Une baisse globale des actes racistes, xénophobes et antisémites mais des violences et menaces au caractère de gravité accru et touchant de plus en plus aux personnes physiques, et une relative croissance de l'antisémitisme : le bilan de l'année 2006 dressé par la Commission nationale consultative des droits de l'Homme (CNCDH) en termes de racisme, de xénophobie et d'antisémitisme est « très nuancé », a souligné le président de l'instance, Joël Thoraval, le 21 mars, lors de la remise au gouvernement de son rapport annuel sur le sujet (1). « Certains chiffres sont porteurs d'espoir, la mobilisation des autorités est encourageante, mais l'examen attentif des données statistiques nous montre que le combat est loin d'être gagné », a-t-il ajouté.
La CNCDH se félicite ainsi, tout d'abord, de la baisse globale des actes de racisme, de xénophobie et d'antisémitisme en France (- 10 %), particulièrement significative à l'école. Selon les données du ministère de l'Education nationale - qui ne sont pas complètes, tempère néanmoins le rapport -, le nombre d'actes racistes signalés dans le milieu scolaire a ainsi diminué de 20 % en 2006 et les actes antisémites sont pour leur part en baisse de 40 %. La commission signale au passage le décalage entre ces chiffres et ceux du ministère de l'Intérieur, quasiment stables par rapport à l'année précédente. « Ce décalage s'explique par le fait que ne sont portés à la connaissance des services de police et de gendarmerie que les faits les plus graves et qui ont entraîné le dépôt d'une plainte par les victimes » alors que l'éventail des faits recensés par l'Education nationale est beaucoup plus large, indique le rapport.
La baisse globale constatée ne peut toutefois masquer certains « éléments inquiétants », relève la commission. Ainsi, même si on dénombre un total de 885 actions et menaces racistes, xénophobes et antisémites (contre 974 en 2005), « il est [...] difficile de parler d'une véritable tendance à la diminution du racisme et de l'antisémitisme en France ». Car, si l'on distingue les données entre racisme et xénophobie d'une part et antisémitisme d'autre part, les chiffres fournis par le ministère de l'Intérieur révèlent que le nombre des violences et menaces antisémites était de 541 en 2006 contre 508 en 2005, soit une hausse de 6 % ». En outre, la tendance à un renforcement de la violence, déjà constatée en 2005, s'est trouvée confirmée l'année suivante et les personnes physiques en ont été les premières victimes. La part des actes ou menaces ayant fait des victimes est ainsi passée de 4,9 % en 2005 à 5,7 % en 2006 et celle des actes de violence, dans l'ensemble des actes et menaces racistes et antisémites recensés, est passé de 19 % en 2005 à 22 % en 2006.
Autre source de préoccupation : un sondage d'opinion réalisé par la CNCDH montre que « dans un contexte toujours marqué par de fortes préoccupations économiques et sociales, les immigrés et les étrangers restent souvent stigmatisés ». Les préjugés xénophobes n'ont pas disparu et restent à un niveau élevé, 30 % des personnes interrogées s'avouant ainsi racistes.
Au-delà de ce bilan, l'instance fait, comme d'habitude, un certain nombre de recommandations. Elle insiste notamment sur le fait que, pour elle, la lutte contre le racisme, l'antisémitisme et la xénophobie doit faire l'objet d'une « politique spécifique et concertée ».
(1) La lutte contre le racisme, l'antisémitisme et la xénophobie - Année 2006 - Disponible sur