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Aménagements de peine : des réformes difficiles à appliquer, selon les JAP

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Une enquête de l'Association nationale des juges de l'application des peines (ANJAP) (1), présentée lors d'un colloque qu'elle organisait le 14 mars, livre une photographie de la pratique de ces professionnels dont les fonctions ont considérablement évolué, notamment depuis la loi Perben II du 9 mars 2004 et celle du 12 décembre 2005 sur le traitement de la récidive des infractions pénales.

De bonnes relations avec les SPIP

Les résultats de l'étude, à laquelle ont répondu 105 juges de l'application des peines (JAP), soit près d'un tiers de l'ensemble, témoignent en premier lieu du manque de moyens dont souffrent ces magistrats, dont l'effectif prévu en 2007 est de 353 pour 183 000 condamnés. 60 % évoquent des difficultés matérielles et 68 % indiquent ne pas avoir eu de personnels supplémentaires suite aux dernières réformes.

Autre enseignement : la bonne qualité des relations entre les juges de l'application des peines et les services pénitentiaires d'insertion et de probation (SPIP). Ainsi, les comptes rendus réalisés par ces derniers sont considérés comme étant au moins satisfaisants par 82 % des JAP, leurs enquêtes sont qualifiées de « bonne qualité » par 81 % et le suivi réalisé est apprécié par 84 % d'entre eux. Paradoxe néanmoins, qui soulève la question du respect du mandat confié aux SPIP et celle des difficultés de communication entre les deux champs professionnels : 62 % des répondants estiment ne pas avoir les moyens de contrôler l'exécution des mesures et les orientations qu'ils donnent.

L'enquête révèle par ailleurs que toutes les procédures prévues par les différentes réformes ne sont pas encore pleinement appliquées dans les tribunaux. Ainsi, les aménagements de peine « ab initio », c'est-à-dire décidés dès le prononcé de la peine par la juridiction de condamnation (semi-liberté et, depuis la loi du 9 mars 2004, placement sous surveillance électronique ou placement extérieur), n'ont été mis en oeuvre que par 60 % des JAP interrogés durant les 12 derniers mois. 45 % d'entre eux indiquent n'avoir jamais mis en oeuvre le dispositif et 44 % disent même y être « hostiles ». « La raison de cette réticence est le manque d'information dont dispose la juridiction pour prendre une décision en connaissance de cause, commente Michaël Janas, président de l'ANJAP. Il est difficile, par exemple, en l'état des moyens de la permanence d'orientation pénale, de vérifier que le prévenu dispose dans les faits de l'emploi qu'il a prétendu avoir oralement. »

Par ailleurs, le suivi socio-judiciaire, auparavant réservé aux condamnés pour une infraction sexuelle, a été étendu par la loi du 12 décembre 2005 et par la loi sur la prévention de la délinquance du 5 mars 2007. Seulement, 23 des 82 tribunaux de grande instance interrogés précisent ne pas disposer du médecin coordonnateur dont l'intervention est nécessaire pour informer le JAP du contenu des soins engagés. Et sur les 59 médecins existants, 14 sont déjà « saturés » puisqu'ils ont atteint le quota annuel de 15 dossiers fixé par le ministère de la Santé.

A la question « Avez-vous constaté une modification du nombre de placements extérieurs ? », 64 magistrats ont répondu par la négative. 18 ne se sont pas prononcés, dont 4 indiquant l'absence de cette mesure ou de postes disponibles sur leur ressort. Quant au placement sous surveillance électronique, 91 % des JAP estiment qu'il fonctionne correctement. « Ils craignent cependant que la valorisation technologique n'entraîne un désengagement des SPIP sur le suivi de ces aménagements de peine et que les obligations fixées par les magistrats soient moins contrôlées, nuance Michaël Janas. Le Canada a d'ailleurs refusé de recourir à cette mesure pour ces motifs. »

Réaménager le « sas de sortie »

Introduit par la loi du 9 mars 2004, le « sas de sortie » - aménagement de peine qui doit être systématiquement proposé par le directeur de SPIP pour les courtes et moyennes peines - ne semble pas fonctionner. 70 % des magistrats indiquent en effet ne pas être saisis dans le cadre de cette mesure. La plupart des JAP se sont exprimés en faveur de sa suppression. En revanche, 68 % des requêtes présentées sont accordées. « Ces chiffres démentent l'idée selon laquelle la mesure se heurte aux refus des JAP, explique Michaël Janas. Les magistrats estiment que l'idée de confier aux travailleurs sociaux l'impulsion des aménagements de peine est à préserver, mais qu'il faut réaménager le dispositif, notamment parce qu'il est très chronophage pour les SPIP. »

L'enquête donne enfin un éclairage particulier sur la suspension de peine pour motif médical, en s'intéressant aux motifs de rejet de la mesure (2). Près de 60 % des répondants ont été saisis d'une requête en la matière au cours des 12 derniers mois. 59 % des refus sont expliqués par la discordance entre les deux expertises médicales exigées par la loi, 24 % par le constat d'un risque grave de récidive et 17 % par les difficultés à trouver un lieu d'hébergement pour le condamné.

Notes

(1) ANJAP : C/o Michael Janas - Tribunal de grande instance - Rue Pierre-Clément - 83300 Draguignan.

(2) Sur le bilan du dispositif, voir ASH n° 2496 du 2-03-07, p. 37.

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