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Le collectif « Pas de zéro de conduite » toujours inquiet des risques de dévoiement de la prévention

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Un an après le lancement de son appel (1), qui a recueilli plus de 200 000 signatures, le collectif « Pas de zéro de conduite pour les enfants de trois ans » (2) « entend occuper une position de vigie active sur le terrain, dans le champ de la recherche et sur les prises de décisions politiques », a annoncé le 20 mars Pierre Suesser, vice-président du Syndicat national des médecins de PMI.

Pour le collectif en effet, les motifs de crainte sont loin d'être levés en matière de prévention psychique et de secret professionnel. L'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm), il est vrai, a annoncé en novembre 2006 une révision de ses procédures d'expertise dans le champ de la santé mentale, suite à la mobilisation du collectif contre son approche « déterministe » et « scientiste ». Cette même approche a ensuite été désavouée par le Comité consultatif national d'éthique le 6 février dernier (3). Mais l'Inserm vient de publier une nouvelle expertise sur les troubles de l'apprentissage (4), qui avait été dévoilée dès le mois de décembre, tendant de nouveau « à la normalisation biologique du soin et de l'éducation », estime Roland Gori, psychanalyste et président du Séminaire universitaire intereuropéen d'enseignement et de recherche en psychopathologie et psychanalyse. Récidive ? « On peut espérer qu'elle soit davantage le résultat d'une inertie que d'une volonté délibérée de persister, nuance-t-il. Nous verrons si le tir est corrigé dans les prochains travaux. »

En outre, le collectif, qui a obtenu que les dispositions sur le dépistage des troubles du comportement du petit enfant soient retirées de la loi relative à la prévention de la délinquance, reste en alerte sur le sujet. Alors que les bilans de santé des jeunes enfants appellent une démarche de « prévention ouverte sur les préoccupations directement exprimées par l'enfant ou les adultes qui l'entourent », des pratiques contestables de dépistage existent, témoigne-t-il. Adressée par un service de PMI, telle « échelle d'évaluation du comportement » à remplir par les enseignants comporte des items comme « taquine ou brutalise les autres enfants », « est facilement blessé » ou « accuse les autres, ne reconnaît pas ses erreurs »... Une autre, émanant d'un service de santé scolaire, interroge sur la susceptibilité ou l'humeur des élèves. « Nous sommes inquiets du glissement qui consiste pour les services ayant mission de santé à instrumentaliser les personnels enseignants pour faire de la détection précoce », explique Marie-Thérèse Fritz, pédiatre en PMI.

Autre préoccupation : l'instauration du bilan psychosocial systématique au 4e mois de grossesse par la loi sur la protection de l'enfance. Cette intervention obéit selon Michel Dugnat, pédopsychiatre et président de l'Association de recherche et d'information en périnatalité, à une logique sécuritaire à peine voilée : « Non contents de l'idée déjà désastreuse de faire faire un bilan psychosocial à des personnels médicaux, les députés ont rendu cet examen systématique. Ce qui est une perversion radicale de son principe. » Plus de vingt associations et syndicats avaient, lors de l'examen du texte en seconde lecture au Parlement, réclamé qu'à la place un « entretien prénatal précoce » soit « systématiquement proposé ». N'ayant pas été entendues, les organisations appellent les professionnels concernés à « promouvoir un suivi et un accompagnement des grossesses respectueux des besoins et des demandes des femmes enceintes et des futurs pères ». Et attendent d'être consultées sur la rédaction du guide de recommandations prévu par le ministère.

Le collectif regrette enfin de ne pas avoir réussi à faire reculer le gouvernement sur le partage du secret professionnel avec les maires dans le cadre de la loi sur la prévention de la délinquance. « Notre action n'est pas une force de blocage mais une force d'interrogation, de stimulation et de contre-dérive », insiste Bernard Golse, chef de service de pédopsychiatrie à l'hôpital Necker et fondateur de la World Association for Infant Mental Health. Au lieu de mettre en oeuvre des pratiques paralysantes pour les professionnels comme pour les familles, mieux vaudrait, prône-t-il, s'intéresser à des expériences qui ont porté leurs fruits tout en respectant la déontologie et les pratiques professionnelles.

Le collectif, qui prévoit d'organiser en octobre une rencontre scientifique interdisciplinaire sur une prévention « globale, complexe, humanisante et éthique », a adressé le 21 mars une lettre aux candidats à la présidentielle. « Comment entendez-vous agir pour garantir aux familles les plus en difficulté une protection scrupuleuse de leur vie privée et favoriser de véritables actions de prévention auprès des enfants et des familles hors de toute dérive sécuritaire et prédictive ? », leur demande-t-il. Les candidats sont également invités à se prononcer sur l'abrogation des dispositions de la loi sur la prévention de la délinquance « qui portent atteinte au secret professionnel dans le domaine de l'accompagnement social et de la santé ».

Notes

(1) Voir ASH n° 2448 du 24-03-06, p. 36.

(2) Pasde0deconduite@wanadoo.fr.

(3) Voir ASH n° 2493 du 9-02-07, p. 13.

(4) « Dyslexie, dysorthographie, dyscalculie, bilan des données scientifiques » - Février 2006.

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