17 € .
Le travail de paroles mises en commun, dans le cadre de réunions cliniques, vise à faire converger - ou diverger - les représentations de chaque membre de l'équipe pour transformer les impasses en ouvertures. Rendant compte de sa pratique au sein d'institutions de soins pour enfants, adolescents ou adultes, Philippe Bouchez, psychologue-psychanalyste, montre comment les acteurs engagés auprès des résidents peuvent envisager diverses lectures du quotidien pour ouvrir d'autres réponses et briser le cercle des répétitions.
L'institution éducative spécialisée. Entre mise en scène et mise en sens - Philippe Bouchez - Ed. érès - 23 € .
« La naissance, c'est aussi la naissance des parents. » Ils doivent s'adapter au bébé lui-même, parfois loin du bébé rêvé, ainsi qu'à leur nouveau rôle et aux remaniements à l'intérieur du couple. Obligée ou sollicitée, l'intervention des professionnels peut aider à passer les différentes étapes, parfois délicates, de l'apprentissage de la parentalité. L'Ecole des parents et des éducateurs s'est interrogée sur ce qui n'est pas toujours un « heureux événement » lors d'un colloque organisé à Toulouse le 9 décembre 2006.
L'Ecole des parents n° 563 - 180 bis, rue de Grenelle - 75007 Paris - Tél. 01 47 53 62 70 - 11,50 € .
C'est en 1942 et 1943 que sont ouverts les premiers centres de formation pour les « moniteurs » des établissements recevant les jeunes en difficulté. Il faudra ensuite une cinquantaine d'années pour conduire progressivement au diplôme d'Etat d'éducateur spécialisé. Un historien et des témoins ont retracé ce cheminement à l'occasion de la journée d'étude organisée le 28 juin 2006 par le Conservatoire national des archives et de l'histoire de l'éducation spécialisée. Avec une question toujours présente dès que l'on parle de formation et de qualification : tête bien faite ou tête bien pleine ?
Cnahes : 63, rue Croulebarbe - 75013 Paris - Tél. 06 72 60 79 34 - 15 € , port inclus.