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La réflexion s'organise autour du travail social et du développement communautaires

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Face aux discriminations et à la relégation de certains groupes de population en raison de leur origine, faut-il promouvoir le travail social « communautaire », entendu au sens d'interventions sociales menées auprès de communautés ethniques, culturelles ou religieuses ? Telle est la question, pour le moins dérangeante, qu'a posée, en décembre dernier, José Dhers, chargé de développement social et président du réseau Idelif (Initiatives du développement local en Ile-de-France). Avec d'autres acteurs de l'approche territoriale et des professionnels (formateurs, sociologue...), il a en effet lancé, à cette date, un appel à « revisiter sereinement la question communautaire dans le cadre, intimement lié, du développement social et du travail social » (1). Appel dont l'écho (89 signataires actuellement) a surpris les initiateurs compte tenu des réticences suscitées habituellement par cette problématique.

Aussi, afin de mettre cette question en débat et de le prolonger par des actions concrètes avec les personnes et réseaux intéressés, les promoteurs avaient organisé le 7 mars une première réunion au Cédias-Musée social. 55 personnes - pour la plupart cosignataires - étaient présentes : des assistants sociaux et des éducateurs spécialisés dont de nombreux chefs de service, des formateurs, des chercheurs, mais aussi des chefs de projets urbains et quelques élus locaux...

Cette rencontre a mis en évidence les ambiguïtés dans l'interprétation du concept de « travail social communautaire » assimilé, selon les uns ou les autres, au développement social local, au travail social avec les groupes ou à l'intervention sociale d'intérêt collectif, sans que la dimension communautaire soit toujours prise en compte. « Pourtant, beaucoup de travailleurs sociaux mènent des actions collectives avec des communautés ethniques, mais sans oser appeler les choses par leur nom. Parler de travail social mené auprès de communautés s'identifiant en référence à une ethnie, une culture ou une religion, reste encore un sujet tabou », souligne José Dhers. Et d'expliquer que quelques-uns hésitent encore à parapher l'appel en raison du terme « communautaire » qu'ils assimilent à « communautariste ». « Il s'agit au contraire de développer au niveau des territoires un travail social respectueux de l'histoire et des identités des populations et d'éviter ainsi les risques de repli «communautariste» qu'on observe aujourd'hui dans beaucoup de quartiers », soutient le responsable de la démarche.

Nul doute que le terme embarrasse parce qu'il bouscule les représentations liées à la conception du modèle français d'intégration et/ou à la culture de chefs de service ou de cadres formés dans les années 80 à l'approche individuelle du casework. L'étude de l'IGAS intitulée L'intervention sociale, un travail de proximité (2) relève d'ailleurs qu'en 1988, le rapport du Conseil supérieur du travail social sur l'intervention sociale d'intérêt collectif manifestait déjà « une très grande prudence » quant au terme « communautaire » et préférait se référer à la notion de « travail social d'intérêt collectif » (3) : « Les vocables d'«action collective» et de «travail social communautaire» véhiculent trop de malentendus, pour des raisons diverses, pour être retenus », expliquait-il. « Un raisonnement qu'on ne peut plus tenir en 2007 », rétorque José Dhers, qui estime qu'avec la crise du modèle d'intégration à la française, il faut réconcilier les termes de « citoyenneté » et d'« appartenance communautaire ».

Certains participants à la rencontre n'ont pas manqué non plus de faire remarquer - comme l'avait d'ailleurs fait l'Association nationale des assistants de service social (4) - que les méthodologies de l'intervention collective ne sont pas nouvelles et existent depuis les années 60. La réforme du diplôme d'Etat d'assistant de service social a même renforcé l'enseignement et la pratique de l'intervention sociale d'intérêt collectif. Reste que sa mise en oeuvre se heurte sur le terrain au cloisonnement des dispositifs et au manque de soutien des professionnels au niveau des moyens, de l'organisation et des orientations fixées par leurs employeurs. « Le premier volet de la décentralisation de l'action sociale aurait pu être l'occasion d'accroître la démarche de développement social territorial. Mais elle n'a conduit qu'à la reprise par les conseils généraux de l'essentiel du travail social classique dont les aspects les plus administratifs, pour des raisons budgétaires, ont été renforcés », analyse José Dhers. Aussi, au moment où l'on s'interroge sur l'efficacité de l'intervention sociale, il estime que le deuxième volet de la réforme - qui transfère notamment la formation des travailleurs sociaux aux régions - doit être l'occasion de réconcilier le travail social individuel avec une approche territoriale du développement local davantage centrée sur la dimension communautaire.

Si la problématique posée par l'appel suscite un intérêt certain auprès des travailleurs sociaux et de leurs partenaires, reste néanmoins à affiner les concepts et à enrichir une réflexion qui n'est encore qu'embryonnaire et demande à être précisée. Un séminaire permanent a donc été lancé le 7 mars autour d'un comité de pilotage constitué d'une quinzaine de personnes volontaires. L'un de ses objectifs pourrait être d'organiser un colloque au début de l'année 2008 sur le travail social et le développement communautaires. Par ailleurs, l'Association des régions de France et l'Assemblée des départements de France ont été contactées. Une nouvelle rencontre ouverte à tous est d'ores et déjà fixée au 17 septembre au Cédias-Musée-social.

Notes

(1) Voir ASH n° 2487 du 29-12-06, p. 31- Appel sur le site Internet : http://irdsu.net/article.php3?id article = 267.

(2) Voir ASH n° 2441 du 8-12-06, p. 5.

(3) Qui regroupe sous ce terme le travail social communautaire, l'action sociale collective et le développement social local.

(4) Voir ASH n° 2494 du 16-02-07, p. 47.

LE SOCIAL EN ACTION

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