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Députés et sénateurs donnent leur feu vert à la loi sur la prévention de la délinquance

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Dernier texte de la législature défendu par Nicolas Sarkozy, la loi relative à la prévention de la délinquance a été adoptée définitivement par le Parlement le 22 février. Réorganisation de la prévention de la délinquance autour des maires, partage des informations entre professionnels, « responsabilisation » des parents d'enfants en difficulté, réforme de l'ordonnance de 1945 sur les mineurs délinquants, création de nouvelles infractions : les grandes lignes du texte sont connues... même si ce dernier ne va finalement pas aussi loin que le ministre de l'Intérieur l'aurait souhaité. Le pensionnaire de la Place Beauvau a dû en effet composer avec la forte contestation soulevée par son projet de loi. Retournement de situation le plus spectaculaire : le retrait d'une série d'articles modifiant les règles en matière d'hospitalisation d'office et de sortie des établissements psychiatriques (1). Le gouvernement s'est en revanche montré moins flexible concernant les dispositions touchant le travail social et en particulier sur le secret partagé, malgré les critiques répétées des associations.

Tour d'horizon des principales dispositions, sous réserve de la décision du Conseil constitutionnel, saisi par les parlementaires socialistes.

Le maire, pilote de la prévention de la délinquance

Comme prévu, la loi place le maire en première ligne dans le domaine de la prévention de la délinquance. L'élu est dorénavant le dépositaire d'un certain nombre de données scolaires, judiciaires ou sociales sur ses administrés. Un point en particulier aura fait débat en la matière : la question du partage du secret professionnel entre l'édile et les travailleurs sociaux. Après plusieurs réécritures, le texte prévoit finalement que « lorsqu'un professionnel de l'action sociale [...] constate que l'aggravation des difficultés sociales, éducatives ou matérielles d'une personne ou d'une famille appelle l'intervention de plusieurs professionnels », il en informe le maire de la commune de résidence et le président du conseil général. Il est autorisé dans ce cadre à révéler à ces derniers - et à eux seuls - « les informations confidentielles qui sont strictement nécessaires à l'exercice de leurs compétences ».

Dans le cas où plusieurs professionnels de l'action sociale interviennent auprès d'une même personne ou d'une même famille, si « l'efficacité et la continuité de l'action sociale le rendent nécessaire », l'édile - qu'il ait été saisi ou non puisque la loi l'autorise à le faire de sa propre initiative - doit désigner parmi eux un coordonnateur, après accord de l'autorité dont il relève et consultation du président du conseil général. Si les professionnels concernés dépendent tous de l'autorité du président du conseil général, le maire devra choisir le coordonnateur proposé par ce dernier.

Les personnes qui interviennent auprès d'une même personne ou d'une même famille sont par ailleurs autorisées à partager entre elles des informations à caractère secret, « afin d'évaluer leur situation, de déterminer les mesures d'action sociale nécessaires et de les mettre en oeuvre ». Le coordonnateur doit avoir connaissance des informations ainsi transmises et le partage de ces informations doit être « limité à ce qui est strictement nécessaire à l'accomplissement de la mission d'action sociale ». Quant au coordonnateur lui-même, il est autorisé à transmettre au maire et au président du conseil général les informations confidentielles « strictement nécessaires à l'exercice de leurs compétences ».

A noter : la loi impose au coordonnateur - ou au professionnel intervenant seul auprès d'une personne ou d'une famille en difficulté - d'avertir sans délai le président du conseil général s'il apparaît qu'un mineur est « susceptible d'être en danger ». Le travailleur social devra aussi informer le maire de cette « transmission ».

De nouveaux pouvoirs de sanction sont par ailleurs confiés aux maires pour leur donner les moyens d'agir contre ceux que le gouvernement appelle les « parents défaillants ». Ainsi, « lorsqu'il ressort de ses constatations ou d'informations portées à sa connaissance que l'ordre ou la sécurité ou la tranquillité publics sont menacés à raison du défaut de surveillance ou d'assiduité scolaire d'un mineur », un édile peut dorénavant proposer aux parents un « accompagnement parental » - c'est-à-dire un suivi individualisé au travers d'actions de conseil et de soutien à la fonction éducative -, après avoir vérifié qu'ils n'ont pas conclu un contrat de responsabilité parentale et qu'aucune mesure d'assistance éducative n'a été ordonnée. Au terme de l'accompagnement, ils se verront délivrer une attestation comportant leur engagement solennel de se conformer aux obligations liées à l'exercice de l'autorité parentale. S'ils refusent l'accompagnement ou s'ils l'accomplissent de manière partielle, le maire saisira le président du conseil général en vue de la conclusion éventuelle d'un contrat de responsabilité parentale.

Autre nouvelle prérogative accordée aux élus : la possibilité de saisir - conjointement avec l'organisme débiteur des prestations familiales - le juge des enfants pour lui signaler « les difficultés d'une famille », afin qu'il ordonne une « mesure judiciaire d'aide à la gestion du budget familial » (voir ce numéro, page 7). Le maire pourra, le cas échéant, proposer au juge que le professionnel qu'il a désigné comme coordonnateur soit choisi pour être le « délégué aux prestations familiales » dans le cadre de cette mesure.

A signaler également : un conseil municipal peut dorénavant décider de créer un « conseil pour les droits et devoirs des familles », nouvelle instance composée notamment de « personnes oeuvrant dans les domaines de l'action sociale, sanitaire et éducative, de l'insertion et de la prévention de la délinquance » et dont les rênes sont confiées au maire. A charge pour ce dernier de réunir le conseil pour, entre autres, examiner avec une famille en difficulté les mesures d'aide à l'exercice de la fonction parentale susceptibles de lui être proposées. Lorsque le suivi social ou les informations portées à sa connaissance font apparaître que la situation d'une famille ou d'un foyer est de nature à compromettre l'éducation des enfants ou la stabilité familiale et qu'elle a des conséquences sur la tranquillité ou la sécurité publiques, le conseil pour les droits et devoirs des familles peut par ailleurs proposer au maire de saisir le président du conseil général en vue de la mise en oeuvre d'une mesure d'accompagnement en économie sociale et familiale.

A noter : la loi rend obligatoire la création de conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance pour les communes de plus de 10 000 habitants, ainsi que pour celles comprenant une zone urbaine sensible.

Durcissement des sanctions contre les mineurs

La loi procède à une nouvelle révision de l'ordonnance de 1945 relative à l'enfance délinquante. Elle adapte les mesures de comparution immédiate aux mineurs - avec la nouvelle procédure de présentation immédiate devant le juge des enfants aux fins de jugement - et enrichit la palette des sanctions susceptibles d'être prononcées à leur égard : élargissement de la médiation-réparation et de la composition pénale aux mineurs, consécration législative de l'avertissement solennel, création d'une mesure d'activité de jour susceptible d'être prononcée à différents stades d'une procédure judiciaire et s'adressant plus particulièrement aux jeunes désocialisés, diversification des mesures de contrôle judiciaire pour les 13-16 ans, création de nouvelles sanctions éducatives à l'égard des plus jeunes comme le placement, pour trois mois au maximum, de mineurs de 10 à 13 ans « dans une institution ou un établissement public ou privé d'éducation habilité permettant la mise en oeuvre d'un travail psychologique, éducatif, social portant sur les faits commis »... Un point aura plus particulièrement fait débat et concentré les tensions au sein de la majorité : la question de la suppression de « l'excuse de minorité », qui permet aux magistrats de diviser par deux la peine applicable aux mineurs. Au final, un compromis a été trouvé. Le tribunal pour enfants et la cour d'assises des mineurs devraient ainsi pouvoir écarter l'excuse de minorité (sans motivation en cas de récidive) pour les mineurs de 16 ans soit compte tenu des circonstances et de la personnalité du mineur, soit parce que les faits constituent une atteinte volontaire à la vie ou à l'intégrité physique ou psychique de la personne et qu'ils ont été commis en état de récidive légale.

Dispositions diverses

Au fil de la discussion parlementaire, le projet de loi s'est enrichi avec l'adoption de nouvelles mesures se révélant de nature plus répressive que préventive. Le texte final sanctionne ainsi plus durement l'infraction d'occupation abusive des halls d'immeuble, en cas de voies de fait ou de menaces. En outre, tous les propriétaires doivent dorénavant, après mise en demeure dûment motivée et sauf motif légitime, utiliser les droits dont ils disposent afin de faire cesser les troubles de voisinage causés par leurs locataires.

Par ailleurs, dans les communes qui respectent leurs obligations en matière d'aménagement d'une aire d'accueil, celles qui bénéficient du délai supplémentaire accordé par la loi « décentralisation » du 13 août 2004 pour réaliser une aire d'accueil, et celles qui disposent d'un emplacement provisoire, le propriétaire d'un terrain indûment occupé par des gens du voyage peut désormais demander au préfet de mettre en demeure les occupants de quitter les lieux, sous 24 heures au moins. Pendant ce délai, les gens du voyage auront la possibilité d'aller contester la décision du préfet devant le tribunal administratif, qui aura alors 72 heures pour statuer.

Nous reviendrons plus en détail sur la loi relative à la prévention de la délinquance dans un prochain numéro.

(Loi à paraître)
Notes

(1) Voir ASH n° 2494 du 16-02-07, p. 5 et 49.

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