« La recherche d'un «vrai chiffre du chômage» est vaine car il existe une diversité de situations de chômage, de sous-emploi et de précarité, qu'il importerait d'éclairer par un petit nombre d'indicateurs pertinents », juge le collectif ACDC (« Autres chiffres du chômage ») (1) dans une note dévoilée le 29 mars, un jour avant la publication des dernières statistiques officielles du chômage (voir ce numéro, page 13). Partant du postulat que, « en baisse ou pas, les indicateurs classiques du chômage - BIT (Bureau international du travail) ou DEFM de catégorie 1 (2) - sont les arbres qui cachent la forêt de l'insécurité sociale », le collectif présente une estimation du nombre de salariés au chômage ou en « emploi inadéquat » au sens du BIT, ce dernier concept recouvrant « quatre types de situations socialement inacceptables et économiquement injustifiées : les bas salaires (moins de 818 € nets par mois), les contrats précaires, le déclassement professionnel et le travail dangereux pour la santé ».
En se fondant sur les données des enquêtes Emploi de l'INSEE de 1990 à 2005, l'institut n'ayant pas encore divulgué les résultats détaillés de celle de 2006, ACDC estime à « 11,4 millions » le nombre de personnes se trouvant en situation d'emploi inadéquat en 2005. En y ajoutant les chômeurs, toujours au sens du BIT, ce serait « 14 millions de personnes » qui seraient « touchées par le chômage total ou l'emploi inadéquat, soit 51 % de la population active »... « Cette proportion n'a cessé d'augmenter depuis 1990 », souligne-t-il, ce qui témoigne, « au-delà des fluctuations conjoncturelles d'un chômage qui se maintient à un niveau élevé », de la dégradation continue de la qualité des emplois.
Le collectif estime « urgent et indispensable de construire un nouveau système d'indicateurs », qui prenne en compte, « sans chercher à les minimiser, la diversité des formes de précarité ». Parce que, « outre bien sûr le chômage total, il faut connaître l'ampleur des situations d'emploi qui ne permettent pas aux travailleurs de gagner décemment leur vie, de prévoir le lendemain, d'utiliser pleinement leurs capacités, de préserver leur santé physique et mentale ».
(1) Créé à l'initiative du Réseau d'alerte sur les inégalités, il rassemble des associations (dont AC ! et le MNCP), des chercheurs et des syndicats (CGT-INSEE, SNU-ANPE et SUD-ANPE).
(2) Catégorie regroupant les personnes inscrites à l'ANPE déclarant être à la recherche d'un emploi à temps plein et à durée indéterminée, et ayant éventuellement exercé une activité occasionnelle ou réduite d'au plus 78 heures dans le mois.