Le 7 février, le Parlement a définitivement adopté la loi relative à la fonction publique territoriale (FPT). Tour d'horizon des principales avancées apportées par ce texte, attendu depuis quatre ans par 1,7 million de fonctionnaires territoriaux et 55 000 employeurs publics locaux, et dont le vote intervient 15 jours après celui modernisant la fonction publique (1).
La loi consacre d'abord le droit à la « formation professionnelle tout au long de la vie » des agents territoriaux et en définit précisément le contenu, en distinguant clairement les actions de formation obligatoires (formation d'intégration et de professionnalisation), définies par les statuts particuliers, des actions de formation facultatives, à l'initiative des agents ou des employeurs. En cohérence avec cette modification, la classification des différentes actions de formation dont peuvent bénéficier les agents territoriaux est améliorée.
S'agissant des formations facultatives, deux innovations majeures peuvent être relevées : d'une part, une formation de perfectionnement, dispensée en cours de carrière à la demande de l'employeur ou de l'agent, est créée ; d'autre part, les fonctionnaires territoriaux peuvent dorénavant bénéficier d'une préparation aux concours et aux examens professionnels de l'ensemble de la fonction publique, et non plus seulement à ceux de la FPT. Par ailleurs, le nombre de refus successifs pouvant être opposé par l'administration à la demande de formation non obligatoire formulée par un agent est réduit de trois à deux. La loi prévoit également l'adoption d'un décret précisant les types de formations susceptibles d'être précédés, à la demande de l'agent, d'un bilan de compétences ainsi que les modalités de celui-ci, et l'instauration d'un livret individuel de formation, qui retrace les formations et bilans de compétences dont l'agent bénéficie. Elle fait expressément figurer les actions de lutte contre l'illettrisme et pour l'apprentissage de la langue française parmi les actions de formation dont peuvent bénéficier les agents territoriaux. Enfin, elle étend la formation initiale, désormais dénommée « formation d'intégration », à l'ensemble des agents, quelle que soit donc la catégorie dont ils relèvent, sachant que, actuellement, la plupart de ceux de catégorie C n'en bénéficient pas (2).
Tout agent de la FPT occupant un emploi permanent bénéficie à présent également, à l'instar des salariés de droit privé, d'un droit individuel à la formation (DIF) d'une durée de 20 heures par an (3). Pour les agents à temps partiel et ceux nommés dans des emplois à temps non complet, cette durée est calculée prorata temporis. Les droits acquis annuellement par l'agent au titre du DIF peuvent, comme dans le privé, être cumulés sur une durée de six ans, dans la limite de 120 heures. L'agent ne peut faire valoir ce nouveau droit, qui est mis en oeuvre à son initiative en accord avec l'autorité territoriale, que pour les actions de perfectionnement ou de préparation à un concours ou à un examen inscrites au plan de formation de la collectivité. Précision importante : seules les actions réalisées à la demande de l'agent s'imputent sur le crédit d'heures, ce qui garantit le caractère personnel du DIF. Concrètement, l'autorité territoriale détermine, après avis du comité technique paritaire, si et dans quelles conditions le DIF peut s'exercer en tout ou partie pendant le temps de travail. Sachant que, lorsque la formation est dispensée en dehors du temps de travail, la collectivité doit verser à l'intéressé une allocation de formation. Dans tous les cas, les frais de formation engagés sont à sa charge. A noter que, en cas de désaccord pendant deux années successives entre l'autorité territoriale et l'agent sur l'action de formation demandée, ce dernier bénéficie d'une priorité d'accès aux actions de formation équivalentes organisées par le Centre national de la fonction publique territoriale.
Autre avancée notable : il peut désormais être tenu compte des formations professionnelles et des bilans de compétences dont l'agent bénéficie tout au long de sa carrière pour réduire la durée des formations obligatoires ou, dans les conditions définies par les statuts particuliers, pour l'accès à un grade, corps ou cadre d'emplois par voie de promotion interne.
Dans le même esprit, le législateur permet aux fonctionnaires astreints à une action de formation obligatoire d'être dorénavant dispensés d'une partie de celle-ci à raison de leur expérience professionnelle antérieure.
Par ailleurs, la possibilité d'accorder aux fonctionnaires territoriaux un congé pour validation des acquis de l'expérience et un congé pour bilan de compétences est prévue.
La loi précise, en outre, s'agissant des concours externes, que les concours sur titres doivent désormais nécessairement comporter, en sus de l'examen des titres et des diplômes, une ou plusieurs épreuves, et permet la prise en compte de l'expérience professionnelle des candidats pour les concours internes, externes et troisième concours de la FPT, ainsi que pour la promotion interne « au choix » et l'avancement de grade.
La loi contient un certain nombre d'autres avancées pour les agents territoriaux. Outre la reconnaissance du caractère obligatoire de l'action sociale dans la FPT - point que le projet de loi initial n'abordait pas - et l'octroi d'autorisations spéciales d'absence pour l'exercice du droit syndical, elle prévoit expressément, en particulier, que les agents transférés d'une collectivité territoriale vers un de ses établissements publics, ou inversement, conservent leur régime indemnitaire et les avantages collectivement acquis. Ce maintien est toutefois subordonné à la décision de l'organe délibérant de la collectivité ou de l'établissement public d'accueil.
Par ailleurs, un agent contractuel peut dorénavant conserver le bénéfice de son contrat à durée indéterminée lorsqu'il est recruté pour occuper un nouvel emploi par la collectivité territoriale ou l'établissement public qui l'employait déjà, sous réserve que ses nouvelles fonctions, définies à son contrat, soient de même nature que celles exercées précédemment.
Le texte clarifie en outre le rôle des différentes institutions intervenant au bénéfice des agents territoriaux, via notamment une nouvelle répartition des compétences entre le Centre national de la fonction publique territoriale et les centres de gestion. Mais l'idée de créer un établissement public national chargé de la coordination de ces centres n'a finalement pas été retenue, ce que déplore notamment le président du Conseil supérieur de la FPT, Bernard Derosier, également député (PS) du Nord. Celui-ci estime plus généralement, à propos de la loi, que « la montagne a accouché d'une souris » : « les avancées en matière de formation professionnelle et l'action sociale obligatoire pour tous les agents territoriaux [...] ne suffisent pas à donner à ce texte la portée attendue ; la réforme des institutions n'est pas au rendez-vous et le financement des dispositifs introduits n'est pas garanti »...
(2) Une avancée d'autant plus notable que les agents les moins qualifiés (catégorie C) représentent plus de 75 % des effectifs territoriaux.