Une série de décrets d'application de la loi « Sarkozy II » du 24 juillet 2006 relative à l'immigration et à l'intégration (1) vient de paraître. Le premier porte sur le droit au séjour en France des citoyens de l'Union européenne, des ressortissants des autres Etats parties de l'Espace économique européen et de la Confédération suisse, ainsi que des membres de leur famille. Le deuxième détaille les modalités de délivrance de la nouvelle carte de séjour « compétences et talents », emblématique du concept d'immigration choisie défendu par Nicolas Sarkozy. Cette carte, accordée pour trois ans, est destinée à faciliter l'accueil des étrangers dont les compétences et les talents sont « susceptibles de participer, de façon significative et durable, au développement économique ou au rayonnement, notamment intellectuel, scientifique, culturel, humanitaire ou sportif de la France ou du pays dont [ils ont] la nationalité ». Enfin, le dernier décret, dont nous présentons les principales dispositions ci-dessous, tire les conséquences, dans la partie réglementaire du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, des nouveautés de la loi du 24 juillet 2006 et apporte des précisions sur les autres titres de séjour créés ou simplement aménagés par la loi. Très volumineux et technique, il fait notamment l'inventaire des pièces à fournir à l'appui d'une demande ou d'un renouvellement de titre de séjour.
Le décret précise notamment les règles à suivre lorsque le demandeur d'un titre de séjour réside hors de France. S'il est titulaire du nouveau statut de « résident de longue durée-CE » accordé dans un autre Etat membre de l'Union européenne (UE) et sollicite à ce titre, comme la loi le lui permet, une carte de séjour temporaire (visiteur, étudiant, scientifique, professions artistiques et culturelles ou « activité professionnelle ») pour venir s'installer en France, il peut déposer sa requête auprès de la représentation consulaire française dans son pays de résidence, qui la transmettra au préfet territorialement compétent. Il en est de même pour les membres de sa famille résidant légalement avec lui sur le territoire de cet Etat qui sollicitent une carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale ».
Quant à l'étranger titulaire d'une carte de résident de longue durée-CE accordée dans un autre Etat membre de l'UE qui sollicite à ce titre une carte de séjour temporaire en France, il doit présenter sa demande dans les trois mois qui suivent son entrée en France. Le même délai est accordé à son conjoint ou son enfant entré mineur sur le territoire sollicitant la délivrance d'une carte de séjour temporaire « vie privée et familiale ».
Dorénavant, les documents que doit produire tout demandeur d'un titre de séjour à l'appui de sa requête doivent être accompagnés, le cas échéant, de leur traduction en français par un traducteur français agréé. Au-delà de cette nouvelle règle, le décret détaille toutes les pièces justificatives à apporter à l'appui d'une demande - ou d'un renouvellement - d'un des nouveaux titres de séjour issus de la loi du 24 juillet 2006 ou d'un de ceux dont le régime a été aménagé, comme la carte de séjour temporaire « scientifique », la carte de séjour temporaire autorisant l'exercice d'une activité professionnelle ou encore celle portant la mention « étudiant ». La loi prévoit que certaines catégories d'étudiants peuvent se voir accorder de plein droit ce dernier titre de séjour. Pour ce faire, précise le décret, l'intéressé doit présenter :
le visa délivré par la représentation française dans le pays de résidence établissant qu'il entre dans l'une des situations visées par la loi ;
un certificat d'immatriculation, d'inscription ou de préinscription dans un établissement public ou privé d'enseignement ou de formation initiale, ou une attestation d'inscription ou de préinscription dans un organisme de formation professionnelle, ou bien une attestation justifiant qu'il est bénéficiaire d'un programme de coopération de l'Union européenne dans les domaines de l'éducation, de la formation et de la jeunesse.
Cas particulier : l'étranger ayant satisfait aux épreuves du concours d'entrée dans un établissement d'enseignement supérieur ayant signé une convention avec l'Etat - soit une des catégories d'étudiants favorisées par la loi - doit pour sa part présenter le visa de séjour comportant la mention « étudiant-concours » établissant qu'il entre dans cette situation et justifie de la réussite au concours pour lequel ce visa lui a été accordé.
L'étranger qui sollicite la délivrance de la nouvelle carte de résident portant la mention « résident de longue durée-CE » doit, quant à lui, se munir de documents justifiant :
qu'il réside légalement et de manière ininterrompue en France depuis au moins cinq ans (2), étant précisé que les périodes d'absence du territoire français ne sont pas défalquées du calcul des cinq années de résidence régulière ininterrompue « lorsque chacune ne dépasse pas six mois consécutifs et qu'elles ne dépassent pas un total de dix mois » ;
des raisons pour lesquelles il entend s'établir durablement en France, notamment au regard des conditions de son activité professionnelle et de ses moyens d'existence ;
qu'il dispose d'un logement approprié ;
qu'il bénéficie d'une assurance maladie ;
qu'il dispose de ressources propres, stables et régulières, suffisant à son entretien, indépendamment des prestations familiales et des certaines allocations expressément visées par la loi, appréciées sur la période des cinq années précédant sa demande par référence au SMIC.
Sur ce dernier point, le décret précise que lorsque les ressources du demandeur ne sont pas suffisantes ou ne sont pas stables et régulières pour la période des cinq années précédant la demande, une décision favorable peut être prise, soit si le demandeur justifie être propriétaire de son logement ou en jouir à titre gratuit, soit en tenant compte de l'évolution favorable de sa situation quant à la stabilité et à la régularité de ses revenus, y compris après le dépôt de la demande.
Le texte liste de la même façon les documents à fournir pour les étrangers ayant acquis le statut de résident de longue durée dans un autre Etat membre de l'UE désireux de bénéficier d'une carte de séjour temporaire ainsi que les justificatifs à apporter pour leurs conjoints et enfants éventuels.
Autre nouvelle règle posée par la loi : l'étranger qui, dans l'année qui suit son 18e anniversaire, justifie par tout moyen avoir résidé habituellement en France avec au moins un de ses parents légitimes, naturels ou adoptifs depuis qu'il a atteint au plus l'âge de 13 ans peut se voir dorénavant accorder de plein droit une carte de séjour temporaire « vie privée et familiale ». Le décret précise que l'intéressé devra néanmoins présenter, entre autres, les pièces justificatives de l'état civil de son ou de ses parents.
Plus globalement, le décret détaille encore les documents à fournir à l'appui d'une demande de carte de séjour temporaire « vie privée et familiale » pour toutes les catégories de demandeurs. Les intéressés doivent notamment présenter non seulement les pièces justifiant qu'ils entrent bien dans l'un des cas prévus par la loi mais aussi, s'ils sont mariés et ressortissant d'un Etat dont la loi autorise la polygamie, une déclaration sur l'honneur selon laquelle ils ne vivent pas en France en état de polygamie.
Le décret donne aussi la liste des pièces à apporter pour obtenir une autorisation provisoire de séjour dans les trois nouveaux cas prévus par la loi du 24 juillet 2006 : étudiants étrangers diplômés souhaitant compléter leur formation par une première expérience dans l'Hexagone, étrangers venus en France pour y exercer une mission de volontariat et parents d'enfants étrangers gravement malades. Tous doivent ainsi présenter à l'appui de leur requête les indications relatives à leur état civil ainsi que « trois photographies de face, tête nue, de format 3,5 x 4,5 cm, récentes et parfaitement ressemblantes ». Des pièces supplémentaires sont réclamées aux étudiants diplômés, dont notamment « une lettre, éventuellement complétée de tout moyen de preuve, indiquant les motifs au regard desquels l'expérience professionnelle envisagée peut être considérée comme participant directement ou indirectement au développement économique de la France et du pays dont il a la nationalité et s'inscrit dans la perspective du retour dans son pays d'origine ».
(2) Sous couvert de l'une des cartes de séjour visées par la loi.