Les directions de l'administration pénitentiaire et de la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) donnent, dans un document méthodologique à l'attention de leurs services déconcentrés, leurs consignes pour la mise en oeuvre prochaine des sept établissements pénitentiaires spécialisés pour mineurs (EPM) - totalisant 420 places -, qui seront livrés entre avril 2007 et juillet 2008 (1).
L'établissement pénitentiaire pour mineurs est une structure autonome placée sous la responsabilité de l'administration pénitentiaire (2). Ses 60 places accueillent des mineurs prévenus et condamnés, garçons et filles, âgés de 13 à 18 ans. L'éducation est au coeur de la prise en charge des jeunes dans l'objectif de préparer leur sortie et leur réinsertion. Si la mixité est de principe dans le cadre des activités, ce n'est pas le cas au sein des unités de vie.
Une instance d'orientation pluridisciplinaire doit être installée afin de décider de l'orientation du jeune en EPM ou en quartier des mineurs. Cette procédure consiste à réunir les éléments relatifs à la personnalité du jeune et, d'une manière générale, « tous renseignements susceptibles d'éclairer l'autorité compétente pour décider de l'affectation la plus adéquate ». Elle est systématiquement mise en oeuvre lorsque le mineur condamné a un temps de détention restant à subir supérieur à trois mois. Toutefois, estime l'administration, « il est préconisé de la mettre en oeuvre pour les mineurs condamnés dont la durée d'incarcération est moindre, dès leur arrivée à l'établissement ». Un dossier d'orientation est alors établi pour chacun des mineurs, retraçant notamment leur situation pénale et pénitentiaire, les conditions de prise en charge éducative et sanitaire, l'avis du juge des enfants saisi, des titulaires de l'autorité parentale et, le cas échéant, de tout service ayant à connaître de leur situation. L'instance rend une proposition d'orientation circonstanciée, sur la base de laquelle les autorités compétentes prennent leur décision (le magistrat s'il s'agit de prévenus et le directeur régional des services pénitentiaires dans le cas des condamnés).
Dès son arrivée, le mineur est dirigé vers l'« unité arrivants » sous l'autorité d'un binôme éducateur-surveillant, comme dans toutes les autres unités de l'EPM. Et doit être reçu « dans les plus brefs délais » par le chef d'établissement. Le jeune ne participe pas aux activités collectives de l'EPM mais à des activités socio-éducatives individuelles ou collectives entre mineurs arrivants.
Le maintien dans cette unité doit se faire pendant un temps « strictement nécessaire » - d'une durée raisonnable « de trois à cinq jours », précise le document - afin de permettre au jeune de se situer dans son nouvel environnement (3). Quant à l'équipe pluridisciplinaire, ce temps lui permettra d'identifier les capacités et les besoins du jeune, et d'organiser son emploi du temps individualisé. A cette occasion, le mineur doit aussi être informé des règles de vie et de fonctionnement dans l'établissement et bénéficier d'un entretien éducatif avec un représentant de la PJJ et un psychologue du service éducatif en EPM, entretien au cours duquel des bilans sont effectués dans les domaines éducatif, social, scolaire et judiciaire. En outre, le mineur doit faire l'objet « dans les plus brefs délais » d'un examen médical comportant obligatoirement un entretien psychiatrique ou psychologique, et d'un bilan pédagogique.
Chaque unité de vie accueille simultanément dix mineurs au maximum pris en charge par un binôme éducateur-surveillant. Objectifs : apprentissage de la vie collective et des liens sociaux et suivi individuel en détention, la journée de détention étant fixée de 7 h 30 à 21 h 30 (4). L'affectation dans une unité de vie se fait à la sortie de l'« unité arrivants » sur décision du directeur de l'EPM ou, le cas échéant, en cours de détention sur proposition d'un personnel de l'unité de vie au regard de l'évolution du mineur, de son positionnement dans le groupe ou des difficultés repérées. Cette orientation doit bien être dissociée des sanctions disciplinaires, insiste l'administration.
Lors de son passage, le mineur bénéficie d'un accompagnement pluridisciplinaire et individualisé axé sur la réflexion sur le ou les actes ayant conduit à sa détention, le suivi d'un parcours d'apprentissage ou encore la restauration ou le maintien des liens familiaux. Sur ce dernier point, l'administration indique que, quel que soit le régime de détention, des temps de parloirs, y compris téléphoniques, doivent être organisés (5). Le premier parloir doit être précédé d'un entretien éducatif avec la famille.
Ce travail doit au final aboutir à l'élaboration et à la mise en oeuvre d'un projet de sortie. Si, durant cette période, le jeune rencontre des « difficultés importantes vis-à-vis du groupe au point de s'en trouver gravement perturbé, voire de se sentir menacé », il devrait bénéficier, selon un décret à paraître, d'une mesure de protection individuelle, alors qu'actuellement il est placé à l'isolement. Il ne s'agirait donc plus d'un isolement cellulaire mais de la « mise en oeuvre de dispositifs particuliers de protection, notamment par une attention plus soutenue aux contacts entre le mineur concerné et les autres mineurs détenus », explique le ministère de la Justice. Après avoir entendu le mineur, le chef de l'EPM pourra donc décider de sa mise sous protection ou du renouvellement de cette mesure, dont la « durée doit être limitée dans le temps », et en informera le juge en charge de son dossier.
Durant sa détention, le mineur doit participer tous les jours à des activités variées, avec un accent mis sur la scolarisation (6) : 20 heures de formation, 20 heures d'activités socio-culturelles et 20 heures d'activités sportives. L'année scolaire est organisé sur 41 semaines et, en dehors de cette période, les activités socio-culturelles et sportives prennent le relais. Signalons que le mineur n'aura pas le statut de stagiaire de la formation professionnelle.
Le projet de sortie de l'équipe disciplinaire intervenant en détention diffère selon que le mineur est connu ou non des services de la PJJ et qu'il est appelé à bénéficier ou non d'une mesure éducative après sa détention. Dans tous les cas, il doit aborder les questions d'hébergement, d'insertion socio-professionnelle, de socialisation ou de couverture sociale du mineur et proposer des solutions en la matière. A noter : les parents sont associés à l'ensemble du parcours de détention de leur enfant, y compris et surtout pour ce qui concerne les phases d'élaboration et d'exécution du projet de sortie.
(1) Les EPM seront implantés près de Paris (deux), Lille, Lyon, Marseille, Toulouse et Nantes.
(2) Dans le cadre de la détention, l'EPM se décompose en quatre pôles : le pôle unités d'hébergement, le pôle activités d'enseignement et socio-éducatif, le pôle santé et le pôle sportif.
(3) Pour les mineurs ayant déjà fait l'objet d'une précédente incarcération en EPM, ce temps d'observation reste indispensable pour tenir compte d'une évolution de leur situation personnelle.
(4) Toutefois, en fonction du projet d'établissement, le règlement intérieur peut prévoir des horaires aménagés, notamment pour les week-ends, jours fériés et vacances scolaires, périodes durant lesquelles l'administration préconise la présence des mêmes surveillants que ceux qui interviennent au cours de la semaine.
(5) Les détenus mineurs devraient bénéficier de trois parloirs par semaine fixés en priorité les mercredis après-midi, samedis et dimanches.
(6) Sur l'organisation de la scolarité dans les EPM, voir ASH n° 2499 du 23-03-07, p. 15.